Le Congrès du Parti socialiste ne sera pas qu'une affaire d'hommes !



par Michèle Sabban, secrétaire nationale aux droits des Femmes.
Point de vue paru dans l'Hebdo des socialistes daté du 20 octobre 2002


 
Dans la perspective du congrès, les initiatives se succèdent les unes aux autres. Chacun y va de son commentaire, de sa tribune ou de son appel pour apparaître et peser, pour agir et souvent proposer. Cette effervescence a de quoi surprendre, certes. Mais c'est la loi de tout congrès que de favoriser la multiplication des expressions et la diversité politique des prises de position.

Après Henri Emmanuelli et Jean-luc Mélenchon, après Vincent Peillon, Julien Dray et Arnaud Montebourg, après six premiers fédéraux épris d'états d'âme à l'égard de la direction nationale et à regarder de plus près cette agitation partisane, on ne peut qu'être frappé par l'absence des femmes dans leur texte.

Rares sont les thématiques féministes retenues dans ces appels et tribunes !

Jusqu'à présent, le Parti socialiste était féministe comme il se sentait progressiste et internationaliste. Chacun garde en tête les efforts qui avaient été entrepris, sous l'impulsion de Lionel Jospin, pour donner aux femmes toute leur place au sein de l'organisation comme dans l'ensemble de la société. Mais les temps changent vite. « La guerre sera l'affaire des hommes » répond Hector à Andromaque dans l'Illiade. « Le Congrès sera l'affaire d'hommes » semblent aujourd'hui nous indiquer ces chers signataires.

Le parti ne peut oublier ce qui a été fait de 1997 à 2002

Rien, ou si peu, dans le questionnaire envoyé aux militants ne fait référence au travail gouvernemental en faveur de la condition féminine. Et pourtant, que de chemin parcouru depuis 1995 et l'épisode des Juppettes. Que de changements opérés depuis la loi sur la parité, la mise en œuvre du congé paternité ou l'allongement de la durée légale de l'IVG. Le parti ne peut oublier ce qui a été fait de 1997 à 2002 ! Il ne peut ranger ces avancées à l'arrière-plan de notre mémoire collective, mais doit, au contraire, s'en saisir pour aller de l'avant. La tâche est encore immense pour bâtir une « société partagée » dans laquelle les femmes puissent s'affirmer et se construire.

Le combat pour les droits des femmes n'est pas un combat d'arrière-garde. C'est un enjeu de civilisation et doit être, en tant que tel, porté par le Parti socialiste. Il n'est pas possible aujourd'hui de limiter la question de l'émancipation de la condition féminine au seul problème de la prostitution.

En termes d'éducation, de sexualité, de vie quotidienne et de foyer, les droits des femmes sont non seulement à défendre, mais restent encore à conquérir. Lutter contre le sexisme ordinaire, par l'éducation du respect du corps et de la personne, dès le plus jeune âge. Quelle société proposons-nous à notre jeunesse ? Quand les jeunes filles sont victimes de sexisme parfois de violence et d'actes de barbarie (…)

Remettre en cause nos pratiques internes

Il s'agit bien pour nous d'inventer un projet de société dans lequel les femmes puissent être pleinement libérées de leurs contraintes. Au sein même du Parti socialiste, nous devons remettre en cause les structures, les mécanismes et les pratiques internes qui font, par leurs horaires et leurs exigences, obstacle à la participation des femmes à la vie de notre organisation.

Comment est-il possible de concilier sa vie de mère avec celle d'élue et de militante ? Comment favoriser l'engagement politique des jeunes femmes ? Comment intégrer dans nos programmes les nouvelles revendications féministes ?

C'est aussi à ce genre de questions, qui ne sont pas aussi mineures que certains le pensent, que doit répondre le prochain congrès du Parti socialiste. C'est par la qualité de nos réponses que nous ferons la preuve de notre rénovation. La rénovation, justement, ne peut pas être un étendard agité pendant une bataille et replié sans un bruit dès le lendemain.

Je fais partie de celles et ceux qui considèrent qu'on ne peut vouloir une mise à jour sans toucher à rien. Mais si nous voulons vraiment faire du PS le parti de toute la société, il faut de l'audace, beaucoup d'audace. Nous devons trouver les mécanismes susceptibles de mener de véritables campagnes européennes et de rapprocher les militants socialistes européens. Les initiatives de jumelage entre sections constituent, en ce sens, une piste originale. Nous devons aussi répondre de façon plus présente aux initiatives internationales visant à réguler la mondialisation libérale, à soutenir les pays du Sud, à militer pour les droits des femmes dans des pays où elles subissent le joug des hommes.

La période que nous vivons est un moment d'incertitude ; c'est un moment de débats, de clarification, et d'enjeux sur notre définition politique.


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