Refonder le PS,
c'est possible si...



Point de vue de Claude Saunier, sénateur des Côtes-d'Armor.
Le 4 novembre 2002


 
La famille socialiste connaît une poussée de fièvre autour d'une interrogation : le Parti socialiste va-t-il - enfin - engager sa refondation ? La question n'est pas anodine. Ni pour les socialistes qui doivent assumer leurs responsabilités passées et futures, ni pour la gauche à reconstruire, ni pour la démocratie affaiblie par un printemps électoral calamiteux.

Les mots ont un sens. « Refondation » ou « rénovation » ? Quelques esprits timides se contenteraient de rénover. Une simple couche de peinture sur la vieille maison socialistes lui permettrait de retrouver sa place dans le jeu traditionnel de l’alternance électorale. Les voix les plus nombreuses appellent cependant à une refondation. C’est , semble-t-il, la ligne officielle de la direction socialiste qui invite à « tourner la page d’Epinay ». Cette perspective radicale est la voie du réalisme et de la sagesse. Elle est légitime face aux échecs électoraux du printemps dernier. Elle est logique face à l’ampleur des mutations économiques, sociales et culturelles enregistrées depuis 30 ans. Elle est indispensable face à l’obligation de sursaut et de reconquête qui doit animer les socialistes.

Mais, comme à l’opéra, il ne suffit pas que le chœur des ténors entonne l’hymne de la refondation. Il faut passer aux actes. Or, le trouble commence à gagner les socialistes sur leur capacité collective à atteindre l’objectif. Certes, ils savent depuis Mitterrand qu’il faut « donner du temps au temps » et ils connaissent le calendrier du Congrès. Mais, dans les faits, ils entendent les déclarations tonitruantes des uns, ils interprètent les lourds silences des autres, ils constatent le flou subi ou entretenu par la direction. Ils craignent les manœuvres d’appareil, les jeux personnels, et, au total, la confiscation du débat refondateur qu’ils attendent.

Car cette refondation est indispensable. Elle peut encore s’engager si les socialistes respectent trois conditions : comprendre le 21 Avril, s’enraciner dans le réel, affirmer leur volonté de réforme.

Comprendre le 21 Avril, c’est reconnaître l’ampleur du séisme politique du printemps, en chercher les causes par un examen lucide du bilan gouvernemental et de la conduite de la campagne, et surtout identifier les racines de la crises dans une société bouleversée par les mutations, fracturée par les inégalités, déstructurée par la machine à exclure qui a pulvérisé le socle de la cohésion républicaine.

S’enraciner dans le réel c’est d’abord ausculter la société, entendre ses craintes et ses aspirations. Mais c’est aussi identifier les faits structurants, ceux qui façonnent l’histoire. Plus que jamais la réflexion socialiste doit s’appliquer au cœur du dispositif : la mondialisation libérale, et le capitalisme financier. La refondation socialiste devra se fonder sur la reconnaissance du rôle central du capitalisme, sur l’analyse de ses mécanismes, de sa dynamique et de ses errements - si évidents aujourd’hui - non pour s’y soumettre mais pour le transformer.

Affirmer la volonté de réforme c’est choisir de se positionner clairement par rapport aux mode de production dominant, ne pas se contenter de le gérer, même « socialement ». C’est aussi ne pas se contenter des facilités des postures théoriques de combat sans suites pratiques. C’est vouloir peser réellement sur le cours des événements par une action permanente, durable, cohérente.

Le trouble actuel risque de s’amplifier et pourrait compromettre l’efficacité du prochain congrès. La direction du PS, en particulier François Hollande, doit maintenant définir les termes du débat, poser des jalons, prendre ses responsabilités personnelles en s’exprimant. Cette clarification doit porter sur la méthode et sur le fond. Elle est indispensable à l’ouverture d’un vrai débat politique. Elle est le préalable à l’engagement personnel des socialistes dans le grand et long chantier de refondation qui s’impose maintenant.



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