| Avec trois députés socialistes, Patrick Bloche, Christophe Caresche et André Vallini, vous appelez à la refondation du Parti socialiste, alors que s'ouvrent les journées parlementaires du PS. Est-ce un avertissement de la " nouvelle génération " à l'égard des " éléphants " ?C'est une sorte d'appel préventif. Nous souhaitons que le débat soit le plus ouvert possible. Avec mes trois collègues, nous représentons des sensibilités différentes au Parti socialiste. Or tout se passe comme si les rôles avaient déjà été distribués : certains se disent rénovateurs, d'autres se disent à gauche... Le vaudeville de la Gauche socialiste, c'est Labiche au pouvoir ! Le congrès de mai 2003 serait déjà écrit alors qu'il n'a pas commencé : on se détourne des questions de fond, vers les enjeux de pouvoir. Tout se passe comme si on jouait le même film en changeant seulement les sous-titres. Mais c'est le scénario qu'il faut modifier ! La gauche ne doit pas se rabougrir. L'enjeu est de faire exploser les chapelles, pas d'en créer de nouvelles. Ce serait une erreur profonde de croire dans une loi mécanique de l'alternance. Avec mes trois collègues, en 1997, nous faisions partie d'un groupe de nouveaux députés [le Rako]. A l'époque, on se disait que si les élections tournaient mal pour nous en 2002, on ne voulait pas devoir choisir entre des hommes, mais entre des idées. Aujourd'hui, nous voulons que les lignes bougent, nous refusons les congrès ficelés à l'avance.
Peut-on éviter une telle effervescence après la double défaite électorale ?Nous avons perdu les élections parce que notre action et notre projet ont été en décalage avec l'évolution de la société. Nous avons été faibles sur la méthode. En 1997, on est arrivés au pouvoir en phase avec la société, et on part, cinq ans plus tard, avec le sentiment d'une coupure nette. Comment a-t-on pu transformer de l'or en plomb de cette manière ? Il ne suffit pas de bien gouverner. Le gouvernement Jospin est tombé progressivement dans les mêmes travers que les précédents : à partir de 2000, en vue des échéances électorales, il a préféré gérer l'opinion en espérant capitaliser sur les réformes passées. Nous ne nous sommes pas donné tous les moyens de transformer la société, je pense notamment à la réforme de la démocratie sociale, sans laquelle les réformes législatives peuvent rester sans effet sur le terrain. Nous proposons de redéfinir une méthode de la transformation sociale.
Faut-il, selon vous, changer le fonctionnement du PS ?Nous ne sommes ni un groupe critique ni des donneurs de leçons. Mais les militants ne supportent pas les divisions. Il y a déjà des querelles au sein de la gauche, entre les Verts, les communistes. Si on rajoute le jeu des sept familles au PS... Nous pensons qu'il faut plutôt établir des passerelles. Nous ne voudrions pas que les intolérances progressent plus vite que les convergences. Il faut une gauche efficace. Pour l'instant, le débat sur la rénovation reste abstrait, flou, ce qui laisse le champ libre à certaines démarches à l'intérieur du PS, celles d'Arnaud Montebourg, Henri Emmanuelli, etc.
N'est-ce pas à la direction du PS de mettre de l'ordre dans ses rangs ?Il faut donner une colonne vertébrale au débat. La logique serait que ce soit la direction du PS qui le fasse. Il y a cinq ou six grandes questions qui sont les clés de la rénovation : comment réformer la société, réveiller la République, rassembler la gauche, bâtir une société d'intégration ? Comment assumer la mondialisation ? Quelle Europe voulons-nous ? Aucune des contributions qu'on a pu lire ne parle de l'Europe ! On ne pourra pas sortir du congrès avec des réponses ambiguës.
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