entretien avec

Je connais la gestion de l'Etat
et celle de la collectivité locale

Trois jours avant de s'affronter à la Mutualité, les deux prétendants socialistes exposent leurs projets, proches, et leurs stratégies, opposées. A la « proximité municipale » de Delanoë répond « l'expérience politique » de Lang.

Entretien accordé au quotidien Libération. (daté du 20 mars 2000)
Propos recueillis par Renaud Dely et Antoine Guiral

« Le choix de notre candidat témoignera de la détermination de la gauche à vouloir gagner face à un candidat de poids : Philippe Séguin. »

N'êtes-vous pas en train de disputer à Bertrand Delanoë le droit d'être battu par la droite ?

Les paris difficiles ne m'ont jamais fait reculer. Avec les militants socialistes, nous voudrions démontrer que les forces du mouvement peuvent l'emporter. Une page doit être tournée. Le système de gouvernement de Paris est d'un autre âge. Paris a besoin d'une respiration nouvelle et d'une réappropriation de leur ville par les Parisiens.

L'élection parisienne est-elle d'enjeu national ?

A un an de deux scrutins nationaux, elle sera partout en France une élection politique. C'est une différence avec 1995 où l'élection municipale avait pu être relativement locale. Le débat politique avait été « purgé » par la présidentielle. Et l'ambition ne sera plus seulement de gagner quelques sièges mais de conquérir la forteresse. Le choix de notre candidat témoignera de la détermination de la gauche à vouloir gagner face à un candidat de poids: Philippe Séguin.

La gauche sera-t-elle unie dès le premier tour ?

Par tempérament, je souhaite le rassemblement le plus large. D'abord à l'intérieur du PS, où de nombreux élus et militants de toutes tendances m'ont demandé d'être candidat. Si je suis désigné, l'ensemble des socialistes parisiens seront les premiers artisans de notre combat. Ensuite, je souhaite, dès le premier tour, un accord avec les communistes et les Verts. Mon ambition est de déplacer les frontières traditionnelles de la gauche et de mobiliser massivement les jeunes, les hésitants, l'électorat populaire, bref, tous ceux qui ont envie que ça change !

Vous prônez une réforme de la loi PML mais le gouvernement y est hostile.

On peut anticiper dans l'action. A l'échelle des quartiers, dans le cadre de la loi actuelle, nous déléguerons aux conseils d'arrondissement des pouvoirs et des moyens, et nous mettrons en place des conseils de quartier, des conseils de jeunes, des conseils des anciens et des conseils représentatifs des communautés étrangères. Simultanément, il nous faudra agir à l'échelle du Paris-métropole et associer les autres communes pour régler les dossiers d'intérêt commun: transports, circulation, environnement, logement, développement universitaire.

Auriez-vous les moyens de mener une politique du logement novatrice ?

Il est temps de passer d'une gestion spéculative à une gestion humaine. Un fonds de compensation, alimenté à la fois par l'Etat, la région et la Ville, pourrait atténuer le poids du coût du foncier. Il faut aussi accroître le nombre de logements pour les familles de deux ou trois enfants et en accélérer la rotation. Une action prioritaire s'impose pour lutter contre l'insalubrité et «déghettoïser» certaines cités trop longtemps abandonnées. Enfin, il faut répondre aux 10 000 demandes de logements étudiants insatisfaites.

Comment agir sur le plan économique ?

La capitale est la seule ville de France sans projet économique. Il faudrait créer, comme partout ailleurs, une agence de développement économique pour encourager les investissements, multiplier les pépinières d'entreprises, imaginer un système de prêts d'honneur en liaison avec les chambres consulaires pour les jeunes qui se lancent, notamment dans les métiers de l'intelligence et de la création. Et seulement 800 emplois-jeunes ont été créés. Il en faudrait 8 000 !

Comment lutter contre l'invasion de la voiture ?

D'abord par un plan global de désengorgement qui, du périphérique au centre de Paris en passant par les boulevards des maréchaux, allégerait l'intensité du trafic. Mais il faut aussi construire des parkings à l'entrée de la ville, élargir les espaces réservés aux autobus, au futur tramway, aux taxis, aux vélos, lutter contre les axes rouges, etc.

Qu'est-ce qui, sur le fond, vous distingue de Delanoë ?

Nous appartenons au même mouvement: il y a un patrimoine commun de projets et d'idées. Ce qui nous rassemble est beaucoup plus vaste que ce qui nous sépare. Chacun apporte son expérience: Bertrand, celle d'un opposant pugnace à Tiberi; la mienne est celle d'un gestionnaire de l'Etat et d'une collectivité locale, animé par la passion de l'action concrète. Il ne s'agit pas de décerner un prix d'amitié ou de sympathie à l'un ou à l'autre. Les 3 500 militants sont investis d'une lourde responsabilité. Ils seront comme les délégués du peuple de gauche et des forces du mouvement. Ils vont devoir répondre à deux questions: qui est le mieux en mesure d'assumer les fonctions de maire de Paris ? Qui peut, par ses combats antérieurs, sa personnalité, rassembler au-delà des limites habituelles de la gauche ? Il faut pouvoir aussi l'emporter dans le XIIe, sans quoi aucune victoire n'est possible. En gage de ma volonté de conduire les militants au succès, j'ai proposé de me présenter dans cet arrondissement qui n'a jamais voté à gauche et de tout faire pour franchir la barre des 50 %. Est-ce pour cette raison qu'à entendre les lieutenants de Jean Tiberi ou de Philippe Séguin, je ne suis manifestement pas le candidat préféré des dirigeants de la droite ?

Reproduit avec l'aimable autorisation du quotidien
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