entretien avec

Mon engagement parisien
est identitaire

Trois jours avant de s'affronter à la Mutualité, les deux prétendants socialistes exposent leurs projets, proches, et leurs stratégies, opposées. A la « proximité municipale » de Delanoë répond « l'expérience politique » de Lang.

Entretien accordé au quotidien Libération. (daté du 20 mars 2000)
Propos recueillis par Renaud Dely

« Attention au hors-sujet : les électeurs sont des citoyens intelligents qui se serviront des candidats d'abord pour l'avenir de leur ville. »

Votre duel avec Jack Lang, c'est une compétition pour désigner celui qui sera battu par la droite ?

Bien sûr que non. Mais la gauche ne convaincra que si elle propose aux Parisiens une vraie solution de rechange culturelle et programmatique. Après un siècle sans alternance à Paris, elle ne gagnera pas sur des enjeux de pouvoir ou de personnes, mais parce qu'une majorité adhérera à son projet, à sa culture et à son équipe. La victoire est possible et même plausible si nous mettons la barre très haut en termes de comportement démocratique et de crédibilité de nos solutions.

Ce sera donc une élection municipale comme une autre ?

Les électeurs, de droite comme de gauche, ne voteront ni en signe d'allégeance à une personnalité, ni en songeant aux échéances de 2002. Bien sûr, le contexte national pèsera. Mais l'élection municipale est l'une des préférées des Français: ils sentent qu'ils peuvent influer sur des chantiers qui les concernent. Attention au hors-sujet: les électeurs sont des citoyens intelligents qui se serviront des candidats d'abord pour l'avenir de leur ville.

Croyez-vous l'union de la gauche plurielle encore possible dès le premier tour ?

Non. Le rassemblement est souhaitable et possible. Nous y parviendrons si notre projet guide notre stratégie. C'est pourquoi, si je suis désigné, je débattrai du projet avec les militants Verts, communistes, MDC et radicaux. Plus nous serons dans cet état d'esprit au service des Parisiens, plus nous constaterons que le rassemblement est le moyen le plus efficace de gagner. Le PS étant le plus fort, il doit avoir la position la plus responsable, et par exemple reconnaître que les Verts sont devenus la deuxième force de gauche à Paris.

Etes-vous favorable à une réforme de la loi PML (Paris-Marseille-Lyon) ?

Même si le Parlement ne vote pas la réforme d'ici là, je m'engage, dès mars 2001, à confier la gestion des équipements de proximité aux maires d'arrondissement et à leur affecter des budgets de fonctionnement et d'investissement.

Comment lutter contre la voiture ?

D'abord, Paris doit contribuer beaucoup plus fortement aux liaisons interbanlieues, comme le projet Orbital. Nous devons aussi remettre en cause l'hégémonie automobile. En diminuant le coût du stationnement résidentiel et en créant sur les grands axes des « espaces civilisés » réservés aux piétons, vélos, rollers et aux couloirs de bus ou de tramway. Ces espaces seraient séparés physiquement du reste de la circulation par une ceinture végétale, symbolique de notre projet urbain. Il faut également développer des plates-formes intermodales pour que les livraisons s'effectuent par des navettes non polluantes, par le rail ou sur la Seine.

Auriez-vous les moyens de mener une politique volontariste du logement ?

Quelque 400 000 mètres carrés d'anciens logements transformés en bureaux, aujourd'hui vides, retrouveront leur vocation initiale, en faveur du logement social et de l'accession à la propriété des jeunes ménages. De même, je propose un plan sur une mandature pour traiter les 1 200 immeubles insalubres ou menacés d'insalubrité. Je défends aussi la création d'une société d'économie mixte (SEM) qui rechercherait des conventions avec les propriétaires des 136 000 logements vides : la Ville financerait les travaux et reverserait à ces propriétaires le loyer plafonné au taux PLA ou PLI. Les terrains que l'Assistance publique va libérer dans le VIIe, le XIVe et le XVe devraient aussi favoriser la mixité sociale. Enfin, la Ville doit négocier avec l'Etat pour récupérer certains de ses terrains et encourager la création d'espaces verts.

Comment agir sur le plan économique ?

La Ville de Paris ne doit pas limiter son ambition aux sièges sociaux et administratifs, mais créer des pôles de modernité et de vitalité économique. Le projet Paris Rive gauche, par exemple, doit permettre à des entreprises de haute technologie de se rapprocher du monde de l'université et de la recherche: un immeuble «intelligent» pourrait accueillir des petites entreprises recherchant une mise en commun de certains services. La Ville peut aussi soutenir les start-up, par exemple en créant une « table d'orientation téléphonique », c'est-à-dire un numéro unique qui facilite les démarches des nouveaux entrepreneurs.

Qu'est-ce qui, sur le fond, vous distingue de Jack Lang ?

Heureusement qu'il n'y a pas un ravin entre nous ! Nous sommes tous les deux socialistes, même si nous avons une relation différente à Paris. L'enracinement et la fidélité de mon engagement parisien sont identitaires. A partir des échecs passés, j'ai contribué à reconstruire la crédibilité de la gauche parisienne et à affaiblir le système municipal. Depuis sept ans, j'ai privilégié le travail collectif : on est beaucoup plus fort et intelligent à plusieurs que seul. Enfin, mes propositions ne sont pas que conceptuelles: elles sont le produit d'une réflexion de fond et d'une vraie proximité avec les Parisiens. Et si je ne pensais pas que ma candidature est la plus adaptée aux attentes citoyennes et à la stratégie gagnante, je ne la présenterais pas.

Reproduit avec l'aimable autorisation du quotidien
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