Constitution européenne :
Il reste deux mois pour renverser la vapeur

François Rebsamen



Entretien avec François Rebsamen, maire de Dijon, paru dans le quotidien Le Monde daté du 31 mars 2005
Propos recueillis par Isabelle Mandraud
 

Quelle est votre réaction après la publication d'une série de sondages qui placent le non en tête des intentions de vote sur la Constitution européenne ?
Il faut relativiser ces sondages. Ils traduisent un malaise, une sorte de dépression de la France, mais ce n'est qu'un instantané, sur des échantillons assez faibles. Il reste deux mois avant le référendum pour renverser la vapeur : c'est le temps nécessaire pour convaincre les Français, dont la grande majorité demande à se faire sa propre opinion. Les arguments de raison du oui nécessitent plus de temps que les arguments démagogiques du non.

La consultation des militants du PS, le 1er décembre 2004, s'était conclue par la victoire du oui. Or, aujourd'hui, le non semble progresser particulièrement dans l'électorat socialiste. Comment l'expliquez-vous ?
Il faut reconnaître qu'il y a un trouble lié à la situation sociale. Le non cristallise ce mécontentement. Les Français ne veulent pas le lâcher car cela leur permet de résister au gouvernement. Ce non n'est donc pas un non de conviction. Mais nous avons sans doute cru trop facilement que l'électorat réagirait comme nos militants, qu'il était aussi informé. Cette longueur d'avance nous a desservis car elle nous a endormis. Il faut recommencer, réexpliquer nos arguments. Les arguments du non, qui est plus facile d'approche, sont culpabilisants. Ils ne tiendront pas sur la durée, comme cela s'est passé en interne.

Pourquoi la campagne du oui, au PS, ne démarre-t-elle pas ?
Mais nous sommes déjà en campagne ! A Dijon, nous organisons un café-débat quasiment tous les soirs. Nous avons également prévu 20 meetings régionaux, et au moins 350 réunions publiques avec un intervenant national. 400 000 affiches avec notre slogan " L'Europe sociale passe par le oui " vont être placardées, trois tracts, dont l'un dénoncera les mensonges du non, et 600 000 badges " Oui " avec le poing et la rose, seront distribués. Il y a une tribune médiatique pour le non qui laisse place à de gros mensonges, sur l'avortement ou le divorce, par exemple, et qui présente l'image d'un PS divisé en deux alors que 80 % des militants sont respectueux du vote du 1er décembre.

Avec quels arguments espérez-vous convaincre les Français ? Existe-t-il un oui de gauche ?
Bien sûr. Avec les socialistes européens, nous pourrons avoir des avancées sociales importantes avec ce traité constitutionnel. Tous les ans, il y aura un sommet social européen qui débattra de la croissance et de la politique sociale. C'est une avancée demandée par la Confédération européenne des syndicats que les socialistes ont obtenue lors de la rédaction de ce traité. La victoire du oui, c'est aussi une étape importante vers l'alternance de 2007. Le non, en revanche, isole la gauche française, la France, et met l'Europe en panne.

Certains partisans du oui utilisent l'argument du 21 avril 2002. Qu'en pensez-vous ?
Cela ne me semble pas, aujourd'hui, très opportun. Mais ce qui est vrai, c'est que le non est un agglomérat qui va de Le Pen à Laguiller, sans alternative. Le non de gauche est isolé. Ce sont les mêmes qui ont refusé d'aller avec Jospin en 2002.

Qu'attendez-vous de Jacques Chirac et du gouvernement dans cette campagne ?
C'est le rôle d'un président de la République d'expliquer aux Français les enjeux du référendum. Quant au gouvernement, moins on le voit, mieux on se porte.

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