Parti socialiste : quelles idées neuves ?

Anne Hidalgo
Anne Hidalgo

 Contribution générale au congrès national de Dijon du Parti socialiste présentée par le groupe du 17 novembre.
18 janvier 2003

Béatrice AMOSSE
1ère secrétaire fédérale du Loir et Cher

Roland BEIX
1er secrétaire fédéral de la Charente-Maritime

Brigitte CHANÉAC
1er secrétaire fédérale de l'Ardèche

Jean-Paul CHARTRON
1er secrétaire fédéral de la Loire

Christophe CLERGEAU
membre du Conseil national

Bernard COUTURIER
1er secrétaire fédéral des Deux-Sèvres

Alain FABRE-PUJOL
1er secrétaire fédéral du Gard

Anne HIDALGO
secrétaire nationale

Pascal JOSEPH
membre du Conseil national

Bernard LACOEILLE
1er secrétaire fédéral de Charente

Loïs LAMOINE
1er secrétaire fédéral du Loiret

Michel LALLINEC
1er secrétaire fédéral du Morbihan

Frédéric LÉVEILLÉ
1er secrétaire fédéral de l'Orne

Hugues MANOUVRIER
1er secrétaire fédéral de la Savoie

Laurent RABATÉ
1er secrétaire fédéral de l'Eure et Loir

Denis TROESTER
1er secrétaire fédéral de l'Yonne

Thibaud VILLEMIN
1er secrétaire fédéral de la Meuse

 Qui sommes nous ?
 Parti socialiste : quelles idées neuves ?





Qui sommes nous ?

C'est la première question que chacun se pose quand une initiative naît au sein du Parti socialiste. Comme si, plus que n'importe quel contenu, l'identité des auteurs suffisait à définir leur engagement. Dans un parti qui a désappris la confrontation sur les projets, où tout mouvement est analysé au filtre des enjeux tactiques, il n'est pas possible d'envisager le moindre acte sans avoir préalablement décliné son pedigree.

Alors qui sommes-nous ? Le " sel de la terre " si l'on entend les discours récurrents sur le besoin de sang neuf au sein du Parti socialiste. Rien ou pas grand chose, si l'on adopte les critères en vigueur, car nous ne sommes pas un courant. Nous n'avons pas de candidat à l'élection présidentielle. Nous ne prétendons même pas devenir majoritaires seuls au prochain congrès de Dijon…

Nous sommes des militants du Parti socialiste. Tout simplement.

Nous sommes de jeunes responsables fédéraux, de jeunes élus, des membres des instances nationales, des premiers secrétaires fédéraux. Parmi nous certains ont été jospinistes, rocardiens, aubryistes, poperénistes, chevènementistes, signataires de la motion 2 du congrès de Liévin…

Nous n'avons pas de regrets. Nous ne condamnons pas les courants lorsqu'ils sont l'incarnation d’orientations politiques. Nous croyons simplement que nombre d'entre eux ont fait leur temps, que la page de cette histoire est tournée, n’en déplaise à ceux qui en font encore leur fonds de commerce. Social-libéralisme contre social-gauchisme ?

Certaines oppositions sentent la naphtaline et pour tout dire, sonnent faux après cinq années de gouvernement de Lionel Jospin menées avec la participation de tous…

Issus des fédérations, nous avons commencé à travailler ensemble au lendemain du 21 avril 2002. Une idée nous réunit : contribuer de la manière la plus efficace possible au nécessaire débat et conduire la rénovation de notre Parti lors du congrès de Dijon en mai 2003.

Nous avons fait notre le principe d’un débat militant, franc, ouvert, sincère, pour permettre au PS d’accueillir dans de bonnes conditions ses très nombreux nouveaux adhérents ; faire tomber les tabous ; effacer les frontières artificielles des courants du congrès de Rennes ; faire émerger les nouvelles pratiques militantes et citoyennes ainsi que de réelles idées neuves (pas celles que l'on ressort à chaque congrès, pour mieux les oublier ensuite).

Nous voulons prendre en charge les nouvelles questions politiques en menant une réflexion ancrée dans les valeurs de toujours des socialistes, faire émerger des propositions et des idées nouvelles sur les enjeux traditionnels et surtout proposer une rupture avec les mauvaises habitudes.
Depuis 10 ans, les jeux au sommet ont perdu tous liens avec les dynamiques qui traversent le PS réel. Si le congrès de Dijon doit servir à quelque chose c’est bien à permettre à ces nouvelles réalités du PS de s’exprimer, à enterrer les courants d’hier et mettre entre parenthèses les ambitions présidentielles. Nous voulons contribuer à notre mesure à l'émergence d'une majorité de projet. Nous comptons sur François Hollande pour l'inspirer et l'animer.

Pas organisés en courant, sans ambition autre que de faire avancer le débat, nous sommes pour certains un OPSNI, un Objet Politique et Socialiste Non Identifié.

Trois jeunes membres des instances nationales et six premiers fédéraux ont lancé le débat dans une tribune publiée dans Libération. Depuis 6 autres Premiers Secrétaires Fédéraux ont signé cet appel à un débat sincère, serein, et porteur de modernité au delà des clivages traditionnels, artificiels à bien des égards. Ils ont été rejoints par des responsables du PS, de nombreux élus locaux, jeunes le plus souvent, mais pas exclusivement. Certains parmi nous compensent leur âge par leur jeunesse d'esprit et d'engagement…

En un mot, la journée du 17 novembre est une journée sans stars, starlettes et sans paillettes. Nous voulons qu'elle soit une journée de travail. Nous voulons un rendez-vous utile. Nous faisons un pari fou. Celui d'investir le débat d'idées. Nous voulons y entraîner le congrès. C'est, au vu de ce que nous sommes, prétentieux et illusoire. C'est pourtant nécessaire. Mais après tout, la raison peut devenir contagieuse…

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Parti socialiste :
quelles idées neuves ?

 
Socialistes : quelles sont vos idées neuves ? c'est à répondre à cette interpellation que nous avons consacré la deuxième partie de nos travaux, le 17 novembre 2002, à l'Assemblée Nationale. A la suite de cette journée, les organisateurs se sont retrouvés pour tenter d'apporter des réponses aux questions posées. Les lignes qui suivent en sont le produit.

Après le 21 avril, faut-il définir une forme de nouveau socialisme ?
Pour notre part, nous nous gardons de défendre au travers des lignes qui suivent un nouveau socialisme. Nous enracinons nos combats futurs dans ceux de nos aînés. Nous avons choisi en revanche de refonder certains concepts qui appartiennent à notre patrimoine collectif pour leur rendre une force critique et une capacité tranformatrice dans notre société. C'est ce que nous avons notamment fait autour de " l'égalité des possibles " . Il s'agissait de revisiter un sujet comme celui de l'égalité pour construire, par la pertinence des propositions, un socialisme d’aujourd’hui.

Nous avons également cherché à développer une pensée critique sur les thèmes qui, sans être originaux pour l'opinion, sont demeurés trop absents de la vie politique. Ce sont souvent des sujets nouveaux liés aux évolutions de la société et de l'économie. Parce que la gauche ne peut être absente sur ces enjeux émergents, il est temps d'apporter les réponses des socialistes d’aujourd’hui.

Pour répondre au désenchantement civique, au désintérêt profond que nos concitoyens ont pour la politique, nous proposons d'abord une méthode pour la transformation sociale.

I - Pour une politique durable, globale et participative

    La politique est en crise. Elle déçoit aujourd'hui pour trois raisons principales. Elle semble être toujours en retard sur la société (développements scientifiques et techniques, moeurs etc.). Elle ne paraît plus en mesure d'influer sur le cours des choses (mondialisation libérale). Elle se dévoie en devenant le jeu de quelques-uns, qui maîtrisent ses codes, ses usages et ses rites (vie politique repliée sur elle-même).

    Pour beaucoup, l'homme politique est aujourd'hui un pompier aveugle et sourd qui tente de délivrer le monde d'un incendie général avec un seau d'eau…

    Faire de " la politique autrement " à gauche, c'est aujourd'hui redéfinir une méthode qui réponde à ces trois grandes interrogations.

       Une politique durable

      Le temps de la politique est aujourd'hui celui de l'actualité, c'est-à-dire celui de l'urgence. Il est significatif qu'il existe au Parlement une séance de questions d'actualité, mais que personne n'ait pensé à une séance de questions d'avenir. Les séances de question au gouvernement ressemblent trop souvent à l'énumération des subventions pour réparer les désastres de la nature ou des hommes.

      Gouverner c'est choisir. Pour choisir encore, il faut prévoir. C'est ce défaut d'anticipation des politiques qui limite ensuite les marges de la décision. Qu'il s'agisse des OGM,de farines animales ou de clonage, les industries ont déjà depuis longtemps développé leurs stratégies lorsque la politique commence à s'intéresser aux sujets sous la pression des citoyens, des consommateurs et du patronat lui-même. En subissant plus qu'en orientant le champ du progrès, les politiques perdent de leur légitimité et de leur force. La politique ne peut se contenter d'accompagner un mouvement qui se décide en dehors d'elle. Sa noblesse est l'anticipation. Le temps long est celui de la raison. Le temps de l'urgence est celui de la seule émotion.

      Une politique durable est une politique qui intègre la notion du temps. En ce sens, elle se préoccupe de ses effets sur le long terme. Elle ne sacrifie pas le bien-être des générations futures à celui des actuelles (retraites, environnement par exemple).

      Une politique durable intègre la durée dans ses décisions. Une loi peut, par exemple, être circonscrite dans le temps et marquer ainsi une volonté (discrimination positive) sans détruire un principe (égalité).

      Une politique durable est l'addition de mesures qui servent un même objectif sur une durée longue. L'égalité des chances, d'essence libérale, se préoccupe de placer les enfants dans une situation comparable au moment de leur formation initiale sans se soucier de facteurs antérieurs ou extérieurs à l'école. Une politique durable en matière éducative s'assimile à la possibilité pour chacun de retrouver à chaque grande étape de l'existence un droit à la formation. Une politique durable en matière de protection des salariés s'attache à leur garantir des droits, dans et hors contrat de travail, et leur assurer une sécurité professionnelle en dépit des accidents que peut subir leur carrière.

      Une politique durable est une politique dont l'orientation et les pratiques sont cohérentes, dans l'opposition comme au pouvoir. Les discours sans lendemain introduisent le doute sur la sincérité des dirigeants politiques et rendent impossibles les contrats qu'un gouvernement doit passer avec les citoyens.

      Enfin une politique durable a pour effet de rendre lisibles les enjeux. La réintroduction de grands débats, qui anticipent l'avenir d'une société, conduit inévitablement aux clarifications impossibles dans le cadre d'échanges menés dans la confusion du quotidien et de l'immédiat.

       Une politique globale

      Aujourd’hui, le monde économique vit au rythme de la globalisation. Les questions environnementales, mais aussi épidémiques ignorent les frontières dressées par les hommes.

      Rien de ce constat n'est particulièrement original : l'avenir de la planète se joue au niveau de la planète. Ce qui l'est, c'est que cette tautologie ne soit toujours pas partagée significativement par les politiques.

      Le moment est venu de construire une alternative européenne au " tout libéral " en commençant par en convaincre nos partenaires naturels au sein du Parti socialiste Européen et de l'Internationale Socialiste. Les seuls combats perdus sont ceux que l'on ne mène pas. Le PSE ne doit pas être un club de réflexion rassemblant quelques initiés, mais devenir une force de transformation européenne avec un projet unitaire sur les affaires de l'Europe du Futur.

      Mais la condition de l’alternative au tout libéral est la démocratisation de l’ensemble des niveaux de gouvernement, du mondial au local, et la création d’espaces politiques permettant d’effectuer des choix collectifs, en premier lieu au niveau européen.

      Globale, la politique doit aussi l'être en s'intéressant à tous les sujets. Aujourd'hui il y a un paradoxe grandissant entre l'omniprésence de certains sujets dans l'actualité et leur quasi absence dans le débat politique (ex : clonage, réchauffement climatique, discriminations…).

      Tous les sujets qui structurent l'existence méritent d'entrer dans le champ démocratique et de ne pas être jugés comme secondaires : la vie (bio-éthique, sécurité alimentaire…), la mort (euthanasie…), l'amour (réforme du divorce, adoption y compris par des couples homosexuels…). La politique doit s'intéresser à l'ensemble des temps d'une vie et ne pas tout soumettre au temps de travail. Au-delà du lien économique demeurent en effet d'autres formes de liens sociaux (familiaux, conjugaux, associatifs, civiques, culturels etc.). Dans une existence où chacun passe 70 % de son temps éveillé hors de la sphère de son activité professionnelle, la politique ne peut se replier dans la régulation des 30 % restants (même si la prédominance se justifie par le seul fait que le travail conditionne très largement le temps hors-travail).

      La politique globale, parce qu'elle s'intéresse à ce qui intéresse les gens, parce qu'elle se donne les moyens de sa puissance en agissant aux niveaux territoriaux pertinents, mobilisera ceux qui doutent aujourd'hui de sa capacité à transformer encore le monde.

       Une politique participative

      Hier la politique était essentiellement une affaire de délégation et de représentation. Elle doit désormais être également affaire de participation. Aujourd'hui, l'élévation du niveau général de formation, la généralisation des techniques modernes de communication, l'avènement d'une véritable civilisation de l'information conduisent les citoyens à de nouvelles exigences qui s'expriment en termes de participation active et régulière à la vie politique.

      La droite accepte, dans les faits, l’existence d’une " masse incompressible " d'exclus et d’une abstention électorale forte. La droite concentre ses efforts sur les 50 à 60 % de ceux qui continuent de participer à la vie civique.
      Fondamentalement, elle s'apprête à donner naissance à une société plus éclatée que jamais, minée par la violence et la ségrégation sociale. Les socialistes ont, face à cette politique, le devoir de développer une conception de l'intérêt général qui donne la priorité à l’égalité et à la défense des intérêts des classes populaires. Il est possible de développer des combats unifiants, qui s’adressent à tous et rendent un sens au combat pour le progrès collectif de la société. Nous le croyons possible notamment autour du rétablissement de l’égalité républicaine des droits, de l’ouverture de nouveaux droits sociaux pour tous et de la refondation de services publics de l’égalité.

      Plus de démocratie conduit à réclamer généralement un rééquilibrage des pouvoirs au sein du couple exécutif, et ce au bénéfice du Parlement. C'est indispensable et totalement insuffisant. La démocratie sociale qui implique les partenaires sociaux et le patronat suscite à nouveau l'intérêt. Il faut maintenant donner les moyens concrets à cette démocratie sociale de s'exprimer. Au-delà, il faut penser les moyens d'impliquer directement les citoyens que ce soit par le biais de leurs structures associatives ou en les associant plus souvent aux grands choix.

      Une politique plus participative est aussi la condition d'une politique durable. Pour qu’une politique soit soutenable dans le temps, elle doit être co-produite avec les acteurs (citoyens, mouvement social et syndical) et intégrer le plus en amont possible les enjeux de sa mise en œuvre. Pour éviter les réactions épidermiques, dépasser les incompréhensions, permettre l'adoption de mesures a priori impopulaires, mais qui éviteront à terme des problèmes intensément supérieurs, les politiques doivent rechercher le consentement profond de l'opinion. C'est la condition pour que les compromis trouvés ne se construisent pas sur le sable d'une législature et soient remis en cause lors du mandat suivant. Le temps long en politique est aujourd'hui celui qui court entre deux échéances électorales. L'apparente contradiction entre la durée d'un mandat et une politique durable ne peut être levé que dans la recherche de pactes plus étroits avec l'opinion.

      Il n'y a pas de politique de transformation sociale sans consentement profond du peuple.

II - Construire une société de l’égalité et du développement durable et solidaire

    Ce cahier est par nature parcellaire et n’a pas vocation à prendre position sur tous les sujets. Il se donne simplement comme objectif de proposer des orientations fortes autour desquelles reconstruire l’identité et le projet des socialistes. L’égalité est l’étendard d’un combat collectif pour donner à chacun les moyens de son épanouissement et de son émancipation. Le développement durable et solidaire est le projet collectif qui peut rassembler, au-delà des frontières et des différences sociales tous ceux qui veulent que la politique et l’action collective prévalent face aux forces du libéralisme.


    1 - Le nouvel âge de l’égalité

      La vague libérale avait balayé la notion même d’égalité en partie discréditée par le communisme soviétique. Nous sommes depuis 20 ans en difficulté pour repenser cette valeur essentielle de l’identité socialiste. Aujourd’hui, sous la pression de la mondialisation libérale et de la compétition économique, le développement des inégalités est tel qu’il rend urgent de redécouvrir le sens que nous donnons au concept d’égalité. La gauche doit refonder son combat pour l’égalité et le rendre synonyme de nouvelles conquêtes afin de rétablir la possibilité d’une société offrant à chacun des droits et un avenir.

        a) Rétablir l’égalité républicaine

      L’égalité est d’abord l’égalité des droits entre les citoyens. Il est temps de constater lucidement à quel point ils sont bafoués. La France est à la fois une terre de métissage et un pays raciste et sexiste où domine la discrimination. L’accès à l’emploi et au logement est rendu très difficile aux jeunes français de couleur ‘issus de l’immigration ou non) et aux étrangers. A compétence égale la rémunération et la carrière des femmes restent inférieures à celles des hommes. Malgré la création du PACS, les droits des couples non mariés demeurent encore très limités. Ces exemples montrent à quel point le rétablissement de l’égalité républicaine est une bataille essentielle pour rétablir le sentiment d’appartenance à la communauté nationale.

      Pour le retour à l'égalité des droits
      entre les citoyens

       Créer une autorité indépendante des droits de la personne couvrant le champ de l’ensemble des discriminations
       Fixation dans les cahiers des charges des radios et télévisions publiques d’une obligation de valorisation de la diversité de la société française, de l’égalité entre les hommes et les femmes, et du refus de toutes les discriminations
       Lutter contre les discriminations raciales
       
       Une politique volontariste de nomination de français de couleur et issus de l’immigration dans la haute fonction publique
       réforme des procédures de naturalisation pour en faciliter l’accès et campagne sur le thème “ la France a besoin de vous ”
       droit de vote de tous les étrangers
       Égalité homme femme
       
       promotion des droits des femmes, du respect de l’ensemble des identités et sexualités, et de l’égalité des sexes dans le système éducatif
       créer une obligation de négocier en matière d’égalité professionnelle
       Poursuivre sur la voie de la reconnaissance des modes de vie
       
       révision du PACS dans le sens d’une égalité des droits notamment fiscaux, successoraux et relatifs au droit de séjour
       reconnaissance des différentes formes de parentalité et ouverture du droit à l’adoption aux homosexuels comme c’est le cas aujourd’hui dans tous les pays de l’Europe du Nord
       favoriser l’intégration et le respect de la personne transsexuelle, de son identité et de ses choix
       un siècle après la Loi de séparation de l’église et de l’État, réaffirmer solennellement les principes de la laïcité et assurer l’égalité entre les différents cultes en reconnaissant pleinement le fait musulman en France


      Cette discrimination à l’égard des personnes s’accompagne d’une ségrégation territoriale dont sont victimes les quartiers populaires et les zones rurales. Les politiques concernées ne sont pas à la hauteur des enjeux, et les discours du gouvernement actuels sont en total décalage avec la réalité des choix budgétaires.

      Pour le retour à l'égalité des droits
      entre les territoires

       Changement de nature de la politique de la ville qui s’est trop souvent limitée à contenir l’expression des violences sociales
       
       réintégration des quartier dans le tissu urbain en assurant la mobilité et l'accès aux services publics des habitants
       promotion de la politique de mixité sociale qui n'a de sens qu'accompagnée d'un ambitieux plan de relance du logement social
       véritable plan d'investissement pour les banlieues permettant notamment de mener à bien la restructuration des quartiers les plus dégradés ou présentant une trop forte concentration de logement social
       Une nouvelle politique de l’espace rural
       
       assurer dans les zones rurales une présence des services publics à proximité des usagers et donc sans appliquer des règles uniformes liées à la densité de population
       une réforme rapide et profonde de la PAC permettant de financer une politique de développement rural ouverte à tous les acteurs de l’espace rural
       décentralisation de la gestion des fonds structurels et développement de la possibilité pour les « pays » de contractualiser leurs projets, y compris directement avec l’Union Européenne


      L’ensemble de ces outils doit permettre de signifier le retour de l’égalité des droits et de la France pour tous. Ils constituent le préalable à tout réveil de la citoyenneté et de la participation démocratique.

        b) Des droits nouveaux, pour tous, face aux risques économiques et sociaux

      Si la gauche veut reconquérir l’électorat populaire, elle doit savoir rompre avec les approches catégorielles pour développer des revendications nouvelles qui s’adressent simultanément à l’ensemble des salariés. Elle doit rechercher les facteurs d’unification politique et sociale. Elle peut le faire en traduisant d’abord les inquiétudes face aux nouveaux risques économiques et sociaux et en portant les revendications nouvelles nées au cours de la dernière décennie. Le droit du travail est largement débordé par les transformations de l’emploi et de l’organisation des entreprises. La montée de la précarité et du temps partiel subi, le maintien d’un niveau élevé de chômage, le retour de la hausse des accidents du travail et des indicateurs de pénibilité montrent à quel point la pression à la performance économique se traduit par une insécurité généralisée qui touche d’abord les plus modestes et les moins qualifiés. Cette insécurité frappe des individus de plus en plus isolés dans leur rapport au travail. Le développement de la sous-traitance et des petites entreprises renvoie les salariés à une fragmentation des conditions de travail et à un face à face souvent difficile avec leur employeur qui rend plus difficile la prise de conscience de leurs intérêts et leur défense.
      Au-delà de la nécessaire bataille pour l’augmentation du pouvoir d’achat et des salaires, la gauche doit se donner comme objectif de garantir aux salariés des droits sociaux nouveaux pour faire face à ces nouveaux risques.

      Pour de nouveaux droits sociaux pour tous

       Une protection sociale du travail luttant contre la constitution d’un salariat précaire en consolidant les garanties collectives attachées au statut de salarié malgré les ruptures professionnelles (licenciement ou changement d’entreprise)
       Un droit à la formation professionnelle pour tous
       
       un droit nouveau à la formation, à la libre disposition de chaque individu et garanti par l’État, droit d’autant plus important que le salarié aura moins profité de la formation initiale et aura connu des périodes de chômage ou d’interruption de la vie professionnelle (à l’instar des congés maternités ou les congés parentaux)
       révision de la loi de 70 pour donner un accès prioritaire à la formation professionnelle aux moins qualifiés et rendre transférables les droits à la formation professionnelle lors des changements d’entreprise
       développement d’un service public de la formation continue fédérant l’ensemble des ressources du secteur public autour de l’éducation nationale et création d’un service public unifié de l’emploi et de la formation professionnelle géré par l’État et les partenaires sociaux (fusion ANPE,APEC, ASSEDIC-UNEDIC, AFPA,…) en lien avec le système éducatif
       Un objectif de plein emploi et de réduction des inégalités salariales
       
       une méthode politique : des lois cadre définissant des objectifs et renvoyant à la négociation entre les partenaires sociaux
       cinq objectifs :
        - relance de la réduction du temps de travail négocié
        - zéro chômeurs dans les plans sociaux
        - suppression des minima conventionnels inférieurs au SMIC et amélioration des carrières des bas salaires
        - refondation de la formation professionnelle
        - la reconnaissance des compétences acquises dans le cadre de la formation et de la validation des acquis professionnels
       le transfert des cotisations sociales sur la valeur créée et non sur les salaires et le conditionnement de toute déduction de charges sociales sur les salaires modestes à la conclusion d’accord de réduction du temps de travail
       Aider les travailleurs pauvres, que chaque heure de travail supplémentaire se traduise par un gain de revenu : un dispositif d’intéressement doit permettre à un allocataire de cumuler une partie de son allocation avec un revenu d’activité jusqu’à un SMIC à temps plein
       Une révision du droit du travail pour notamment :
       
       établir les rapports d’interdépendance et responsabilité entre les donneurs d’ordre et les sous-traitants
       prendre en compte la spécificité des activités de service dans l’évaluation du travail du salarié
       Assurer le respect du droit et la protection des personnes
       
       renforcement de l'inspection du travail et autonomie de la médecine du travail
       développement d'une expertise scientifique indépendante et révision des normes dans le domaine des risques sanitaires liés au travail
       Une véritable information des salariés sur leurs droits et notamment sur ses droits à la formation professionnelle et à la retraite (un guichet unique qui collecte toutes les données sur les droits à la retraite et qui les évalue au plan financier pour la totalité de la carrière)



        c) Le service public de l’égalité

      Les services publics sont d’autant plus légitimes qu’ils contribuent efficacement à la réduction des inégalités.
      Quand les Français perdent confiance dans l’État c’est d’abord du fait de l’écart constaté entre le discours et la réalité. Toutes les études montrent que le système fiscal, l’éducation nationale ou la sécurité sociale sont faiblement redistributifs. Les plus riches font des études plus longues, consomment plus de soins médicaux et savent utiliser les niches fiscales pour échapper à l’impôt. Cette situation n’est plus acceptable. Les services publics doivent redevenir des outils de solidarité et de promotion sociale pour ne pas perdre leur justification aux yeux de l’opinion. Dans le cas contraire qu’apporteraient-ils de plus que le privé ? Pour l’ensemble de ces raisons, le débat sur les services publics ne peut se limiter à la question de l’avenir des entreprises publiques. C’est en examinant le rôle de chaque entreprise publique, de chaque administration, et de chaque délégation de service public que nous pourrons refonder la notion de service public et la relégitimer aux yeux des citoyens en fonction de leur contribution à l’intérêt général et à la réduction des inégalités. Cette relégitimation est la condition de la défense de l’impôt qui les finance, et notamment de l’impôt sur le revenu.

      Au-delà des fonctions régaliennes de l’État, les services publics légitimes sont ceux qui concourent directement à la réduction des inégalités. Il s’agit en premier lieu de l’éducation, de la culture et de la santé qui sont essentiels à l’épanouissement de l’homme ; mais aussi des services qui permettent aux citoyens d’y avoir accès dans de bonnes conditions : le logement, les transports, la fourniture d’énergie et des moyens de télécommunication. Les revenus de transfert qui sont nécessaires pour permettre de consommer ces services font partie intégrante du service public. En effet, la question essentielle aujourd’hui est celle de l’accès aux services publics. Pour ne prendre que la question de l’éducation, les investissements les plus massifs dans le système éducatif restent inefficaces si les jeunes ne disposent pas d’une pièce autonome pour travailler, si les revenus de leur famille sont insuffisants pour faire face à la charge que représente la poursuite d’études...

      Notre conception de l’égalité est donc très éloignée de l’égalité des chances qui se contente de mettre tout le monde sur la même ligne de départ comme si cela pouvait suffire pour donner à chacun une chance égale dans la vie.
      Nous défendons l’idée d’une égalité continue des chances comme le formulait Michel Rocard ou plus celle d’une égalité des possibles selon la formule d’Eric Maurin. Il s’agit d’organiser une intervention continue et multiforme de la puissance publique pour assurer à chaque citoyen et à chaque moment de son existence la possibilité d’accès à une opportunité et des moyens nouveaux pour construire de manière autonome l’avenir qu’il s’est choisi. Que tout reste possible pour tous à tous moments, voilà une conception de l’égalité.

      Mais si les services publics doivent contribuer à l’égalité, encore faut-il qu’ils soient accessibles à tous et que chacun y contribue de manière juste. L’adaptation des services publics aux temps de vie des citoyens et notamment des femmes, à travers la démarche des bureaux des temps, ainsi que la réforme trop longtemps différée d’une fiscalité inégale et injuste, constituent des chantiers prioritaires.

      A titre d’exemple, nous déclinons cette orientation dans ce cahier dans le seul domaine de l’éducation qui est aujourd’hui la question clé du retour à l’égalité des possibles et du rétablissement des mécanismes de promotion sociale :

      Un nouveau projet éducatif

       Une nouvelle priorité donnée à l’éducation nationale
       
       réaffirmation de l’objectif de 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat et de 100 % de jeunes dotés d’une qualification
       réhabiliter la vocation du système éducatif à former l’esprit critique des futurs citoyens notamment en ce qui concerne le rapport à l’information et à l’image
       retour de la priorité budgétaire mise à mal par la droite et développement des emplois non enseignants (personnels techniques, documentalistes, conseillers d’orientation, infirmières et psychologues,…)
       renforcer considérablement les moyens accordés aux zones d’éducation prioritaires, création de ZEP en secteur rural
       La réussite d’un projet éducatif est aussi lié à son insertion dans son environnement
       
       accroître l’autonomie des établissement dans la définition et la mise en œuvre de leur projet, renforcer la démocratie scolaire en leur sein
       reconnaître une nouvelle communauté éducative dans et autour de l’école : enseignants, parents d’élève, élèves, collectivités locales, associations d’éducation populaire, travailleurs sociaux,… et développer les contrat éducatifs locaux et faire du temps péri-scolaire un cadre d’épanouissement des jeunes et d’identification des talents, accroître l’offre publique d’activités de loisirs hors temps scolaire
       associer les milieux professionnels pour faciliter l’insertion professionnelle et la complémentarité entre les différents volets de l’offre de formation (formation initiale en alternance ou non, formation continue et professionnelle,…)
       Après la massification réussir la démocratisation du système éducatif
       
       donner une véritable priorité au suivi individualisé des élèves, au tutorat et à la pédagogie différenciée par groupes de niveau, du collège au premier cycle universitaire
       concilier collège unique et diversité des parcours de formation
        - un débat national sur la définition des savoirs communs qui doivent être acquis au collège
        - promotion des cultures techniques et professionnelles auprès de l’ensemble des élèves
        - diversification et augmentation du volume des options
       réussir la démocratisation de l’Université
        - définition entre chaque étudiant et son université d’un contrat de formation indiquant le projet professionnel et les moyens correspondants (rattrapages éventuels, soutien individualisé, appui à l’orientation et à la recherche de stages, parcours de formation, rendez-vous d’évaluation,…)
        - diversification de l’offre universitaire de Bac+1 à Bac+3 dans le sens du développement des formations pluridisciplinaires et à orientation professionnelle
        - rendre obligatoire au sein des études une période de mobilité à l’étranger, notamment au sein de l’Union Européenne
        - statut unique des enseignants et des chercheurs permettant à chacun de donner une priorité à un moment donné à l’enseignement ou à la recherche et d’être reconnu et rémunéré en fonction de ces choix
       développement d’un véritable système de formation continue des enseignants et de mutualisation des pratiques pédagogiques
       le choix politique de l’autonomie des jeunes adultes
       
       allocation individualisée d’autonomie versée en fonction des revenus et aides en nature dont disposent les jeunes adultes et contrepartie de l’abandon de la demie-part fiscale pour les parents
       un dossier unique pour l’ensemble des demandes d’aide (logement, transports, santé) et un travail en réseau de tous les intervenants
       Permettre plus facilement aux jeunes de s’extraire de leur environnement familial : développement des internats et du logement social étudiant
       pass santé pour les jeunes scolarisés ou non (prise en charge à 100 % de visites chez des spécialistes, fourniture gratuite de services contribuant aux politiques de prévention alcootest préservatifs gels intimes
       programme global d’éducation à la sexualité et à l’identité des genres, à l’égalité entre les hommes et les femmes et à l’égalité entre les identités sexuelles




    2 - Un développement durable et solidaire

      La notion de développement durable, aujourd’hui confondue par le gouvernement à l’accompagnement des catastrophes naturelles, est contradictoire avec le libéralisme économique et s’appuie sur une autre conception de la richesse et des rapports sociaux fondés sur l’autonomie et la solidarité.

      Défendre un modèle de développement durable c’est lutter contre la marchandisation du monde, contre l’extension continue du champ d’intervention d’une économie libérale toujours plus consommatrice de biens intermédiaires, de ressources naturelles, d’énergie. Ce règne de l’intermédiation, de l’échange et de la valeur marchande rend difficile pour l’individu de comprendre toutes les conséquences de ses actes. Le développement durable n’est pas qu’une question de futur global, il passe par le constat simple de la dégradation des conditions de vie et de travail des plus défavorisés dans nos pays et de l’inégalité croissante de développement entre le Nord et le Sud, qui affecte des besoins essentiels comme l’accès à la nourriture, à l’eau ou à l’énergie.

      Penser le développement durable, c’est d’abord penser les relations de coopération et de solidarité non marchandes contre la dictature de l’économisme et de l’innovation technique. Le développement durable et solidaire passe par une maîtrise collective des choix scientifiques et techniques et par une nouvelle approche de la richesse et de l’économie.

        a) Pour une maîtrise collective des choix scientifiques et techniques

      Tous les choix de mode de production et d’aménagement du territoire sont des choix techniques qui pèsent lourdement sur notre modèle de développement. Qu’il s’agisse de transports, d’agriculture ou d’énergie nous n’avons pas su aller au bout de nos discours et trancher contre les lobbies conservateurs.

      Plus largement, nous devons cesser de laisser les savoirs techniques trancher arbitrairement des choix collectifs essentiels. Une démocratie des choix scientifique et technique reste à inventer. Elle doit reposer sur le recours au principe de précaution mais aussi l’égalité entre les acteurs dans la controverse, l’accès à l’information et à l’expertise indépendante, et le débat public.

      Loin de s’opposer nécessairement à toute innovation scientifique ou tout grand projet d’aménagement, il s’agit d’éclairer les décisions en ouvrant le débat à tous les acteurs et à tous les intérêts. Nous proposons simplement de réintégrer les enjeux scientifiques et techniques dans le jeu normal de la démocratie et de rendre aux choix politiques et éthiques toutes leur place face aux savoirs techniciens.

       Réunir les conditions d’une véritable démocratie scientifique et technique
       
       l’élargissement du champ d’intervention du principe de précaution au-delà de l’environnement et la définition des procédures permettant sa prise en compte dans les décisions
       création d’une commission nationale des risques permettant aux citoyens de mettre en cause les acteurs publics et privés développant des activités à risque et éventuellement de les contraindre à procéder à leurs frais à l’évaluation de ces risques
       révision de la Loi sur le débat public afin de renforcer son caractère pluraliste et contradictoire et de développer le recours aux conférences de citoyens
       création d’une agence du débat public, indépendante du gouvernement et contrôlée par le Parlement chargée d’organiser les débats publics, de contribuer à l’information et à la formation des citoyens, et de gérer un fonds de soutien à l’expertise indépendante permettant de notamment de financer les nouvelle fondations
       rééquilibrage de la recherche publique vers l’identification et l’évaluation des risques liés aux innovation scientifiques et techniques
       protection des salariés des entreprises privées qui dénoncent des pratiques à risques
       De véritables priorités environnementales
       
       un plan de maîtrise de l’énergie et de développement des énergies renouvelables
       un débat public et une conférence de citoyens sur la gestion des déchets radioactifs
       une réelle priorité au rail et aux circulations douces sur la route et l’avion
       une réforme rapide de la politique agricole commune au service du développement durable et de rétablissement en France des contrats territoriaux d’exploitation
       Le refus de la marchandisation du vivant
       
       maintien du moratoire sur les OGM en l’absence de tout bénéfice établit pour l’environnement et les consommateurs
       interdiction du brevetage du vivant, patrimoine commun de l’humanité
       prohibition du clonage reproductif, moratoire sur le clonage thérapeutique, tant que n’ont pas été épuisées les possibilités liées à la recherche génétique sur les animaux, les cellules souches adultes et les embryons surnuméraires
       Mettre la révolution internet au service d’un développement solidaire
       
       le refus de la marchandisation absolue d’internet
        - développement des logiciels libres
        - création d’un service public de formation et enseignement par internet permettant de valoriser les ressources des établissements publics et d’éviter leur exploitation par le privé
        - encadrement de la propriété intellectuelle liée à internet visant à maintenir un maximum de données en accès libre
       internet pour tous et partout
        - un ordinateur connecté dans chaque bureau de poste permettant à chacun de consulter ses mails au tarif des communications locales
        - soutien aux projets associatifs d’équipement internet de proximité
        - plan national de développement de l’ADSL dans tous les territoires
       une rénégociation des accords tarifaires internationaux permettant aux pays en développement d’accéder plus facilement au net


        b) Une autre approche de la richesse et de l’économie

      L’enjeu central du développement durable est de combattre la conception de la richesse qui amène à comptabiliser dans la croissance du PIB les servies correspondant au traitement de la pollution de l’Erika ou du Prestige. Comme si la richesse était uniquement marchande. D’autres indicateurs de bien-être ou de qualité de l’environnement doivent être pris en compte pour mesurer notre niveau de développement. Mais tout ne peut, ni ne doit être mesuré. Ce qui fait le cœur de notre société, le lien social, les solidarités, la créativité humaine, doit être revalorisé et placé en-dehors du champ de la marchandisation. Cela doit amener à reconnaître la diversité des temps sociaux, préalable à une véritable égalité entre les femmes et les hommes dans chacun de ces temps spécifiques (travail, loisirs, tâches domestique,…).

      Notre projet politique, depuis l’origine, est celui de l’épanouissement de tous. C’est pourquoi ce qui rend possible l’autonomie des humains : la santé, la culture, l’éducation… doit être protégé de la marchandisation et constitue un champ d’intervention privilégié pour l’économie sociale et solidaire.

      Si les socialistes acceptent l’économie de marché, ils ne sauraient réduire toute l’économie au marché. Il faut à côté de l'économie capitaliste de marché, édifier une économie plurielle, en structurant d’autres logiques économiques : celles des biens publics, de l’économie sociale et solidaire, de l’économie domestique et d’une économie de distribution inconditionnelle de revenus suffisants pour tous.

      Pour une économie plurielle

       Une nouvelle définition européenne de l’économie sociale et solidaire justifiant un statut économique spécifique et une exception aux règles fiscales et de libre concurrence, permettant le développement d’initiatives locales dans le domaine des services aux personnes (santé, sport, culture, loisirs,…) visant à empêcher la mainmise sur ces activités émergentes des grands groupes privés, et reconnaissant les réseaux d’échange non monétaires, les finances solidaires et le commerce équitable
       Quelques pistes pour développer l'économie sociale et solidaire
       
       orientation de l’épargne vers l’économie sociale et solidaire
       révision du statut fiscal des SCIC aujourd’hui soumises au droit commun (sociétés coopératives d’intérêt collectif qui permettent à des acteurs locaux de se regrouper pour produire des services)
       création d’une Agence pour la Création d’Activités Innovantes ayant comme priorité l’innovation (technique ou sur la nature de l’activité développée) et l’économie sociale et solidaire
       développement de contrats du temps libre locaux fédérant les acteurs publics, associatifs et privés (essentiellement culturels)
       renforcement des ressources des comités d’entreprises leur permettant d’accentuer leur soutien à l’accès à la culture, aux sports et aux loisirs, création d’un chèque sport et culture sur le modèle des chèque vacances et chèque déjeuner
       Une reconnaissance des richesses non marchandes
       
       une prise en compte dans le calcul de la richesse national des destructions et créations de valeur propres à chaque activité
       développement d'une diversité d'indicateurs sur la situation de l'économie et l'état de la société


III- Approfondir le pacte démocratique

    La démocratie ne se limite ni à une source de la légitimité politique, ni à la forme des institutions qui permettent d’agir. La démocratie, c’est la politique en train de se faire. Les socialistes doivent rompre avec une conception par trop institutionnelle de la démocratie pour l’aborder comme une mise en mouvement de la société dans le cadre d’une stratégie de transformation sociale. La transformation des pratiques passe avant la transformation des institutions. Face aux marché et aux forces conservatrices, la dynamique démocratique est la force des citoyens pour peser sur le cours des choses.
    Pour fonder une démocratie vivante à tous les niveaux de gouvernement, du global au local, il nous semble que les mêmes principes doivent être mis en œuvre :

       Une démocratie plurielle : qui reconnaisse la diversité et le rôle légitime des différents acteurs qu’ils soient élus, gouvernants, citoyens, association, syndicats, groupes d’intérêt,…

       La délibération collective plutôt que le pouvoir personnel

       Une démocratie participative qui passe par l’existence d’un espace politique réellement ouvert aux citoyens leur permettant de contribuer à la prise de décision, à la relégitimation permanente de l’action publique

       L’exemplarité des pratiques politiques

       Le suffrage universel et l’égalité d’accès aux fonctions électives

       Le travail en équipe et la diffusion des responsabilités dont la clé est le non cumul

       L’existence d’organismes indépendants d’information et à l’expertise notamment mises au service de l’anticipation et de la préparation de l’avenir.

    Si la démocratie est le moyen pour les hommes de choisir leur avenir, force est de constater que notre démocratie est bien incomplète. En effet, c’est désormais au niveau international et communautaire que se décide une large part de notre avenir alors qu’à ces niveaux de gouvernement l’existence d’outils au service de l’action collective, d’un espace politique pour mener le débat sur leur utilisation et d’institutions pour décider reste problématique. La principale priorité est donc bien là : faire en sorte que demain le débat politique européen et mondial prenne tout son sens parce qu’il sera possible de trancher entre plusieurs orientations et de disposer des moyens permettant les mettre en œuvre.

    A contrario la France est forte d’institutions et de politiques publiques anciennes, mais qui sont aujourd’hui à bout de souffle et menacées de démantèlement sous la pression de la droite et des forces libérales. La gauche doit se donner comme objectif de rénover en profondeur les institutions et les pratiques pour faire en sorte que démocratie politique et démocratie sociale mobilisent les énergies citoyennes au service de la transformation de notre société.


    1 - Construire une autre mondialisation

      Nous sommes des internationalistes. Ce n’est pas la mondialisation en soi que nous rejetons, mais la forme qu’elle prend aujourd’hui. Nous sommes, nous aussi, des défenseurs de l’altermondialisation, au sens où nous voulons inventer d’autres modes de vivre ensemble sur une planète commune. Notre conception de la mondialisation est fondée sur nos valeurs de justice et de progrès. Nous voulons la diffusion la plus large possible des idées, des connaissances, des technologies ; nous prônons le mélange des cultures contre tous les replis identitaires ; nous pensons que la démocratie, c’est-à-dire le libre choix de son gouvernement et la liberté de s’opposer, et les droits de l’homme et de la femme, ont valeur universelle. Notre objectif est le développement durable, c’est-à-dire une croissance soutenue, créatrice d’emplois et respectueuse de l’environnement.

      La volonté des socialistes de construire une autre mondialisation se heurte à la nature des institutions internationales qui ne permettent pas de développer les politiques nécessaires. Le combat pour une autre mondialisation serait vain et strictement protestataire s’il ne se concentrait pas sur la constitution d’un espace politique et démocratique mondial.

       Faire de l’ONU le cœur d’une politique mondiale
       
       réformer le conseil de sécurité pour en faire une instance représentative de la population mondiale dotée des moyens de faire respecter ses décisions
       création d’un collège éthique, politique et scientifique composé de personnalités de premier plan ayant une fonction de réflexion, veille et alerte
       création d’un conseil de sécurité économique et social supervisant les institution internationales et onusiennes dans ce domaine
       intégration de l’OMC dans le cadre des institutions onusiennes
       Une action internationale pour un développement durable et solidaire
       
       création d’une organisation mondiale de développement social regroupant les pouvoirs du FMI, la banque mondiale, l’OMS, la FAO et l’OIT, et gérant le produit d’un impôt mondial inspiré de la Taxe Tobin (première urgence : la lutte contre le SIDA et la malnutrition)
       définition d’un ensemble de biens collectifs et de services publics mondiaux non privatisables
       priorité donnée aux droits des femmes et à l’égalité entre les hommes et les femmes
       réforme radicale de l’OMC afin de subordonner les règles du commerce international aux normes et conventions internationales en matière de santé, de droit du travail, d’environnement,…
       maintien d’actions différenciées adaptée à l’objectif de réduction des inégalités de développement : annulation de la dette, accords commerciaux sur les matières premières protégeant les producteurs, souveraineté alimentaire



    2 - Passer du grand marché à l'Europe fédérale

      L’Europe n’est pas un territoire, c’est un projet. La faiblesse actuelle de l’Union vient de l’épuisement de son projet initial (la paix et la réalisation du marché unique), et de l’absence de volonté politique des dirigeants des états membres. La clé de l’avenir de la construction européenne n’est donc pas dans une conception a priori de son élargissement présent ou futur, mais dans le projet collectif et l’espace politique qui naîtra des travaux de la convention et de la constitution sur laquelle les peuples devront se prononcer. Aux socialistes de prendre aujourd’hui à bras le corps le débat sur l’élaboration de la constitution et de faire en sorte que la nature du projet des structures politiques de l’Europe rende possible la bataille pour un socialisme européen. D’ores et déjà, l’Europe est par son modèle social et nombre de ses politiques, une alternative à la mondialisation libérale. C’est en développant ses politiques publiques et sa démocratie que l’on pourra accentuer cette orientation et la portée sur la scène internationale.

       Définir dans la future constitution de nouveaux objectifs pour l’Union Européenne : la paix et la coopération internationale, la démocratie, le développement durable et solidaire, la réduction des inégalités sociales et territoriales, faire de la charte des droits fondamentaux son préambule
       Donner à l'Union Européenne une mission d'orientation du développement économique au service de l'emploi :
       
       rendre la Banque centrale européenne responsable devant le Parlement Européen à qui serait confié la désignation de son Président, le contrôle de son activité, et la possibilité de modifier ses statuts à la majorité qualifiée, la constitution européenne doit donner à la BCE un objectif complémentaire de plein emploi
       remplacer le pacte de stabilité par un pacte d'orientation économique : chaque année le Conseil européen fixerait, sur proposition de la Commission et après avis du Parlement, les maxima de déficit public par pays en tenant compte de la conjoncture économique et des programmes d’investissement public
       donner à l’Europe les moyens de mener de nouvelles politiques en acceptant d’augmenter ses ressources
       Donner naissance à un espace politique européen :
       
       créer un droit d’interpellation permettant aux citoyens d’inscrire un sujet à l’ordre du jour du Parlement européen, de la Commission ou du Conseil selon la nature des sujets
       un mode de scrutin identique dans tous les pays de l’Union pour les élections européennes, 1ère étape vers un scrutin européen
       un referendum le même jour dans toute l’union européenne sur le futur projet de constitution
       Des institutions fédérales originales pour l'Europe
       
       pour toutes les politiques pour lesquelles les compétences ont été transférées à l’Union et confirmées dans la constitution
        - la Commission, issue de la majorité du Parlement comme gouvernement européen, responsable devant le Parlement et le Conseil lequel jouant un rôle de deuxième chambre représentant les états et décidant à la majorité
        - cela passe par la suppression des instances discrètes dans lesquelles les hauts fonctionnaires des états membres contrôlent et encadrent les actes de gestion de la Commission (comitologie), et l’extension des pouvoirs de co-décision du Parlement à la PAC
        - L’Europe doit se doter d’une représentation unique dans toutes les instances commerciales à vocation économique, sociale et environnementale
        - les politiques d’asile, de justice et de sécurité intérieure doivent devenir des politiques communes afin notamment de donner la priorité à la lutte contre la délinquance financière et le développement des mafias
       Pour toutes les autres politiques pour lesquelles la règle reste celle de la coopération intergouvernementale, maintien de la prédominance du Conseil



    3 - Refonder la démocratie en France

      Ce dont la France a besoin est moins une révolution institutionnelle qui ne ferait que transférer un déséquilibre chronique du Président au Parlement que des pouvoirs enfin équilibrés par des contre-pouvoirs effectifs.

       Un nouvel équilibre des institutions de la République
       
       un Sénat démocratisé, élu à la proportionnelle dans le cadre des régions, strictement paritaire
       un Parlement restauré dans sa fonction de production de la Loi, et de contrôle du gouvernement et des négociations communautaires, avec vraies prérogatives reconnues à l'opposition
       une justice enfin indépendante et un statut pénal clair du chef de l'Etat.
       une Cour constitutionnelle émanant du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation investie par le Parlement, et non plus constituée d'amis ou d'obligés, directement accessible aux citoyens.
       un pouvoir gouvernemental, avec un Premier ministre puisant sa légitimité dans la majorité parlementaire qui l’a investi de sa confiance, disposant de prérogatives autonomes, comme le droit de dissolution ou la fonction de représenter, seul, la France aux Conseil européens. Des ministres politiques constituant le cabinet, collectivement responsables, et des ministres techniques, individuellement responsables devant le Parlement.
       De nouvelles pratiques politiques
       
       de nouvelles procédures de participation du citoyen comme l’introduction d’un droit d’interpellation permettant aux citoyens d’inscrire un sujet à l’ordre du jour du Parlement ou, l’association des citoyens aux délibérations publiques avec des conférences citoyennes
       La reprise des réformes interrompues par la droite en matière de parité, de lutte contre le cumul des mandats, pour apporter à travers le statut de l'élu, une nouvelle respiration de la démocratie en améliorant la représentativité du Parlement pour l'élargir aux couleurs de la France et aux professions des français
       Mener une décentralisation solidaire et citoyenne
       
       clarification des compétences des différentes collectivités locales
       garantie apportée dans le domaine des ressources des collectivités locales notamment à travers le renforcement des mécanismes de péréquation
       renforcement des droits de l'opposition dans les collectivités et création d'un droit d'interpellation par les citoyens
       renouvellement en une seule fois tous les six ans des assemblées départementales et changement du mode de scrutin
       élection au suffrage universel des structures intercommunales
       l'introduction d'un budget participatif géré par les comités consultatifs de quartier



    4 - Une charte de la transformation sociale pour assurer la complémentarité entre la gauche et le mouvement social

      L’invention d’une nouvelle stratégie de transformation sociale articulant action politique et intervention du mouvement social est une condition nécessaire de la réussite de la gauche. Aujourd’hui, la confusion et la méfiance règnent après des années de pouvoir dominées par les rendez-vous manqués. Il est temps pour la gauche politique et pour les socialistes de prendre acte du caractère pluraliste de notre démocratie et de reconnaître pleinement la spécificité du fait syndical ainsi que des engagements citoyens et associatifs. Le mouvement social n'est ni une force d’appoint, ni un vivier, ni une caution. Il est pour la gauche politique un partenaire dans un dialogue respectueux des différences et un acteur à part entière du changement social. Le retour à une relation contractuelle qui respecte les champs de compétence et les identités doit permettre de rendre toute sa vitalité au mouvement associatif et syndical, et de rechercher pour la gauche un meilleur rapport de force dans la confrontation politique et sociale face aux forces libérales. L’épuisement de la volonté de réforme et les échecs dans la conduite des changements trouvent souvent leur source dans l’isolement de la gauche de gouvernement et son repli progressif sur l’appareil d’État.

      Il revient donc aux socialistes d’élaborer une charte de la transformation sociale qui définisse leur rapport au mouvement social et la méthode de gouvernement qu’ils souhaitent employer pour réussir le changement. Il leur revient de dire comment demain au pouvoir, mais dès aujourd’hui dans les collectivités locales, ils entendent être exemplaires dans leurs relations avec le mouvement social. Un siècle après la charte d’Amiens qui voyait le mouvement syndical français clarifier ses rapports avec le monde politique, c’est donc au tour de la gauche politique de clarifier son rapport au mouvement associatif et syndical. Le congrès de Dijon doit être l’occasion de lancer une procédure d’élaboration collective d’une telle charte. Simultanément, les socialistes doivent présenter un programme de réforme visant à assurer la reconnaissance du mouvement social et favoriser son intervention dans la production des décisions publiques. De la réussite de ce chantier dépend l’identité réformiste de la gauche française et la rupture avec les illusions de la radicalité.

      Pour une démocratie sociale

       Renforcer les syndicats
       
       ne rendre valide les accords que lorsqu’il sont signé par des organisations syndicales représentant la majorité des salariés, organiser à cette fin des scrutins de représentativité par branche
       reconnaître au syndicalisme des domaine où il intervient comme co-producteur de normes et de droits à travers la négociation contractuelle
       renforcer les pouvoirs des comités d’entreprise plutôt que de généraliser une représentation très minoritaire des salariés dans les conseils d’administration des entreprises
       faciliter l’adhésion aux syndicats à travers le développement du chèque syndical (dispositif conventionnel prévoyant une cotisation prélevée obligatoirement pour chaque salarié et allant au syndicat de son choix) et en remplaçant la déduction fiscale liée aux cotisations syndicales ou aux dons aux associations par un crédit d’impôt bénéficiant aussi aux ménages non imposables.
       Associations
       
       un nouveau statut d’utilité économique et sociale fondé sur le respect de critères précis et délivré par une instance indépendante en lieu et place des labels d’utilité publique ou d’intérêt général accordés de manière discrétionnaire par les Préfets et l’administration fiscale
       création d’un statut du volontariat et de l’élu associatif
       reconnaissance de fondations d’expertise indépendantes de la fondation de France, et chargées de produire de l’information pour alimenter le débat public
       Une nouvelle méthode législative
       
       rendre obligatoire la publication d’études d’impact permettant d’évaluer les effets attendus de la future Loi
       réformer la composition du Conseil économique et social pour l’adapter à la réalité sociale d’aujourd’hui et rendre obligatoire l’avis préalable du Conseil Economique et Social sur les projets de Loi
       développer la pratique des Lois-cadre, renvoyant les modalités d’application à la négociation entre les partenaires sociaux
       instituer des comités de suivi des textes adoptés associant les parlementaires, les partenaires sociaux et les associations
       Refonder les cadres de gestion de la protection sociale et de la formation professionnelle
       
       définir un nouvel accord tripartite Etat-Syndicats-Patronat rétablissant un cadre unifié de gestion quels que soient les modes de financement et précisant les responsabilités respectives des différents acteurs
       après refondation élection le même jour des représentants des salariés dans les différents instances paritaires, y compris relance des élections à la sécurité sociale.





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