OUI, parce que la politique sociale est inscrite noir sur blanc dans le traité constitutionnel

Jean-Pierre Sueur


Point de vue signé par Jean-Pierre Sueur, sénateur du Loiret
12 mai 2005
 
Le traité constitutionnel concerne tous les Français. Il est très positif qu’ils en débattent largement. La question de la politique sociale revient souvent dans les débats. J’aimerais m’attacher à un seul des articles du texte, l’article 209 de la troisième partie, qui porte sur la politique sociale prévue par le traité.

Certains opposants au traité invoquent cet article, lors de réunions publiques que j’ai tenues, considérant qu’il va dans le sens d’une « Europe libérale » qui serait contradictoire avec toute politique sociale digne de ce nom. C’est absolument faux. On ne peut absolument pas conclure cela lorsqu’on lit dans sa totalité le texte de l’article. Chacun peut le constater, et voilà ce que je leur réponds :

Dans sa première partie, cet article expose que « l’Union et les Etats membres (...) ont pour objectif la promotion de l’emploi, l’amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès, une protection sociale adéquate, le dialogue social, le développement des ressources humaines permettant un niveau d’emploi élevé et durable et la lutte contre les exclusions ».

Tous ceux qui sont attachés à une politique sociale européenne forte ne peuvent rien trouver à redire à cette définition qui - notons-le - inclut la perspective d’une « égalisation dans le progrès » dans ces domaines sociaux, c’est-à-dire le contraire d’un nivellement par le bas.

Mais, nos opposants répondent : « lisez la suite ! » On y lit « qu’une telle évolution résultera tant du fonctionnement du marché intérieur, qui favorisera l’harmonisation des systèmes sociaux [...] ».

Et là, nos détracteurs veulent faire de ce bout de phrase la démonstration que la politique sociale est, en quelque sorte, asservie au « fonctionnement du marché intérieur ». Mais ce n’est pas le sens de ce texte qui traduit simplement que la croissance économique n’est pas neutre en termes de développement des politiques sociales et des politiques d’emploi, ce que tout le monde peut constater.

Et c’est d’ailleurs ce que nous disons à l’égard du gouvernement Raffarin. Nous reprochons à ce gouvernement de refuser de relancer la croissance et de prendre les dispositions nécessaires pour le faire. La conséquence c’est de lourdes difficultés en matière d’emploi et de politique sociale. C’est ce que vivent les Français aujourd’hui.

Mais surtout, cet article 2009 ne s’arrête pas là... Il précise que l’évolution en question résultera « tant » (je souligne) de ce qui a été rappelé ci-dessus « que » (je re-souligne) « des procédures prévues par la Constitution et du rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres ».

Cette seconde partie de la phrase est très claire. Elle fait explicitement appel aux politiques publiques. Il est vraiment difficile de voir de « l’ultralibéralisme » dans ce recours aux dispositions « législatives, réglementaires et administratives » !

En conclusion, s’il est préférable de pouvoir compter sur une croissance forte pour développer l’emploi et promouvoir la solidarité, il est bien écrit noir sur blanc dans cet article qu’il faut aussi pouvoir compter sur des politiques publiques appropriées.

Le traité constitutionnel propose clairement d’aller, dans le cadre d’un économie ouverte (mais personne ne propose de revenir à une économie fermée !) vers une Europe plus solidaire, où les règles économiques sont encadrées et contre-balancées par l’action publique. C’est, clairement, notre différence avec les politiques libérales. Voilà pour moi une très bonne raison de voter OUI !


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