Rapport
de la commission des résolutions

 
 Par Vincent Peillon
 le dimanche 26 novembre 2000 (Congrès de Grenoble).
 

Mes chers amis, mes chers camarades, la commission des résolutions de notre congrès s'est réunie hier soir. Elle s'est déroulée dans le même esprit de sérieux et de fraternité qui a, je crois, vous en êtes tous les témoins autant que les acteurs, présidé aux débats ouverts entre nous depuis maintenant trois mois, d'abord dans la phase préparatoire des contributions, des contributions nombreuses, diverses, autant par leurs auteurs que par leurs thèmes ou leur ton. Puis le débat s'est poursuivi autour des trois motions d'orientations politiques présentées à notre vote, au vote des militantes et militants de notre Parti.

La commission des résolutions avait une double tâche, la première tâche : essayer de rechercher autour de la motion 1, motion majoritaire puisque approuvée par 76 % des militants, une synthèse, une synthèse à partir des propositions de nos camarades de la motion 2 et de la motion 3.

Comme vous le savez, nous souhaitions cette synthèse, nous la souhaitions, non de façade, mais sur le fond. Et puis, la commission des résolutions avait une seconde tâche dont on parle moins souvent, qui était aussi d'adopter les amendements votés dans les fédérations. Et ils ont été nombreux. Plus de 200 amendements ont été présentés, votés par les congrès fédéraux à la commission des résolutions, et je remercie d'ailleurs tous ceux, y compris les permanents qui sont restés cette nuit jusqu'à plus de 3 heures du matin pour étudier ces amendements et voir lesquels pourraient être adoptés.

Je vais avant de venir sur le premier sujet, vous dire quels sont les amendements qui ont été adoptés, je vais le faire, bien entendu, de façon un peu cursive et rapide. Ce n'est jamais un exercice très facile, mais il faut le faire parce qu'il est très important que la motion présentée au débat puisse évoluer par les propositions des militants avant son adoption finale.

Nous avons adopté une série d'amendements en provenance du Val-d'Oise, du Jura, de la Loire-Atlantique, qui concernaient les personnes handicapées, amendements de forme pour certains qui avaient des expressions plus respectueuses que celles de la motion telle que nous les avions données, et des amendements de fond, faisant des propositions sur le droit à l'intégration, et la meilleure reconnaissance des personnes handicapées, y compris au sein des fonctions publiques.

Le texte a été de ce point de vue fortement enrichi.

Nous avons adopté des amendements qui concernent l'environnement et la qualité de la vie.
Un amendement des Côtes d'Armor sur la nécessité de consacrer davantage de moyens à la recherche concernant les énergies renouvelables.
Un amendement de la Sarthe, concernant la nécessité de développer davantage l'usage du vélo par l'aménagement des pistes cyclables.
Un amendement important de la Loire-Atlantique qui propose la lutte contre les pavillons de complaisance et on comprend bien pourquoi, et le renforcement par des propositions précises - je ne pourrai pas vous les lire chaque fois - de la sécurité de la navigation.

Nous avons, concernant les questions de société, un amendement assez long et assez riche de la fédération de l'Orne qui enrichit notre texte concernant le droit des consommateurs.

Nous avons aussi un amendement très long des Côtes d'Armor qui rerédige entièrement notre Parti sur la coopération internationale et fixe des objectifs plus ambitieux que ceux que nous avions fixés initialement.
Un certain nombre de fédérations, je pense au Val-d'Oise, à la Vendée, à la Manche, au Morbihan, aux Hauts-de-Seine, l'ont adopté mais il y en avait d'autres.

Un amendement concernant la parité - j'ai pu vérifier hier que c'était un sujet qui nous préoccupait tous - l'amendement a la forme suivante, il est très court, je peux vous le lire, il est aussi important " la progression vers la parité pour les législatives doit être graduelle, celle-ci devant être atteinte en 2007 ".

Nous avons aussi un amendement de la Fédération du Nord, d'autres Fédérations avaient insisté sur cet aspect, sur la nécessité de renforcer le contrôle et l'application du droit du travail au sein des entreprises, en renforçant de manière conséquente les moyens de l'inspection du travail.

Nous avons un amendement de la fédération de la Corrèze, et je pense que notre ami René Teulade n'y est pas pour rien, qui souhaite que l'on prenne davantage en compte la situation de ceux qui cessent leur activité professionnelle, mais qui pour autant, veulent demeurer dans la vie active.
C'est un problème important qui concerne de plus en plus de nos concitoyens et il y avait là des propositions précises qui pouvaient enrichir utilement notre motion.

J'en viens maintenant à la deuxième question, celle de la synthèse politique.

Comme vous le savez le souhait qui était le nôtre, c'était d'arriver à une synthèse et , bien entendu, à une synthèse fondée sur, non pas ce que certains dénoncent comme l'unanimisme de façade, mais une synthèse fondée sur des idées et un projet que nous pourrions assumer tous ensemble sans rompre la cohérence de la motion majoritaire.

C'est dans cet esprit, vous le savez, que nous avions abordé les débats, refusant toute idée soit de synthèse a priori défendue par certains dans les débats, soit de non synthèse a priori défendue par d'autres, mais avec une volonté réelle d'avancer sur les propositions présentes au sein des deux motions, propositions qui, pour certains, incontestablement, pouvaient recevoir notre agrément et enrichir notre texte commun.

Cette synthèse n'a pas été possible.

Cette synthèse n'a été possible ni avec la Gauche Socialiste, ni avec la motion d'Henri Emmanuelli et d'Alain Vidalies.

Les deux points sur lesquels nous n'avons pas pu faire synthèse sont d'abord la question des salaires et ensuite, la question de l'UNEDIC.

Je crois que sur la question des salaires, beaucoup de choses ont été dites hier. Je crois que ce serait se faire un mauvais procès entre nous et revenir à une époque que nous ne souhaitons pas, si nous nous mettions en situation d'avoir à choisir entre la feuille de paye et l'emploi, entre une priorité à la création d'emplois et une priorité à l'augmentation du pouvoir d'achat.

L'action que nous menons depuis trois ans (il a été rappelé hier que cela n'avait rien d'évident) est une action qui a permis en même temps la réduction du temps de travail sans réduction de salaire, et Henri Emmanuelli a raison de rappeler souvent que même entre nous, cela avait fait débat.

Cette réduction du temps de travail sans réduction de salaire s'est accompagnée d'un soutien à la consommation et d'une augmentation du pouvoir d'achat qui entretient la croissance. Elle s'est accompagnée aussi de créations d'emplois , plus de 1,5 millions dont au moins plus de 200 000, près de 300 000, peuvent être attribués directement à la Réduction du Temps de Travail.

Nous avons donc bien mis en œuvre depuis trois ans une synthèse qui permet, à la fois, de poursuivre notre engagement et notre priorité vers l'emploi, rompant ainsi avec le fatalisme qui avait jusque-là dominé, et en même temps d'assurer une augmentation du pouvoir d'achat.

Ajoutons même que les revendications salariales qui s'expriment aujourd'hui et qui se tournent directement vers les entreprises sont précisément le résultat de la lutte contre le chômage puisque quand le chômage baisse, la pression salariale baisse aussi sur les salariés et c'est bien ce mouvement vertueux où le soutien à la consommation, la croissance durable, la création d'emplois et le pouvoir d'achat peuvent progresser ensemble que nous voulons poursuivre.

C'est pourquoi nous étions déterminés à enrichir la motion 1 d'un certain nombre de propositions sur les revenus et de l'enrichir dans le même état d'esprit qui nous a permis, vous le savez, d'avoir un accord il y a quelques semaines avec la Gauche Plurielle sur ces mêmes questions.

Nous avons donc proposé, d'une part, qu'il y ait dès le premier semestre une augmentation du SMIC, qu'il y ait ensuite un programme pluriannuel, un plan pluriannuel de revalorisation des traitements dans la fonction publique. Nous avons proposé un plan de revalorisation des petites retraites, nous avons proposé une augmentation des minima sociaux dès le mois de décembre, puis dans la durée, afin qu'ils rejoignent le plus rapidement possible le seuil de pauvreté.

Tous ces éléments n'étaient pas présents dans le texte initial de la motion 1, tous ces éléments étaient présents dans le texte de la Gauche Plurielle. Nos alliés Verts, nos alliés Communistes, nos alliés Radicaux ont considéré que c'était des avancées substantielles. Malheureusement, hier soir, nous n'avons pas pu trouver sur ces propositions l'accord avec nos camarades de la Gauche Socialiste qui, sur cette question, ont rompu le dialogue dans la Commission des Résolutions.

Le point de difficulté portait sur la conférence sur les salaires et sur les revenus que nous proposons. La Gauche Socialiste, Henri Emmanuelli aussi, souhaitait que nous fixions une date butoir pour la tenue de cette conférence tripartite Etat, patronat, syndicats. Nous n'avons pas souhaité qu'il y ait une date parce que c'était prendre un engagement que peut-être, nous ne pourrions pas tenir dans la mesure même où, vous l'entendez quand on parle de conférence tripartite, cela ne peut pas être un diktat (seulement si nous voulons être efficaces) de la puissance publique, du pouvoir politique.

C'est sur cette question d'une date, le 30 juin 2001, ainsi que sur la question des salaires que la Gauche Socialiste a souhaité ne pas poursuivre la discussion et ne pas rechercher la synthèse. Sur cette question et au moment de notre travail qui était déjà bien entamé, Henri Emmanuelli et Alain Vidalies avaient eux-mêmes réservé leur position.

Dans sa sagesse, puisque nous avancions déjà dans la nuit, le Premier secrétaire, François Hollande, dans le même esprit qui avait été le nôtre jusque-là, a souhaité que nous abordions la question de l'UNEDIC.

Comme vous le savez, nous considérons en effet que le combat des socialistes est inséparable de l'approfondissement de la démocratie politique et de la démocratie sociale. Comme vous le savez, nous considérons que les règles de représentativité syndicale dans la négociation sociale qui datent maintenant d'un demi siècle, ne sont plus adaptées. Comme vous le savez, nous avons ensemble adopté dans la Convention Entreprise, à un moment où beaucoup de syndicats, d'ailleurs, ont depuis évolué sur cette question, le principe de l'accord majoritaire. Comme vous le savez, dans la seconde loi sur les 35 heures, nous avons adopté et mis en œuvre ce principe du vote majoritaire.

Il est évident en même temps que la démarche dite de refondation sociale du MEDEF ne peut aucunement nous agréer. Mais nous avons eu là une divergence profonde avec Henri Emmanuelli, divergence que nous n'attendions pas puisque Henri Emmanuelli a souhaité que nous ne nous en tenions pas à cela (et même à l'annonce d'une loi rapidement pour modifier les règles de la représentativité) et que le Parti prenne position pour refuser l'agrément de la convention UNEDIC actuelle.

Nous étions là dans un préalable à la synthèse qui, vous le comprenez bien, posait à la fois un problème de fond et un problème politique.

Problème de fond, je vous rappelle qu'au mois de juin et au mois de septembre, le Gouvernement a refusé l'agrément de la Convention signée effectivement par un syndicat minoritaire et le MEDEF.

A nouveau, par deux reprises, il a fait évoluer le texte de telle sorte que tous les points qui pouvaient nous poser problème soient supprimés de cette convention.

Nous avons, au résultat de 200 000 chômeurs de plus, indemnisés, une augmentation de l'aide personnalisée pour la formation et l'insertion qui est passée entre le premier texte et le dernier de 4 milliards de francs à 15 milliards de francs. Nous avons supprimé tout risque de pénalité et les sanctions pour les chômeurs qui ne voudraient pas reprendre un emploi. Nous avons assuré que le service public de l'ANPE contrôle et la recherche d'emplois et l'indemnisation.

Enfin, nous avons diminué par trois les baisses de cotisations.

Entre l'accord proposé à l'agrément du Gouvernement et l'accord que par le poids politique, le Gouvernement avait modifié, il y a un espace, il y a un chemin et nous n'avons pas compris qu'Henri Emmanuelli ne veuille pas reconnaître cet espace et ce chemin sur le fond.

Le deuxième problème est directement politique. Le Gouvernement s'est engagé après ce travail. Il a pris ses responsabilités politiques, il a bien marqué que la loi et le politique gardaient toute leur prééminence, y compris par rapport à la négociation.

Mais maintenant, il s'est engagé vers ce préalable qui est de demander à un parti qui cherche la cohérence et le sérieux de se mettre en contradiction totale avec l'action du Gouvernement sur une question essentielle. C'est le second point sur lequel la synthèse n'a pas pu se faire avec Henri Emmanuelli et les camarades de la motion 3.

Nous avons recherché sincèrement sur beaucoup de questions (les ghettos, bien entendu la valeur ajoutée, bien entendu la lutte contre le travail précaire qui doit être une de nos priorités), autant que nous le pouvions, la synthèse. Nous sommes effectivement pour revoir les règles de la démocratie sociale, nous sommes pour ne pas opposer la croissance, l'emploi et les salaires, mais sur les deux points que j'ai évoqués, nous ne pouvions pas aller jusqu'à perdre la cohérence qui est la nôtre et qui est la garantie que les engagements que nous voulons prendre dans ce Congrès pour les trois ans qui viennent devant les français seront tenus comme nous avons réussi à tenir nos précédents engagements.

Nous souhaitions cette synthèse, nous ne l'avons pas obtenue, mais la qualité du débat entre nous, la sérénité et la franchise de ces désaccords font que, bien évidemment, nous n'accordons pas une importance démesurée à son absence.

Nous savons aussi que si à ce stade, les débats entre nous dans ce Congrès sont terminés, bien entendu, comme toujours au Parti socialiste, ils vont continuer et ils vont continuer jour après jour et jusqu'à ce que nous présentions ensemble notre projet aux Français.

Je crois qu'il faut insister maintenant beaucoup sur le fait que nos débats ne doivent plus être seulement tournés vers nous-mêmes. Nous entrons dans une phase nouvelle, nous entrons dans un combat politique direct avec la droite et il importe maintenant que ces débats s'élargissement, comme François Hollande l'a proposé et comme le sommet de la Gauche Plurielle l'a retenu, à l'ensemble de nos alliés de la Gauche Plurielle, que nous puissions poursuivre ce débat, l'élaboration du projet avec eux et que ce débat soit maintenant entièrement tourné vers les françaises et les Français, merci.



Page précédente Haut de page
PSinfo.net : retourner à l'accueil

[Les documents] [Les élections] [Les dossiers] [Les entretiens] [Rechercher] [Contacter] [Liens]