Redonner
de l'espoir au peuple
Congrès de Dijon - 17 mai 2003

Discours de Manuel Valls, député-maire d'Evry
Tribune du Congrès de Dijon


 
Chers camarades,

comme nous le faisons depuis hier, prenons la mesure de l’aggravation de la situation sociale, de l’approfondissement des inégalités, des ravages de la remontée du chômage que les choix du gouvernement ont décuplé. Prenons la mesure de la révolte, de la colère qui gronde, mais aussi de la désespérance qui gagne notre société et qui explique pour beaucoup ce qui s’est passé le 21 avril 2002. La droite échoue et échouera sur la question sociale, mais au fond, son modèle de société n’est pas incompatible avec l’aggravation des inégalités, la ghettoïsation des quartiers, la dépolitisation des quartiers, la dépolitisation du pays, leur repli sur des bases communautaires, la montée du Front national si cela permet d’éliminer la gauche.

Rien n’est écrit d’avance, rien n’est moins sûr qu’un retour au pouvoir de la gauche sur la seule base des erreurs et des échecs de la droite, rien n’indique que le 21 avril soit derrière nous, qu’il ne puisse pas se reproduire, bien au contraire. Les ingrédients d’un élargissement de l’assise de l’extrême droite sont présents, ils sont réunis pour de nouveaux coups de tonnerre régionaux dans un an, seule la gauche peut et doit endiguer, empêcher ce risque terrible pour notre démocratie, et c’est ce qui commence aujourd’hui ici à Dijon dans ce congrès avec François Hollande, c’est cette résistance à la montée de l’extrême droite. Et les socialistes, chers camarades, doivent être en première ligne pour combattre le Front national, pas seulement dans les manifestations, certes nécessaires mais insuffisantes, pas seulement en qualifiant l’extrême droite pour ce qu’elle est raciste, antisémite et violente, il faut le dire, mais c’est souvent inefficace, pas seulement en proposant un changement des institutions, non.

Par nos pratiques, nos discours, nos propositions, nous devons arracher tous ces Français qui ont voté pour l’extrême droite et qui sont tentés de le faire, il faut les arracher de cette impasse, de cette emprise mortifère, par le militantisme retrouvé d’abord dans les quartiers, dans les cages d’escaliers, et nous avons besoin d’un grand parti militant et populaire, mais aussi et surtout en étant clair, en offrant une perspective, en redonnant de l’espoir au peuple. La responsabilité qui pèse sur nous, notre responsabilité est alors énorme.

Soyons d’abord clairs ce sont oui, Arnaud, les petits, les sans-grades, les ouvriers, les employés, les salariés de ce pays qui attendent de nous, comme nous le sommes avec François depuis plusieurs mois, que nous soyons d’abord à leurs côtés comme nous l’avons été, un peu seuls, il y a deux ans, auprès de Lu-Danone alors que nous étions au pouvoir.

Que nous disions notre opposition totale, résolue, pas de leçons entre nous, au projet du gouvernement concernant les retraites et l’éducation, que le mot d’ordre qui soit le nôtre à partir de ce congrès soit bien : « Oui, le retrait des plans Fillon et Ferry et l’ouverture d’une véritable négociation. » Et nous serons, chers camarades, et nous le sommes tous, depuis des mois, élus et militants, et nous serons lundi avec les enseignants, et dimanche 25 mai avec la rue afin qu’elle submerge ce gouvernement qui est le premier gouvernement de ce pays, de l’histoire moderne de ce pays, à proposer une telle régression sociale et à offrir comme avenir le recul social. Mais nous devons offrir, proposer des réformes qui doivent être marquées d’abord par une autre vision de la société qui place la lutte contre les inégalités sociales, la volonté de la promotion sociale par l’école, la formation, l’emploi, la hausse des salaires, au cœur de nos projets.

Et aux enseignants, qui sont toujours les hussards modernes de la République, nous devons leur dire que c’est avec ceux que nous construirons le projet pour l’école, celle de l’égalité des chances au cœur de notre projet, que nous ne les méprisons pas comme l’un des nôtres a pu leur donner, il y a quelques années, le sentiment, que nous leur tendons la main pour construire un projet pour l’école parce que c’est un projet sur la société, sur le contenu des savoirs et sur la transmission des valeurs.

Et c’est bien, chers camarades, un projet de société que nous devons présenter pour les régions, les villes, les quartiers où se dessine la France de demain, notre modèle d’intégration, de citoyenneté fonctionne mal ou ne fonctionne plus, la ségrégation sociale, territoriale, ethnique, générationnelle, s’est progressivement établie, c’est un échec, c’est celui de la République, ce n’est pas un problème de nombre, c’est un problème de politique et de lutte contre ces inégalités sociales. L’ascenseur social est bloqué et les Français et les populations issues de l’immigration qui vivent côte à côte dans ces quartiers se sentent souvent condamnés à jouer un rôle mineur dans une société qui produit de la discrimination et refuse de l’admettre. Les jeunes et les jeunes filles dans les quartiers sont les premières victimes de la violence sociale, sexuelle, de la Sécurité sociale, d’une régression des mœurs et des coutumes qui ne s’apparente pas qu’au voile et qui brise la laïcité. Le repli religieux offre des repères, un sentiment fort d’appartenance que la République ne semble plus en mesure d’apporter, là est notre défi : retrouver nos valeurs dans une République moderne car le recul des intégrismes viendra de notre capacité à retrouver, chers camarades, une ambition éducative à casser les ghettos par une autre politique du peuplement et du logement, à briser la spirale de la délinquance qui touche d’abord les plus modestes et les plus faibles, c’est-à-dire les nôtres, à lutter contre les discriminations, à permettre une véritable promotion sociale et politique, à porter haut et fort le droit de vote pour les résidents étrangers, à redonner du sens à la nation et à faire aimer la France, ses valeurs, ses identités dans l'Europe. Assumons l’idée d’une France qui change culturellement, démographiquement, dans laquelle un nouveau brassage est en cours, porteur de dynamisme et des élites de demain, c’est ça notre projet qui commence ici avec François Hollande à Dijon.



Page précédente Haut de page

PSinfo.net : retourner à l'accueil

[Les documents] [Les élections] [Les dossiers] [Les entretiens] [Rechercher] [Contacter] [Liens]