Des régions laboratoires de l'action publique

Alain Rousset



Entretien avec Alain Rousset, président de l'Association des régions de France (ARF), paru dans le quotidien Le Monde daté du 31 mars 2005
Propos recueillis par Béatrice Jérôme
 

En tant que président de l'Association des régions de France (ARF) et président (PS) du conseil régional d'Aquitaine, comment expliquez-vous que les régions aient vocation à être des " laboratoires de l'action publique " ?
Les régions interviennent dans des domaines qui sont porteurs de progrès humains et économiques : la formation, l'éducation, l'emploi, la recherche... Elles sont naturellement tournées vers l'avenir. Historiquement, elles ont toujours eu un rôle d'impulsion et de mise en cohérence des politiques publiques, qu'il s'agisse de celles de l'Etat ou des autres collectivités.

Pour lutter contre les délocalisations, quand l'Etat se retire, seule la région peut avoir une réponse globale en jouant à la fois sur la recherche, les transports, la formation, la modernisation du tissu industriel. C'est à elle de faire fonctionner tous ces leviers.

Les exécutifs PS n'ont-ils pas tendance à s'éparpiller ?
Depuis un an, les régions font de nécessité vertu. Plus que toute autre collectivité, nous avons avec l'Etat des compétences partagées. Celui-ci s'est massivement désengagé des territoires en raison des choix fiscaux et budgétaires du gouvernement. Nous ne pouvions pas refuser de suppléer toutes ses défaillances. Nous ne sommes pas pour autant sortis de nos domaines. Quand l'ANPE, par exemple, ne finance plus les transports gratuits pour les chômeurs et que la région prend en charge cette dépense, elle reste dans sa compétence en matière de transport. Pour autant, les régions ne peuvent pas remplacer l'Etat. En Aquitaine, il s'est désengagé à hauteur de 50 millions d'euros, en 2005, alors que la région ne se substitue à lui qu'à hauteur de 27 millions. A terme, étant donné la crise financière qui les menace, les régions vont devoir faire des choix. Et se recentrer sur leurs compétences propres.

Ne reprochez-vous pas à l'Etat de se désengager et en même temps de trop intervenir ?
A l'Etat de garantir la cohésion sociale et d'assurer la péréquation. Pour le reste, il faut qu'il fasse confiance aux collectivités, qu'il cesse d'être paternaliste. Il faut que disparaissent les doublons entre les administrations déconcentrées de l'Etat et les services des régions.

Le souci de présence tous azimuts de l'Etat sur les territoires pour contrôler les responsabilités locales coûte cher. Il l'empêche d'intervenir là où il le devrait - santé, éducation, sécurité, justice - mais aussi de maintenir les services publics. La décentralisation, c'est l'âge adulte de la démocratie.

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