Pour un Nouveau
Parti socialiste
seconde partie


 Motion présentée par le Nouveau Parti socialiste au congrès national de Dijon du Parti socialiste.
18 mars 2003


IV/ Renouer
avec l'exigence sociale

 

Baisse du chômage...

Nous avions fait chuter le chômage d'une façon spectaculaire qui paraissait nous protéger contre l'échec politique. La France allait mieux, mais pas tous les Français ! Alors que le pays voyait enfin le " bout du tunnel " après tant d'années de crise, il était d'autant plus insupportable pour une partie de la population travailleuse de ne pas en profiter. Malgré les performances statistiques, la population active ne se retrouvait pas dans ces résultats : une grande proportion d'entre elle connaissait des difficultés (9 % de chômeurs, 11 % d'emplois aidés, 3 % de travailleurs intérimaires, 5 % de contrats à durée déterminée involontaires, 16,5 % de temps partiel dont 60 % subis). Le malentendu fut énorme et notre politique perçue comme l'amicale accompagnatrice des dégâts du marché.

C'était pourtant le grand mérite du gouvernement Jospin d'avoir compris, après des décennies de préférence française pour le chômage, que la dépense publique pouvait être orientée vers le développement de l'emploi et qu'il s'agissait là d'un investissement rentable. C'est cette orientation qu'il faut reprendre, poursuivre et accentuer. Elle est déterminante pour la vigueur de notre économie comme pour la garantie d'un niveau de protection sociale élevée.

...et malaise social

Malgré des résultats exceptionnels en termes de création d'emplois, des fractures puissantes ont continué de fissurer notre tissu social, de fragiliser le salariat et de dégrader les conditions de vie de nombre de nos concitoyens. Une grande avancée sociale comme les trente cinq heures, faute d'avoir su ou pu s'appuyer sur le mouvement social, n'est pas parvenue à empêcher la flexibilité dans certaines entreprises, le gel des rémunérations dans d'autres. Dans un deuxième temps des mesures techniques ambivalentes ont trop souvent provoqué incompréhension et rejet. La faiblesse de notre démocratie sociale n'a pas entraîné la volonté et l'adhésion suffisantes pour y remédier. Les progrès continus de la précarité, l'émergence des travailleurs pauvres, l'incapacité concrète à assurer un ordre public social respecté, la faiblesse des salaires ont conduit les salariés les plus fragiles à se sentir davantage fragilisés, parfois même abandonnés, et ont provoqué colère et désenchantement.

C'est pourquoi nous devons construire un projet qui, dans le même temps où il se fixe volontairement l'objectif du plein emploi, fasse de la valeur du travail un des points essentiels de notre projet de société, en lui redonnant sa place, sa dignité et sa juste reconnaissance.

1- La démocratie sociale d'abord

    La loi seule ne suffit pas

    Face au marché, il reste à bâtir la démocratie sociale. Elle doit être considérée de même rang et de même importance que la démocratie politique. C'est une exigence d'efficacité pour la concrétisation de l'action politique. C'est la priorité. La France se gargarise de luttes et de combats, de déclarations fracassantes en discours volontaristes, et pourtant, elle est archaïque dans son fonctionnement social. Les premières victimes en sont les salariés les plus modestes et les plus fragiles. Une fois votée la loi, dans sa magnificence, plus personne ne se préoccupe de son application, voire de son respect. Dans l'élaboration de celle-ci les alchimies politiques les plus curieuses l'emportent sur les organisations représentatives. Celles-ci ne sont jamais confortées dans leurs missions et leurs moyens, toujours contournées et minorées. Le résultat est cruel pour notre pays et il participe de la profonde crise civique que nous traversons.

    Face à l'éclatement des statuts professionnels, à la disparité des conditions de travail, la démocratie sociale doit permettre de traduire sur le terrain les avancées de la loi et de la négociation nationale.

    Renforcer la négociation

    Le politique doit faire le pari de la négociation. Sans revenir sur le primat de la loi sur le contrat, une autonomie plus grande sur un champ d'action plus large doit être laissée aux partenaires sociaux dans la négociation locale et nationale. La démocratie sociale, c'est en premier lieu reconnaître aux corps intermédiaires, syndicats de salariés et patronaux, le soin de fixer, dans le cadre de leurs prérogatives, des règles de négociation dans les entreprises, les branches et au niveau interprofessionnel.

    Il y a tout un champ de démocratie sociale à ouvrir, notre parti se l'était proposé en 1996 et nous avons eu tort de ne pas le mettre en œuvre, de ne pas stimuler une renaissance du syndicalisme et de ses formes d'action car cela aurait grandement modifié non seulement nos rapports avec les syndicats mais aussi les résultats du 21 avril.

    Il faut donc des mesures volontaires pour permettre à la négociation de prendre une force réelle. Toute la réalité du terrain, dans les entreprises, pousse à reposer la question des règles de représentativité syndicales modifiées, présentes dans notre programme en 1996 et que nous n'avons pas fait passer dans les faits. On aurait dû permettre à tous les syndicats réellement existants sur le terrain, l'entreprise, la branche, d'agir, avec une règle majoritaire pour la signature d'accords de façon à ne pas permettre de distorsion démocratique, à ne pas laisser une minorité signer des accords qui s'imposent à une majorité de salariés.

    Une nouvelle représentativité des syndicats

    De nouveaux critères de représentativité s'imposent à partir des résultats obtenus lors des élections professionnelles, prud'homales, ou aux caisses de protection sociale. Le nombre de syndicats disposant de la reconnaissance de représentativité doit être élargi au plan national. Nous ne pouvons en rester aux critères de 1945 et de 1966. Le mouvement syndical a évolué.

    Le principe d'accords majoritaires

    Le nombre plus élevé de syndicats qui en résulterait ne doit pas être l'occasion d'un éclatement des règles. La signature d'un seul syndicat "minoritaire" ne saurait engager des accords applicables aux salariés. Il faut donc mettre comme condition à la validité d'un accord, le fait qu'il soit signé par des syndicats qui représentent clairement une majorité de salariés de la branche ou de l'entreprise concernée. C'est le principe des "accords majoritaires" : il pousse à la responsabilité et à l'unité syndicale, il est plus conforme à l'exigence démocratique, alors que la signature "minoritaire" pousserait plutôt à la division et à la surenchère.

    Un financement public transparent et démocratique des syndicats

    Sans en aucune façon suppléer ni nuire à la collecte des cotisations et aux adhésions individuelles, des fonds publics doivent abonder les caisses des syndicats à chaque niveau, local, fédéral, confédéral selon le nombre de voix reçues dans les élections professionnelles. Il s'agit surtout de permettre aux syndicats d'exercer leurs missions d'information, d'éducation, à leurs instances à tout niveau de se développer, en moyens et en cadres. Notamment lors des élections comme celles des prud'hommes ou à la sécurité sociale.

    Créer un nouveau paritarisme

    Pour développer la représentativité et l'intérêt des salariés envers leurs organisations syndicales, les élections professionnelles seront organisées par branche le même jour. Ce jour sera chômé afin que chacun puisse voter librement.

    Ce sera l'occasion de vraies campagnes de choix sur les grandes orientations de santé, démocratiquement définies, en liaison avec le Parlement.

    La démocratie sociale ne saurait s'arrêter aux portes de la protection sociale. Là aussi, l'organisation d'élections démocratiques où tous les ayants droits voteraient s'impose. Elles seront l'occasion de vrais débats sur les grandes orientations de santé et leur financement, démocratiquement définies, en liaison avec le Parlement et permettront de bâtir un nouveau paritarisme.

    Développer les pouvoirs et moyens des conseillers du salarié

    Pour les salariés dans de petites unités, il est difficile, sinon impossible, de faire vivre des délégués du personnel. Il existe par contre, des "conseillers du salarié" nommés sur propositions des syndicats, figurant sur une liste accessible aux salariés des très petites entreprises, et qui disposent déjà de crédit d'heures, de moyens de déplacement et de communication. Mais ils n'ont le droit d'intervenir que lors des entretiens préalables aux licenciements. Nous proposons de développer leur nombre, leurs crédits d'heures et leurs moyens, de leur permettre d'intervenir, sur appel des salariés, dans les très petites entreprises où il n'y a pas de délégués élus, pour les problèmes ayant trait à l'application des conventions collectives, à l'hygiène et à la sécurité.

    Cette extension des droits des salariés devra aller de pair avec les crédits d'impôt, les aides ciblées, et les conventions signées avec l'administration du travail pour des embauches et les 35 h. C'est le début d'une politique volontariste, de protection dans les petites et moyennes entreprises qui devrait viser à améliorer substantiellement le sort de millions de salariés qui, d'ordinaire, ne voient rien venir de la puissance publique, souffrent, s'abstiennent, se découragent.

    Augmenter les droits des comités d'entreprise

    Il faut développer les moyens de régulation de la gestion des entreprises en augmentant les droits des comités d'entreprise et des délégués du personnel. Jusqu'à présent, ils sont purement consultatifs, sauf sur cinq petites questions, où il existe un "avis conforme". L'employeur doit recueillir l'approbation du comité d'entreprise pour mettre en œuvre certaines mesures (par exemple, pour modifier des horaires variables ou changer de centre de médecine du travail). Il s'agit non seulement d'une obligation de consulter, mais une obligation de résultat. L'accord est nécessaire avec les salariés pour avancer. Nous avions envisagé avec les organisations syndicales de développer les sujets sur lesquels l'avis conforme deviendrait nécessaire ; par exemple sur la question des heures supplémentaires.

    Ainsi peu à peu des droits nouveaux pour les comités d'entreprise, les délégués du personnel, des CHSCT pourraient se développer thème par thème, ouvrant un champ considérable à la démocratie sociale dans les entreprises.

2- L'emploi, encore et toujours l'emploi

    L'emploi doit rester notre priorité, parce qu'il est la condition d'une économie puissante, d'une protection sociale confortée, d'une société surmontant ses peurs et réconciliée avec ses valeurs.

    35 heures, vraiment

    La réduction du temps de travail méritait mieux que d'être un progrès pour les cadres et un problème pour les ouvriers, les salariés modestes et les petites entreprises.

    Nous voulons confirmer et développer la réduction du temps de travail, comme instrument de rétablissement du plein emploi.

    Nos lois sur les 35 heures ont permis de faire un grand pas historique. C'est avec les socialistes, avec la gauche, qu'il y a eu les 40 heures, puis les 39 heures, et les 35 heures. La réduction du temps de travail est normale en présence de gains de productivité considérables et d'un chômage de masse. II est juste de redistribuer le travail comme un des éléments principaux de redistribution des richesses. Sans le passage aux 35 heures, jamais notre pays n'aurait pu connaître une baisse de 900 000 du nombre des chômeurs. L'actuel Gouvernement agit en sens contraire quand il permet que se multiplient les heures supplémentaires, et qu'il les rend moins coûteuses.

    Cela frappe surtout les 8 millions de salariés des petites entreprises, où les durées du travail sont plus longues et les salaires les plus bas. Maroquinerie, bijouterie, restauration, transporteurs, bâtiment, habillement, commerces, les salariés sont usés à travailler de nombreuses heures supplémentaires dont le taux de majoration a été diminué pendant que des centaines de milliers de chômeurs subissaient à leur tour des diminutions de leur indemnité de chômage.

    Les 35 heures ont été la mesure-phare de la victoire de la gauche en 1997. Elles n'ont été que partiellement et maladroitement appliquées dans les fonctions publiques et dans les entreprises de moins de vingt salariés.

    Nous devons en tirer les leçons.

    Les 35 heures doivent être étendues et encadrées, pour tous les salariés. Pour cela nous proposons qu'un bilan de leur application et leurs résultats fasse l'objet d'une grande concertation avec les partenaires sociaux. A partir de ses résultats, il conviendra, de donner tout leur sens aux 35 heures, de prendre des mesures permettant de contenir les flexibilités et d'instaurer des normes claires encadrant les durées quotidiennes et hebdomadaires :

       la durée maxima hebdomadaire doit être diminuée en proportion de celle de la durée légale, 44 heures maxima par semaine au lieu de 48 heures.

       Le contingent annuel d'heures supplémentaires doit revenir à 130 heures maxima pour tous.

       Les heures supplémentaires définies comme " ponctuelles et imprévisibles " (selon la définition de l'accord signé par le patronat le 31 octobre 1995) doivent être majorées à 25 % dès la première heure.

       Les deux jours de repos consécutifs hebdomadaire doivent être acquis pour toutes et tous et entrer en tant que tels dans le Code du travail.

       Le " temps de travail effectif " doit intégrer les pauses nécessaires et trajets imposés, le temps d'habillage et de casse-croûte et, comme le contrat de travail, se définir comme le " temps où le salarié est subordonné à l'employeur ".

    Après négociation avec les partenaires sociaux, ces mesures doivent être " d'ordre public social " afin d'éviter les contournements et les dérives qui ont, à force de flexibilité et de complexité parfois vidé, dans certaines branches ou secteurs, les 35 heures de leurs sens. Les socialistes doivent reprendre et compléter ce qu'ils ont initié. Si l'on veut créer de l'emploi et libérer du temps, une certaine fermeté dans l'application de la loi qui a trop fait défaut, est nécessaire.

    Lutter contre les licenciements de " convenance " boursière

    Il y a 2,5 millions de demandeurs d'emploi, mais davantage de chômeurs réels. Le chômage de masse est un cancer qui continue de ronger notre société. Il y a 950.000 contrats à durée déterminée, 650 000 intérimaires, 3,5 millions d'emplois à temps partiels, 3,5 millions de "travailleurs pauvres" auxquels il faut ajouter les Rmistes, les exclus, ceux qui ne peuvent vivre décemment avec des minima sociaux.

    La priorité des socialistes doit être réaffirmée au bénéfice de l'emploi et à la lutte contre le chômage de masse contre la précarité.

    Nous devons combattre la "suspension" de la loi de modernisation sociale, au moment où il y a des centaines de plans dits de "sauvegarde de l'emploi" par mois. C'est ce moment-là que le Gouvernement Raffarin a choisi pour suspendre la loi protectrice que la gauche avait mise en place le 19 janvier 2002.

    Ont été suspendues l'obligation de négocier la réduction du temps de travail avant de licencier, la possibilité pour les syndicats de proposer des alternatives aux licenciements et l'obligation d'embaucher pour recevoir des "aides". Il n'y a plus de lien ni de contrainte à embaucher en échange de l'exonération de cotisations sociales. Le contrôle de l'utilisation des aides publiques a également disparu.

    Nous voulons au contraire renforcer la loi de modernisation sociale. Lorsque, pour des licenciements collectifs ou individuels, il apparaît un "doute manifeste" sur leur bien fondé, une absence de cause réelle et sérieuse lorsqu'il semble que leur motivation réelle est la valorisation boursière, l'inspection du travail pourra prononcer leur suspension, jusqu'à ce que des solutions soient trouvées entre partenaires sociaux, avec les acteurs locaux, ou régionaux, afin d'empêcher ces licenciements ; d'en diminuer le nombre ou de reclasser et former véritablement les salariés concernés.

    Les aides publiques doivent être contrôlées et les mécanismes de restitution doivent être légalement prévus. Les pénalités face aux délocalisations ou externalisations, doivent être dissuasives.

    Lorsque manifestement les actionnaires ferment des sites et des activités dans le but principal d'augmenter leurs marges au détriment des salariés et des bassins d'emploi, la puissance publique doit se réserver, après avis des partenaires sociaux, le pouvoir d'infliger des sanctions dissuasives : remboursement de toutes les aides perçues, indemnités majorées pour les salariés victimes.

    La majorité des licenciements a lieu dans les 97 % d'entreprises de moins de 50 salariés qui font travailler prés de 8 millions de personnes. De nombreux licenciements sont jugés abusifs, et les victimes sont actuellement sans droit réel autre que de bénéficier d'indemnités souvent faibles et tardives. Le rétablissement des salariés dans leur droit passe par une réforme drastique et profonde des Conseils de Prud'hommes et la mise en place d'un véritable droit de référé prud'homal. Dans tous les cas, le salarié licencié à tort pourra bénéficier de la part du juge d'une mesure de réintégration et pas seulement de dommages et intérêts.

    La sécurité sociale professionnelle

    Une sécurité sociale professionnelle doit être mise en place qui permette la continuité des avantages liés au contrat de travail tant qu'un reclassement effectif n'est pas opéré. Un droit universel à la formation, permettant de qualifier les travailleurs et les chômeurs qui ne le sont pas et de répondre aux besoins d'emplois pour demain, doit être progressivement instauré. Qui pourrait sérieusement garantir à un jeune de 20 ans en 2003 la validité et la valeur sociale des savoirs qu'il a acquis à l'école lorsqu'il aura 50 ans - en 2033 ?

    C'est un des messages du 21 avril qu'il nous faut entendre : garantir à chacun, à tous les moments de sa vie, la possibilité d'accéder aux savoirs et aux compétences nécessaires à sa vie sociale, à l'exercice de sa citoyenneté et à sa participation à la production des biens et des services. Il s'agit, en vérité, de construire le 5ème pilier de la protection sociale : une assurance formation, une couverture formation universelle. Pour qu'elle bénéficie en premier lieu à ceux qui en ont le plus besoin, elle reposera sur une logique de " droits de tirages sociaux ", ouverts en priorité aux demandeurs d'emploi et aux salariés précaires les moins qualifiés. Cela suppose une restructuration de fond en comble du système de financement de la formation professionnelle, 22,5 milliards d'euros par an, dont l'efficacité et le respect du principe de bonne utilisation des fonds publics laisse aujourd'hui scandaleusement à désirer.

    Le principe si souvent évoqué par la gauche de garantir une formation tout au long de la vie implique une profonde réorganisation du système de formation professionnelle continue existant depuis 1971. La sécurité sociale professionnelle ne peut que coûter cher et exigera de grands changements pour être mise en place. Mais les fonds existent. Aujourd'hui la formation professionnelle continue dépense 148 milliards de francs (près de 23 milliards d'euros) dont la Cour des comptes estime que 80 % est gaspillé, n'atteint pas le public visé, ne permet pas de faire face efficacement aux licenciements et reclassements.

    Il s'agit de réorganiser l'ensemble du système de formation et d'en faire un grand service public adapté aux besoins réels des salariés, à commencer par les plus modestes.

3- Pauvreté salariale et désordre public social

    Sortir de l'insécurité sociale

    L'ordre public social ne saurait être un chiffon de papier. Le respect de la loi, cela vaut partout et pour tous. C'est pourquoi il faut se donner les moyens de sortir de l'insécurité sociale qui est aujourd'hui le quotidien pour des catégories entières de travailleurs. De façon générale, pour le respect d'un véritable ordre public au travail, la hiérarchie des sources de notre droit, avec la supériorité de la loi, sera établie sauf lorsqu'une convention ou un accord sera plus favorable du point de vue des salariés. Mais il faut être conscient du grand écart entre les discours de principes, les indignations, les proclamations, et les réalités, modestes et négligées.

    Contre le salariat de seconde zone

    L'éclatement du salariat, l'apparition d'un salariat de seconde zone sans aucun droit à la représentation, sont une réalité pour des millions de salariés. Les socialistes doivent y apporter des réponses appropriées :

    Les accidents du travail qui ré-augmentent en nombre, les maladies professionnelles qui s'étendent et sont terriblement sous-estimées, le stress et les nuisances nouvelles au travail ne sont pas convenablement traités dans notre pays. Sans parler des risques terrifiants qui ont été révélés par la catastrophe d'AZF ou les études sur les éthers de glycol, ou encore par les enquêtes sur le stress et le harcèlement.

    Il faut relancer la prévention des accidents et maladies au travail, et pour cela, réactiver, renforcer, donner toute son importance à la médecine du travail. C'était, avec la médecine scolaire une de nos deux grandes médecines de prévention. Elles tombent toutes deux en désuétude, alors que les développer est une nécessité économique. Ce sont les meilleurs moyens de faire dépister, d'anticiper et de réaliser des économies sur les soins.

    Il faut donner des droits nouveaux aux CHSCT (comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail) qui sont au nombre de 44 000 et ne couvrent que 75 % des salariés dans 3 % des entreprises de plus de 50 salariés. Le taux d'exposition aux risques est pourtant plus élevé dans les petites entreprises. Il faut abaisser les seuils à 20 salariés, initier des CHSCT de site et de branche, départementaux, donner davantage d'heures de délégation, une meilleure formation de qualité, et un budget (car les CHSCT n'en ont pas). Là encore, les CHSCT sont les meilleurs moyens de prévention à condition qu'ils aient les moyens humains et matériels de faire face à toutes leurs obligations.

    Enfin, il faut réparer réellement et jusqu'au bout les accidents du travail ainsi que les maladies professionnelles dont le nombre est en expansion et qui sont aujourd'hui sous-estimées, voire niées. L'inspection du travail doit pouvoir sanctionner davantage les fautes inexcusables et les infractions des employeurs relevées par l'inspection du travail causant la mort ou pouvant mettre en cause la vie des salariés.

    Agir contre la précarité

    La lutte pour le plein emploi n'a de sens que si elle est adossée à une lutte pour le bon emploi. Dans le cycle économique actuel, le refus de la précarité du travail doit devenir une priorité. De 1985 à 2001, le nombre de contrats à durée déterminée (CDD) a triplé et celui des intérimaires multiplié presque par 6. Contrairement à une idée reçue, la France est ici au-dessus des autres pays européens : triste performance ! Les conséquences en termes de souffrance personnelle et de délitement social sont considérables, d'autant que ce sont les catégories les plus fragiles qui sont touchées : femmes, jeunes, peu qualifiés, travailleurs immigrés. La France compte près de 6 millions d'emplois atypiques et près de 3,5 millions de travailleurs pauvres. Cette situation exige une réponse ferme.

    Cela implique de stopper le développement de la précarité sous toutes ses formes : c'est-à-dire combattre les CDD, l'intérim, les temps partiels subis, saisonniers, intermittents.

    Ce ne peut être un moyen toléré de gestion du personnel que de le faire plier à l'instabilité, à la précarité, à la flexibilité. C'est mauvais pour la société, mauvais pour la productivité, mauvais pour l'économie.

    Une sur cotisation sur les contrats précaires alimentera les caisses de protection, en plus de l'indemnité de précarité d'emploi (IPE) existant, qui devrait être majorée de 10 à 15 % pour l'intérim. Cette majoration des cotisations sociales ajoutée à l'IPE, aura un rôle dissuasif pour empêcher les abus.

    Il convient de renforcer les conditions d'usage des CDD, empêcher les CDD courts de quelques jours renouvelés à l'infini et les CCD trop longs, qui, de fait, occupent de vrais emplois permanents : au minimum un mois, au maximum 12 mois. Les CDD prétendus "d'usage" doivent être déclaré hors la loi. Tout CDD doit être expressément motivé. Seuls les contrats saisonniers motivés, ont un sens mais là, aussi des majorations de l'IPE doivent être appliquées en faveur des salariés.

    Enfin, il est contraire à l'ordre public social que des entreprises utilisent 2.500 intérimaires sur 4.500 salariés, même à coût plus élevé ! L'utilisation de CDD ou d'intérim doit être absolument ponctuelle et motivée comme tel. On fixera, après négociations branche par branche, un quota pour limiter le nombre de CDD et d'intérim dans les entreprises de plus de 20 salariés.

    Le temps partiel subi (16 % de salariés sont à temps partiel, soit 3,5 millions, 85 % de femmes, 80 % de non qualifiés, dont 60 % le subissent, faute de véritable emploi) non seulement ne sera plus encouragé par aucune forme d'aide ni d'exonération, mais sera contrecarré par des mesures de priorité de reclassement au temps plein, et par une indemnité de sous emploi (comme l'IPE pour les CDD et l'intérim : 15 %). Les temps partiels annualisés qui sont le "comble de la flexibilité" seront interdits.

    Le travail précaire n'est pas l'antichambre du travail stable : il est souvent le premier pas vers la pauvreté et l'exclusion.

    Un pacte de progrès avec les entreprises

    Nous devons aider les entreprises à réussir et à se développer ; cela dans la clarté et avec des exigences. Les allègements d'impôts et de cotisations sociales, tout comme les aides publiques, doivent être réservées aux entreprises qui acceptent de passer un pacte de progrès dans lequel les créations d'emploi, les conditions salariales, l'hygiène et la sécurité, l'égalité homme/femme, la lutte contre la précarité du travail, la formation, la part accordée à la recherche et au développement, la préoccupation environnementale seront prises en compte dans un projet d'entreprise contractualisé avec les représentants des syndicats et les institutions représentatives.

    A cet égard, ce sont les toutes petites entreprises qui devront être le centre de notre politique de soutien et d'allègement de leurs coûts.

    Renforcer l'inspection du travail

    Celle-ci a des effectifs ridiculement bas, (417 inspecteurs, 813 contrôleurs pour 15,5 millions de salariés, et 1,2 million d'entreprises !) des moyens insuffisants, une administration archaïque, et une trop faible pénalisation suit ses contrôles.

    Il s'agira donc dans un premier temps de doubler les sections d'inspection et de mettre en place une vraie politique pénale au travail. Ce sont les conditions élémentaires qui permettront qu'une véritable inspection du travail digne de ce nom soit reconstruite. Cela se traduira par plus de sécurité au travail, un respect des droits élémentaires dans les entreprises, notamment là ou il n'y a pas d'élus du personnel ni de représentant syndical.

4- L'enjeu majeur des retraites

    La question des retraites est centrale dans les préoccupations de nos concitoyens. Son enjeu est considérable mais les données sont mal posées.

    Pour ouvrir notre système de retraites aux assurances privées, pour instaurer les fonds de pension, certains hurlent à la prochaine faillite du système par répartition. D'autres cherchent à opposer les catégories de salariés entre eux, laissant croire que les reculs qui seraient imposés aux salariés du public, notamment la remise en cause des 37,5 annuités de cotisations, ne prépareraient pas de nouveaux et plus graves reculs pour les salariés du privé.

    Nous devons refuser fermement cette logique et traiter les deux problèmes fondamentaux que pose la question des retraites : celui de la justice, celui du financement -pour pérenniser la répartition et faire obstacle à la remise en cause de la solidarité entre les générations encouragée par l'installation progressive d'un second système par capitalisation.

    Répartition et retraite à 60 ans

    En termes de justice, nous devons, d'abord, réaffirmer deux principes : le maintien du système par répartition et le droit à la retraite à soixante ans à taux plein. Nous devons, ensuite, corriger les mesures prises de façon brutale, unilatérale et sans concertation (décret Balladur de 1993 et mesures AGIRC et ARCO consécutives) applicables aux retraites des salariés du secteur privé, dont les conséquences ont été désastreuses sur le taux de remplacement du revenu de cette catégorie de retraités.

    Plus de justice dans le privé

    C'est pourquoi il faut revenir à un calcul des retraites sur les 10 meilleures années et non sur les 25 meilleures années d'activité et de rémunération et indexer leur évolution sur celle des salaires et non sur celle des prix. Nous devons garantir un taux de remplacement élevé, revaloriser le minimum vieillesse et résoudre le problème des départs anticipés et des préretraites.

    Nous devons cette reconquête aux salariés du secteur privé et à ses futurs retraités. Elle coûtera chère mais elle vaut bien la bataille pour le maintien des droits acquis dans le secteur public.

    Car la véritable injustice n'est pas tant entre les différences de statuts qu'entre ceux qui peuvent profiter de leurs retraites et ceux qui ne le peuvent pas. L'inégalité est à cet égard flagrante tant devant l'espérance de vie et la durée de jouissance de la retraite que devant la durée des cotisations. Ce sont en effet souvent les mêmes qui cotisent longtemps, ont de faibles retraites et meurent précocement.

    La première mesure de justice sera de permettre le départ dès quarante ans de cotisations pour ceux qui n'ont pas atteint les soixante ans mais qui ont commencé à travailler tôt. A terme, et selon la nature du travail, son degré de pénibilité et l'espérance de vie de chacune des professions, il faudra, par la négociation, organiser des temps de cotisation différents rétablissant la justice dans le respect d'une durée maximale de cotisation et sans remettre, bien sur, en cause, le droit commun, d'ordre public social, de partir à taux plein à 60 ans.

    La mesure de justice la plus efficace sera de permettre le départ dès quarante ans de cotisations pour ceux qui n'ont pas atteint les soixante ans mais qui ont commencé à travailler tôt. A terme, et selon la nature du travail, son degré de pénibilité et l'espérance de vie de chacune des professions, il faudra, par la négociation, organiser des temps de cotisation différents rétablissant la justice dans le respect d'une durée maximale de cotisation.

    C'est pourquoi, la question du financement est déterminante et ne peut être passée sous silence. L'alimentation du fonds de réserve des retraites, nécessaire, sera insuffisante. Les cotisations sociales actuelles ne pourront pas absorber les importants besoins de financement qu'il faut dégager.

    Un financement nouveau

    Plusieurs nouvelles possibilités de financement doivent être envisagées par les socialistes. D'abord, l'augmentation des cotisations retraites patronales pourrait être un moyen privilégié de commencer à rétablir cet équilibre tout en comblant les besoins de financement de notre système de retraite par répartition. Ensuite, l'extension de l'assiette des cotisations patronales en la faisant reposer sur la valeur ajoutée des entreprises. Enfin la perspective du transfert des cotisations salariales en concertation étroite avec les organisations syndicales vers la CSG.

    Les avantages de telles réformes sont multiples :

       elles font contribuer les revenus du capital au financement des retraites ;
       elles installent le principe de solidarité nationale autour du financement des retraites ;
       elles marquent également la solidarité entre les retraités les plus aisés et les retraités les plus modestes ;
       enfin, elles dégagent des augmentations des salaires directs considérables au profit des salariés, permettant la revalorisation importante des salaires dans les entreprises.

    Le paritarisme devra rester la règle de gestion de notre système de retraites.

5- Garantir notre protection sociale

    La protection des personnes face à la maladie et l'égalité d'accès aux soins, quel que soit le lieu où l'on habite et quel que soit son revenu, est désormais en grand danger.

    Au moment même où la mise en place de la CMU avait permis de compléter l'édifice en permettant que les plus fragiles puissent bénéficier d'une couverture complète, les remises en cause (suppression de l'Aide Médicale de l'Etat), comme les décisions démagogiques prises en direction des professionnels libéraux de santé ou des laboratoires pharmaceutiques (liberté des prix pour les nouvelles molécules), font, en effet, peser de très graves menaces sur l'assurance maladie.

    Il y a pourtant tant à faire dans un pays où les " fléaux sociaux " - et notamment les addictions à l'alcool et au tabac, causes de 60.000 morts par an - demeurent des facteurs très importants de morbidité et de mortalité prématurée, et où les actes de prévention n'ont toujours pas droit de cité dans un système quasi exclusivement tourné vers le seul curatif.

    Tant de besoins demeurent à satisfaire, qu'on ne peut donc qu'être inquiet d'une perspective où le besoin de financement de l'assurance maladie (qui serait en 2003 de l'ordre de sept milliards d'euros) ne manquera pas de servir de prétexte à des remises en cause, d'ailleurs déjà annoncées.

    L'ensemble des dépenses d'assurance maladie représente un montant qui sera bientôt comparable à celui des retraites. Sans une consolidation de l'assurance maladie en lui donnant les moyens financiers qui lui sont nécessaires, sans une véritable ambition pour la politique de santé, toutes les régressions sont à redouter pour demain.

    Il nous faut donc ouvrir devant les français un débat public sur l'avenir de notre système de santé et d'assurance maladie.

    Trois axes sont ici essentiels :

       Donner au secteur hospitalier les moyens de son action : une loi programme ambitieuse offrant un cadre pluriannuel est indispensable pour réorganiser et mettre à niveau les établissements et les équipements, et donner aux personnels des conditions de travail normales.

       Offrir au secteur libéral de ville un cadre clair définissant ses droits mais aussi ses obligations. Les professionnels doivent être conscients qu'ils ne peuvent exercer leur art et en vivre que grâce à la solvabilisation des besoins que permet l'assurance maladie. Il est juste qu'en regard cela fasse naître des devoirs et des obligations de leur part à l'égard de la collectivité. On ne peut ainsi considérer comme satisfaisant que notre pays soit l'un des plus grands consommateurs de médicaments au monde, ou que l'installation des professionnels sur le territoire soit aussi peu en adéquation avec les besoins qui s'y font sentir.

      Chacun sait que la caractéristique libérale de la médecine de ville ne concerne que la totale liberté d'installation des professionnels sur le territoire avec des inégalités territoriales criantes qu'aucune raison de santé publique ne peut justifier, la très grande liberté d'exercice des professionnels qui en règle n'ont de compte à rendre qu'à leur conscience, et le choix que les professionnels sont en droit d'effectuer en matière de clientèle. En revanche il n'y a pas de vraie concurrence entre professionnels. Les tarifs sont normés et identiques sur tout le territoire et la très grande différence d'information, chose parfaitement compréhensible, entre professionnels et patients ne permet évidemment pas à ceux ci, en règle, de faire prévaloir objectivement la prime au meilleur service médical rendu. Soit parce qu'il y a pléthore d'offre (Ile de France ou PACA) et qu'il est bien difficile de faire la part des choses, soit à l'inverse parce qu'il y a pénurie (Picardie, Limousin).

      Les deux éléments essentiels pour caractériser une activité libérale, concurrence par les prix et par la qualité, faisant défaut , c'est abusivement que cette médecine est qualifiée de libérale d'autant qu'elle n'est solvabilisée que par l'impôt.

      Mettre fin à une pratique inflationniste qu'est le paiement à l'acte n'est envisageable que dans le cadre assumé par tous, professionnels et pouvoirs publics, d'une politique des revenus qui est , au fil des crises, mises en œuvre sans jamais dire son nom et, de plus, de manière incomplète.

      Sans jamais dire son nom puisque la médecine est " libérale " et qu'affirmer publiquement son caractère libéral totalement factice est un tabou politique.

      De manière incomplète, en conséquence et aussi, pour deux raisons. La première est que si la valeur des actes est revalorisée, leur nombre n'est jamais abordé. Or c'est la conjugaison de la valeur et du nombre qui fait le revenu des médecins et la dépense publique. La seconde est qu'un acte médical n'est jamais chiffrable objectivement de manière juste. Quelle peut être la valeur financière d'un acte qui en diagnostiquant une méningite sauve un enfant ? Inestimable au sens premier du terme. Dés lors la valeur des actes médicaux dans leur diversité étant inappréciable, le revenu des professionnels est ce que la collectivité estime devoir y consacrer à partir de la ressource publique, c'est à dire de l'impôt.

      Garantir une politique des revenus et une évolution de carrière aux professionnels à partir de l'impôt, après débat public et parlementaire, année après année, en permettant ainsi de mettre en œuvre des incitations financières pour telle spécialité en déshérence bien qu'indispensable à la santé publique, ou pour telle région a priori moins attractive que d'autres n'est possible qu'après avoir renoncé au paiement à l'acte au profit d'une capitation qui laisserait entier le choix de leur médecin par les Français.

      Les pouvoirs publics seraient parfaitement légitimes à mettre en œuvre une telle politique pour des raisons de santé publique et de maîtrise de la dépense publique, c'est à dire de l'impôt.

       Prendre les moyens d'une véritable politique de prévention en sachant rémunérer et prendre en charge à 100 % les actes nécessaires dans des programmes ciblés (cancer du sein, ou du col de l'utérus par exemple ; développement des services d'alcoologie) et en donnant des moyens accrus à la médecine scolaire et à la médecine du travail. Faire de la prise en charge de la dépendance, pour les personnes en perte d'autonomie, une véritable priorité.

    La problématique du handicap rejoint notre combat pour l'égalité au même titre que la parité ou la lutte contre toutes les formes d'exclusion. Nous appelons à une politique visant à supprimer ou compenser chaque fois que de besoin les situations de handicap par des réponses générales mais aussi des réponses diversifiées et adaptées aux particularités de la personne, afin de permettre son intégration scolaire, professionnelle et sociale. De ce point de vue, il importe que le principe de non-discrimination soit appliqué à nos concitoyens dits " handicapés " afin qu'ils puissent accéder aux mandats d'élus à tous les échelons.

    Si les perspectives sont si préoccupantes, c'est qu'aucun des principaux acteurs de la politique de santé (caisses, Etat, organisations syndicales de professionnels) n'a su faire prévaloir une logique collective d'ensemble. Les institutions sont en cause. Il est nécessaire de redéfinir l'organisation du système de santé, trop émietté pour permettre une véritable organisation et coordination.

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V/ Retrouver les outils de l'égalité

 
Cette inertie gestionnaire qui a tant nui à notre cause nous a amené à regarder, passifs, les dégâts de la globalisation libérale, à accepter une démocratie politique anesthésiée, à tolérer un désordre public social profond, des inégalités qui perdurent ou s'accroissent, une précarisation qui s'installe. Les socialistes doivent proposer un sursaut et un réformisme radical pour affirmer leur aspiration primordiale à la justice sociale, bousculer les conservatismes, remettre en cause les privilèges.

Lorsque trois fois plus d'ouvriers votent pour Jean-Marie Le Pen que pour notre candidat, c'est notre responsabilité historique de socialistes de mener une bataille idéologique et culturelle forte, sanctionnée par des choix et des actes, de telle sorte que l'égalité des chances et des possibles, celle aussi des conditions, soit un projet partagé par le plus grand nombre. Les difficultés que nous pouvons rencontrer face au consumérisme, à l'égoïsme individualiste ou corporatiste, à la défiance des classes populaires dans l'action publique sont directement liées aux échecs concrets que nous avons pu rencontrer dans la lutte contre les inégalités et au sentiment que nous avons pu donner de nous satisfaire du désordre social et de l'insécurité publique liée à l'économie libérale. La société française doit retrouver une ardeur et une fraternité qui lui font défaut, et cela ne peut se faire que par un projet d'émancipation individuelle et collective construit sur des valeurs clairement assumées et défendues. Nous proposons de trancher des débats qui sont restés aujourd'hui confisqués, interdits ou ambigus. Nous proposons de reconquérir les instruments qui permettent de reprendre avec entêtement la lutte contre les inégalités, et de reconquérir ainsi notre identité, notre vocation et notre justification de socialistes.

1- L'égalité devant la loi : justice et sécurité

    L'identité politique de la gauche démocratique française s'est forgée dans le combat pour la Justice. Contre la peine de mort, de Victor Hugo à Robert Badinter, contre l'arbitraire aux côtés de Dreyfus, contre la répression syndicale, les violences policières. Ces combats n'ont pas été menés par souci de plaire. Ce ne sont pas les sondages qui ont convaincu Zola, Jaurès et Blum de s'engager pour la révision du procès Dreyfus. S'ils avaient existé, ils auraient invité ces illustres à rester chez eux !

    Ce combat pour la Justice découle d'une vision morale et politique du monde : celle qui refuse de séparer ordre public et ordre social. Là où règne le désordre social, alors le désordre public ne peut que s'installer. Ceux qui veulent combattre le désordre, la violence, la délinquance ou quel que soit le nom qu'on lui donne sans combattre le désordre social sont ceux qui ont intérêt à ce que ce dernier perdure.

    Le concept de tolérance zéro, importé des Etats-Unis, est justement fondé sur cette primauté accordée à la lutte contre toute forme de désordre : usage de drogue, mendicité, graffitis, prostitution, ébriété, délinquance mineure, on pourchasse ce qui fait désordre. Théoriser qu'en luttant contre la petite délinquance, on viendra à bout de la criminalité organisée, est insuffisant.

    Les conséquences sont connues. D'un côté, un engorgement des tribunaux, une hausse des affaires " sérieuses " non résolues, une augmentation brutale de la population carcérale (aux Etats-Unis, l'administration pénitentiaire est devenue le troisième employeur du pays). De l'autre, une stigmatisation de la population, une méfiance accrue, en retour, vis a vis de la police. Le concept d'obligation de résultats pour les policiers conduit à une augmentation exponentielle du nombre d'arrestations sans aucun fondement, et décourage les forces de l'ordre de s'engager dans des enquêtes longues et incertaines, qui ne se voient pas dans les statistiques mais seules permettent de s'attaquer vraiment à la délinquance organisée.

    Ce n'est pas un hasard si ceux qui aujourd'hui portent le discours le plus dur sur les questions de sécurité semblent si bien s'entendre avec ceux qui se font les chantres d'une ambition politique soumises aux réalité du marché. L'insécurité est avant tout une conséquence du fonctionnement du libéralisme et des dégâts occasionnés au tissu social. Le discours sécuritaire n'est jamais loin du discours libéral, il en est la conséquence logique. De ce point de vue, le discours Sarkozy est une forme revisitée du Berlusconisme : complaisant avec les puissants, impitoyable avec les autres.

    Les socialistes sont désemparés face à l'offensive libérale-sécuritaire du gouvernement, au point de ne même pas relever que quand Nicolas Sarkozy dénonce les " droit-de-l'hommistes ", il ne fait rien d'autre que de citer Le Pen dans le texte.

    Il est de la responsabilité de toute la gauche de dénoncer le projet de société proposé par l'actuel gouvernement, dont la politique sécuritaire n'est qu'un aspect, mais un aspect essentiel, que l'on ne peut dissocier des atteintes aux droits sociaux.

    En vérité, la République peut être sévère, mais si et seulement si elle est juste. La justice, c'est le sentiment que chacun dans notre société peut être entendu et respecté, dispose de sa place et a droit à une chance. La justice, c'est ce contrat invisible qui unit des citoyens appartenant à une même société dans laquelle chacun d'entre eux sera traité équitablement.

    Réclamer l'application de la loi, toute la loi, est naturel. Si la loi ne trouve pas à s'appliquer, c'est le contrat républicain qui est dévalorisé, la délibération commune qui perd de sa force, le respect de l'autorité librement consentie qui disparaît.

    C'est notre devoir de socialistes, pénétrés de notre idéal de justice que d'exiger que les citoyens soient traités de façon égalitaire et équitable, notamment s'agissant d'illustres délinquants en col blanc pour lesquels le système judiciaire ménage une curieuse mansuétude. Si la sévérité s'exerce en un point du contrat républicain, elle doit s'exercer en tous les points du même contrat. Réclamer l'impunité zéro, comme l'a fait le chef de l'Etat, est d'autant plus malhonnête que l'intéressé n'a guère entendu se l'appliquer à lui-même.

    Il est de la responsabilité des socialistes de montrer qu'une autre voie est possible. A nous de défendre la police de proximité, aujourd'hui remise en cause, et de quelle façon, par l'humiliation publique de fonctionnaires loyaux qui s'étaient investis dans ce projet et en avaient déjà retiré les premiers fruits. Ce n'est pas la police spectacle, mais bien l'insertion de la police dans le tissu social, qui donne des résultats. Celle-ci doit aller de pair avec le renforcement du lien hiérarchique entre police et magistrature, pour remettre leur rôle d'investigation au cœur des missions des forces de police.

    Il n'y a aucune naïveté à rappeler qu'un mois de salaire d'éducateur coûte moins cher à la société qu'une semaine d'incarcération. Aucune naïveté à s'inquiéter de ce que, pendant la chasse aux mendiants, la brigade financière et le pôle financier du parquet de Paris sont privés de moyens, et la lutte contre le blanchiment et la délinquance en cols blancs reste le parent pauvre de notre système judiciaire.

    Plutôt que de lutter contre les causes de la délinquance et de la désagrégation civique, le Gouvernement actuel a choisi un modèle de société que nous récusons et qui a prouvé ailleurs son inefficacité. Ce projet est cohérent et marche sur deux jambes : démantèlement des processus de sécurité sociale, d'éducation et d'intégration d'un côté: criminalisation d'une partie, la plus fragile, de la population de l'autre. L'horizon qu'il s'est fixé est bien clairement assumé par la construction de 13.000 places de prison. Il ne s'agit pas de combattre la délinquance, y compris celle des plus jeunes. Il s'agit d'augmenter le nombre de délinquants et de développer un enfermement dont on sait pourtant qu'il est criminogène. La société qui nous est préparée ainsi est une société à l'américaine en rupture totale avec nos principes et nos valeurs républicaines, ce qui s'exprime d'ailleurs clairement par les attaques indignes à l'égard des défenseurs des droits de l'homme.

    Les contrats locaux de sécurité, unissant les efforts des différents protagonistes sur le terrain, donnaient d'incontestables résultats sur ce sentiment d'insécurité, tenace et ravageur. Nous devrons organiser davantage encore cette alliance des compétences et des moyens alliant les élus, la police et la justice.

    La lutte contre l'insécurité ne peut se faire comprendre et donner des résultats qu'adossée à une prévention efficace.

       Remettre les emplois-jeunes au cœur de la politique de la ville et au service de l'éducation et du sport ;

       Revenir à la notion de police de proximité démolie par le gouvernement actuel ;

       En partenariat avec les collectivités locales, donner les moyens aux structures pour les jeunes et aux mouvements d'éducation populaire d'ouvrir des lieux d'accueil avec des horaires adaptés. On ne peut les chasser des bas des immeubles sans leur proposer d'alternative ;

       Favoriser les peines de réparation par rapport aux sanctions pour des délits mineurs et graduer ces dernières de telle sorte que l'on puisse agir de façon adaptée précocement ;

       Pour lutter efficacement contre la récidive, il faut travailler et préparer les populations carcérales à une réinsertion dans la vie extérieure en mettant toutes les chances de leurs côtés pour se sentir " réintégrés " ;

       Lutter contre toutes les formes de toxicomanies dès l'école primaire par des actions ciblées afin de diminuer le risque d'utilisation des mineurs par des caïds et des dealers patentés ;

       Se donner les moyens de repérer les enfants en difficulté personnelle et familiale précocement et d'aider les parents à assumer leurs responsabilités éducatives ;

       Instituer des internats de proximité ;

       Renforcer l'éducation au respect, insister sur les valeurs de la tolérance dans la mixité sociale et entre les sexes.

    Autour d'une politique de sécurité qui soit à la fois répressive et préventive, d'un projet éducatif global, d'une démocratie renouvelée, d'une intégration réussie, d'une laïcité réaffirmée et promue, de services publics restaurés, nous continuons de croire qu'il y a un autre chemin pour la société française, dans la fermeté sans laquelle il n'y a pas de justice et dans la fraternité sans laquelle il n'y a pas même, comme l'avaient compris les premiers républicains, de liberté individuelle.

2- Nos retrouvailles avec le service public

    Services publics et égalité

    Le service public est un des éléments fondamentaux de la cohésion nationale, sociale et territoriale. Il fixe le niveau de résistance qu'une Nation entend opposer à la marchandisation des biens et des services. Il incarne un projet collectif, un projet de société, qui place l'égalité en son cœur. Il nous appartient d'assurer aux citoyens un haut niveau de service public défini autour des principes d'égalité et de péréquation tarifaire, de continuité territoriale et d'égalité d'accès. Cela implique des positions claires. D'abord, pour assurer ces missions, mais aussi pour faire face à des investissements qui ne sont pas immédiatement rentables mais dont dépendent la sécurité des usagers, la continuité de l'approvisionnement ou le désenclavement des territoires isolés, il faut reconnaître que l'existence d'un secteur réservé au sein duquel le service public exerce son activité en monopole est nécessaire. Nous refusons donc l'extension de la concurrence en Europe dans ces secteurs, ainsi que l'ouverture du capital qui en découle. Les nombreuses entreprises publiques qui sont déjà soumises à concurrence devront faire l'objet d'un soutien ferme de la puissance publique pour financer les charges liées à leur mission d'intérêt général. Il s'agit clairement pour nous d'affronter les règles concurrentielles imposées par l'Europe et d'entrer avec force dans le débat qu'il convient de réouvrir sur les obligations de service public qui ne peuvent se limiter à un service universel devenu, à Bruxelles, un service minimum.

    Des missions clarifiées

    Cette position offensive nous conduit à considérer que s'agissant des services publics marchands, il importe de clarifier ce que la Nation considère devoir relever aujourd'hui d'une mission de service public assurant l'égalité d'accès aux biens et services fondamentaux à ses citoyens. Le développement des missions de service public peut amener au contraire la puissance publique à la prise ou à la reprise du contrôle sur des entreprises exerçant des missions fondamentales d'intérêt collectif. La distribution de l'eau pourrait avantageusement repasser sous la gestion des régies municipales, intercommunales ou régionales à l'occasion du renouvellement des concessions. Cette activité n'a pas à réinvestir ses profits dans la téléphonie ou des télévisions privées quand tant reste à faire pour qu'une eau de qualité soit accessible au prix le plus bas dans toute la France.

    Une politique industrielle

    Dans d'autres secteurs, sans dimension de service public, la présence de l'Etat au sein de certaines entreprises peut se justifier par le contrôle d'activités stratégiques ou la mise en œuvre de politiques industrielles (défense, aéronautique, espace). La puissance publique doit pouvoir donner l'élan, amorcer, par l'investissement public, l'essor d'un secteur d'avenir et y développer des alliances européennes. La présence de l'Etat au capital de ces entreprises peut varier, et les privatisations ou prises de participation doivent être soumises au contrôle du Parlement en veillant à préserver sa valeur au patrimoine public.

    Une évaluation parlementaire permanente

    Pour les entreprises dont l'Etat est actionnaire de façon majoritaire, une commission permanente de l'Assemblée nationale doit être chargée d'une mission d'évaluation permanente des stratégies de développement et d'un rapport public devant donner lieu à un débat annuel.

    Redonner le pouvoir aux citoyens

    Redonner aux citoyens du pouvoir sur l'amélioration des services publics est fondamental. Des contrats, conclus avec les élus et les associations d'usagers à l'échelle des agglomérations, des pays et des régions, définiront la présence publique. Des "conseils du service public" indépendants évalueront leur application à l'échelle régionale, ainsi que l'usage de l'argent public.

3- La lutte contre la fracture territoriale

    Quartiers ghettos des périphéries urbaines ou territoires ruraux les plus fragiles offrent deux visages comparables de l'exclusion: l'isolement que ne comble pas une offre de transport insuffisante, l'accès improbable à la culture, la dévitalisation du tissu économique, des services publics qui se désengagent.

    Pourtant, dans l'espace rural, beaucoup d'initiatives démontrent la possibilité d'inverser ces tendances à un moment où s'affirme la diversité des territoires: communes rurales périurbaines, territoires d'exode urbain investis par les néo-ruraux, ou à l'inverse zones plus isolées en difficulté chronique.

    La poursuite résolue des dynamiques de développement local, s'appuyant sur les communautés de communes et les pays ne sera à la hauteur de l'enjeu que si une volonté nationale s'exprime concrètement pour un maillage en services publics de proximité efficace (hôpitaux, éducation, sécurité). Pour affirmer ce maillage, l'Etat doit négocier avec les collectivités locales des "contrats territoriaux de services publics" de dix ans, qui permettront de stabiliser et de moderniser la présence publique. Ces contrats, généralisés sur l'ensemble du territoire, s'appuieront sur des maisons de services publics, sur des organisations en réseau (pour la santé, l'éducation).

    Dans le même souci de garder des régions rurales vivantes, deux actions prioritaires doivent soutenir le développement économique: la généralisation de l'Internet à haut débit, conçu comme un service public de base et la création de zones franches rurales compensant les coûts supplémentaires de la ruralité.

    Plus globalement, le développement solidaire des territoires doit être affiché comme un objectif prioritaire de la nation et trouver un engagement concret dans l'augmentation nette des péréquations en faveur des territoires urbains et ruraux en difficulté. Dans cette perspective, une politique vigoureuse de mixité sociale, d'accès au logement et de reconstruction des quartiers doit être proposée et budgétée dans la durée.

4- La République scolaire

    L'école républicaine...

    L'école doit être replacée au cœur de notre contrat politique. Les valeurs d'émancipation et d'intégration autour desquelles elle s'est construite sont d'une pleine actualité. Les fondateurs de la IIIème République pensaient que l'émergence d'une citoyenneté démocratique n'était possible que si elle s'appuyait sur la raison et le savoir. L'ennemi de la République était alors l'ignorance, et c'était sur cette ignorance du peuple que l'aristocratie et les pouvoirs de l'ancien régime avaient fondé et maintenu leurs dominations séculaires.

    La place accordée à la formation aux valeurs, à la réflexion et au raisonnement, doit être améliorée. L'école républicaine a pour mission de former une personne libre, capable de raisonner, de se former son jugement, de se déterminer par elle-même, et de s'arracher ainsi aux différents déterminismes, culturels, religieux, socio-économiques. Elle a aussi pour mission de former un citoyen responsable, qui connaît ses droits et ses devoirs, a le sens de l'intérêt général, peut s'exprimer et agir dans l'espace public.

    Les valeurs civiques de la laïcité doivent être enseignées précocement et sérieusement. En proposant au pays un projet éducatif, ambitieux et progressiste, les socialistes peuvent contribuer à redonner un sens collectif et une ambition démocratique à la société française. Pour nous, ce projet éducatif ne relève pas de choix pédagogiques mais d'abord de choix politiques. C'est cette méthode qui nous a manqué et qui a donné le tournis au monde enseignant, aux parents, comme aux élèves. La gauche, c'est l'école. La gauche n'a pas le droit de douter de son école et doit au contraire en permanence définir des objectifs qui prolongent et renouvellent la grande ambition républicaine éducative.

    Un effort important est à engager : afin d'assurer, autour de l'établissement scolaire, un temps péri-scolaire qui permette aux élèves d'avoir un accès plus égal aux loisirs, au sport et à la culture ; afin d'assurer, au sein des établissements le développement des emplois non enseignants (infirmières, documentalistes, personnels techniques) ; afin de renforcer les moyens accordés aux ZEP et d'en créer en zone rurale.

    ...et laïque

    La laïcité s'inscrit au cœur de la bataille culturelle contre le repli communautaire et l'enfermement de l'individu dans ses déterminants sociaux, éthiques et religieux. La reconquête républicaine, la réponse à la crise de la citoyenneté supposent de se battre pour les valeurs communes qui permettent de vivre ensemble.

    Chacun mesure à quel point l'idéal laïc constitue à la fois un recours contre les régressions qui nous menacent, les évolutions que nous ne savons pas maîtriser, les tentations toujours récurrentes, et un projet pour refonder un lien civique et un vouloir vivre ensemble. La séparation stricte de l'espace public et de l'espace privé, le respect de la liberté de conscience et des choix personnels, l'apprentissage du jugement par l'éducation et la reconnaissance de l'universel en chacun, l'affirmation d'une égalité de dignité de tout citoyen comme de toute personne sont des exigences qu'il nous appartient de faire revivre et de défendre au-delà même de nos frontières parce que la laïcité a une vocation universelle.

    Qualifier

    Il est important de réaffirmer l'objectif de 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat et de 100 % de jeunes dotés d'une qualification à la sortie du système éducatif. Cela veut dire aussi promouvoir les cultures techniques et professionnelles.

    A cet égard, nous devons sortir du débat stérile qui divise la gauche entre les partisans de l'instruction et ceux de l'éducation. L'école doit à la fois transmettre des savoirs et des valeurs et en avoir les moyens. Mais c'est l'apprentissage de la citoyenneté qui doit être la première étape. Pour nous, l'école n'a pas pour vocation première de former des médecins, sportifs, avocats, mathématiciens, cuisiniers, etc., aussi compétents soient-ils. Elle doit avant tout se donner l'objectif de former de futurs adultes et citoyens, responsables, autonomes et épanouis, possédant des compétences et une culture qui leur permettent de prendre toute leur place dans la société, tant sur le plan professionnel que personnel.

    A partir de là, l'objectif doit être qu'aucun jeune ne sorte de l'école sans qualification. Ils sont encore 60 000 par an aujourd'hui. Cela suppose de valoriser les filières technologiques et professionnelles, d'organiser mieux l'orientation et de garantir des passerelles à différents moments du parcours scolaire, de telle sorte que la qualification obtenue permette une requalification permanente.

    La réussite pour tous au collège

    Tous les moyens doivent être mobilisés pour permettre l'apprentissage des outils fondamentaux, tout particulièrement de la lecture et de l'écriture. Une attention particulière doit être portée aux premières années de l'école élémentaire et à l'articulation de celle-ci et du collège. De toutes parts, le collège craque. L'échec scolaire y est massif, la violence plus répandue qu'on veut bien le dire, les phénomènes de déscolarisation fréquents.

    On connaît l'influence de l'environnement familial, urbain, social sur la réussite des enfants. Or précisément à cause de la crise économique et sociale, cet environnement s'est dégradé pour beaucoup d'enfants. L'école n'arrive pas à pallier ces difficultés et le destin scolaire de ces enfants se dégrade. Il revient au service public de combler ces inégalités. Des systèmes de prise en charge précoces permettant de redonner une réalité à la promotion au mérite, doivent être institués de nouveau. On peut sur ce point citer deux exemples : celui des internats qui offrent des possibilités de prise en charge éducative soutenue pour éviter le décrochage de certains élèves. Celui des écoles ouvertes. Le soir, pendant les vacances, les jeunes sont encadrés par des adultes, formés pour les aider au travail scolaire, les initier au sport, à la musique ou aux arts plastiques. L'éducation républicaine est ainsi, au-delà des murs de l'école, une philosophie de l'action publique et le choix de toute une société. Il ne peut être question de faire, comme c'est le cas aujourd'hui, une croix sur une partie croissante de notre jeunesse.

    Évaluer le collège unique

    La réflexion actuelle sur le collège unique illustre les difficultés à concilier les grands principes de l'école républicaine avec les réalités du fonctionnement des établissements. Pour nous, il n'est pas question de démanteler le collège unique. Ce serait la meilleure manière de mettre à mal les fondations du système scolaire français. Pourtant il faut accepter de dépasser le débat simpliste sur " le pour ou contre le collège unique " et reconnaître que, dans certains établissements, la difficulté d'enseigner se conjugue à la difficulté d'apprendre. Les agressions contre des professeurs, l'ennui et l'absentéisme des élèves, le sentiment que les jeux sont faits dès l'entrée en sixième, tous ces symptômes traduisent la nécessité de ne pas se contenter d'une défense de principe mais d'un diagnostic établissement par établissement. C'est ce que nous préconisons : un inventaire concret de l'état et des difficultés du collège unique qui repose sur des informations, des analyses et un dialogue avec les acteurs de terrain.

    Dans le " collège unique ", s'est mise en place une sélection perverse qui vise des enfants et des adolescents qui comprennent très vite que l'école fait une croix sur eux. Le rétablissement d'une orientation précoce en 5ème est-il la solution ? Assurément, non. Il n'y a d'ailleurs rien d'étonnant à ce que la droite en fasse son cheval de bataille, car prétendre résoudre les problèmes actuels en débarrassant les collèges des trublions, c'est entériner de fait un renoncement au projet égalitaire de l'école républicaine. D'abord défendre le " collège unique " contre ceux qui l'attaquent et veulent le liquider, tel est notre premier devoir. Notre second devoir est d'y permettre la réussite de tous en rompant avec une uniformité qui entraîne exclusion et découragement.

    Un contrat d'autonomie pour la jeunesse

    Des systèmes de prise en charge précoce, permettant de redonner une réalité à la promotion au mérite, doivent être institués à nouveau. Ils devront permettre aussi d'orienter les jeunes qui en ont la capacité, à défaut d'en avoir les moyens, vers des filières aujourd'hui en difficulté de recrutement, comme les filières scientifiques.

    On connaît depuis longtemps l'influence de l'environnement social, familial, urbain, sur la réussite des enfants. Or, précisément à cause de la crise économique et sociale, cet environnement s'est détérioré pour beaucoup d'élèves. L'école n'arrive pas à pallier ces graves difficultés et le destin scolaire de ces enfants se dégrade. Il revient au service public de combler les inégalités péri-scolaires qui handicapent gravement les enfants. Pour remédier à ces problèmes, il est possible de généraliser l'expérience réussie des écoles ouvertes. Le soir, pendant les vacances, les jeunes sont encadrés par des adultes, formés pour les aider dans leur travail scolaire, les initier au sport, à la musique ou aux arts plastiques. L'internat d'excellence pédagogique peut être une solution efficace. Il offre des possibilités de prise en charge éducative soutenue pour éviter le décrochage d'enfants en proie à des difficultés sociales ou familiales lourdes.

    Les difficultés scolaires sont étroitement corrélées aux difficultés économiques et sociales. Aujourd'hui, des lycéennes et des lycéens sont contraints de travailler pour financer leur scolarité. C'est encore davantage le cas à l'Université où 800.000 étudiants se trouvent dans l'obligation de subvenir au moins partiellement à leurs besoins. C'est pourquoi un contrat autonomie pour la jeunesse doit être mis en place qui permette, sous conditions de ressources et en échange d'un projet de formation, d'assurer une égalité des chances réelle et une promotion républicaine.

    L'ambition de réussir le double pari de l'excellence et de la démocratisation doit maintenant donner tout son sens au pari de la massification réussi ces vingt dernières années. Cette exigence ne concerne pas que l'école. Parce que l'école doit rester le creuset de la nation, elle concerne la nation toute entière.

5- Une démocratie culturelle en actes

    C'est parce que la Culture englobe tout ce qui relie les hommes entre eux et au monde, et qu'elle donne un sens à nos vies individuelles et collectives, que nous la considérons comme un enjeu central de la transformation de la société. En effet, l'inégalité devant la culture provoque un dénuement aussi profond que le dénuement matériel ; c'est l'absence de perspectives qui enferme les citoyens dans leur condition en leur refusant tout accès à la vie sociale.

    La démocratisation culturelle n'a pas fini son œuvre. Il nous faut inventer de nouveaux outils pour établir la démocratie culturelle en actes : une action culturelle de proximité et l'accompagnement d'une multitude de projets singuliers à travers toute la France, participerait à la lutte contre la désertification rurale et la dramatique " ghettoïsation " des banlieues.

    A ce titre, les pouvoirs publics ont une responsabilité dans l'aide à l'éclosion de projets, de talents, et dans le soutien aux média locaux et aux petites entreprises culturelles souvent liées aux nouvelles technologies et riches en création d'emplois.

    Nous affirmons également l'importance d'un service public de la Culture fort qui doit se poser comme le garant de la liberté de création de plus en plus malmenée par une décentralisation sauvage et féodale.

    Nous voulons la relance et l'élargissement du plan des arts à l'école que la droite a détruit. Ainsi, par l'art et la culture, de la maternelle à l'université, notre jeunesse pourra se former aux outils de la pensée critique et de l'émancipation. Les citoyens éclairés par la diversité et le métissage culturels pourront faire des choix en conscience et s'inventer des repères et des valeurs que la société de consommation leur refuse. Réduire la fracture culturelle, c'est donner les moyens à chacun d'abandonner son état de citoyen consommateur passif pour celui de citoyen créateur et acteur de sa vie.

    Médias, le danger démocratique

    La télévision a acquis le pouvoir de tout se permettre à mesure que les exigences du profit s'aiguisent. télé-réalité, télé-poubelle, politique spectacle, sensationnalisme de l'information, omniprésence de la publicité : la télé effraie, embrigade, fascine.

    Nous voulons relancer une grande politique audiovisuelle fondée sur le renforcement d'une télévision de service public forte et influente et le principe " télévision publique financement public ". Cela implique la disparition de la publicité sur les chaînes publiques dont la programmation ne peut être dictée uniquement par l'audimat ni s'aligner sur celle du secteur privé. De même nous proposons que la publicité soit supprimée durant les programmes réservés à la jeunesse sur l'ensemble des chaînes hertziennes. Enfin, pour limiter la concentration de pouvoirs exorbitants dans les mains de certains groupes, nous proposerons l'adoption d'une loi anti-concentration qui limite le seuil de participation au capital des entreprises de communication. Cette loi devra interdire à un même groupe d'être actionnaire d'une entreprise de communication et d'entreprises dont l'essentiel du chiffre d'affaires relève de marchés publics.

    Éducation à l'image

    Dans une société d'images et du spectacle, les politiques culturelles et éducatives sont le dernier rempart de la démocratie. L'image est un langage. Celui qui n'en maîtrise pas les codes est manipulé. C'est pourquoi nous voulons nous emparer de ce chantier considérable qu'est l'éducation à l'image, dans l'esprit des grands mouvements d'éducation populaire.

    Une Europe de la culture contre la mondialisation libérale

    Du droit d'auteur à l'accès à la culture pour tous au travers des nouvelles technologies jusqu'aux futurs systèmes de financement du cinéma, l'Europe joue un rôle central.

    Notre place aux côtés des artistes dans leur lutte contre les abus du patronat comme on le voit actuellement pour les intermittents du spectacle, nous amène à proposer des solutions de long terme à travers un statut européen de l'artiste.

    Nous voulons qu'exception et pluralisme culturel soient inscrits dans la constitution européenne. De même que nous souhaitons la création d'une convention internationale sur la diversité culturelle, contraignante et indépendante de l'OMC.

    La concentration dans les industries culturelles tue les talents et les emplois et nous affirmons l'importance du rôle régulateur de l'Etat dans ce domaine, notamment par des lois anti-trusts (édition, media).

    Face une droite qui a entamé une entreprise de démolition de la culture

    Notre bataille politique est d'abord une bataille culturelle à mener en lien avec l'ensemble des acteurs culturels et des citoyens.

    La culture, la création et l'éducation sont les fondements de notre société, nous faisons le choix d'une politique d'investissement sur le long terme, avec un budget réellement accru, pour une culture qui éclaire la république et libère l'intelligence des citoyens.

6- Le fléau des discriminations

    Une lutte sans merci contre les discriminations

    La volonté républicaine d'intégration s'est heurtée ces dernières années à un obstacle qui remet en cause le principe fondamental d'égalité en droit et en dignité de tous les citoyens. Les discriminations dans l'accès à l'emploi, au logement ou aux loisirs dont sont notamment victimes les étranger(e)s ou les français(es) issus de l'immigration en raison de la consonance de leur nom, de leur quartier d'habitation, ou de leur couleur, n'ont fait qu'accroître les sentiments de défiance et de révolte à l'égard de notre modèle et de ses institutions.

    L'action du dernier gouvernement a incontestablement permis de mieux cerner ce phénomène trop longtemps resté invisible et tabou. Ainsi, en développant l'arsenal juridique et en travaillant avec les associations et les syndicats, il a été possible de faire émerger cette problématique au grand jour. Il n'en reste pas moins vrai que la création du Groupe d'Etude contre les Discriminations (GED), la mise en place du numéro vert 114, le lancement des CODAC ou la nouvelle répartition de la charge de la preuve au profit des victimes de discriminations étaient des étapes nécessaires mais pas suffisantes pour faire refluer durablement ce phénomène. La volonté affichée par l'ancien gouvernement et par le Parti socialiste (en particulier par Cécile Helle, secrétaire nationale aux droits de l'homme, qui s'est intéressée très tôt à cette question) s'est donc heurtée, là aussi, au sacro-saint principe de réalité.

    Cette première étape en appelle donc une seconde, résolument offensive et principalement articulée autour de l'octroi de moyens juridiques, humains et financiers conséquents au GELD, afin de lui permettre de surveiller la mise en application effective du droit à l'égalité dans le monde du travail, l'accès au logement ou la pratique de loisirs. Améliorer l'observation des discriminations, accumuler les témoignages, mieux connaître les mécanismes directs et indirects de discrimination, est utile. Il faut passer de l'émoi, du constat, de la prise de conscience à l'action. Une action déterminée, massive, brutale si nécessaire pour faire obstacle à ces atteintes inadmissibles à l'égalité des droits dans notre pays. Il faut traquer, dénoncer, punir et punir sévèrement.

    Dans le secteur privé, de trop nombreuses professions restent soumises à la condition de nationalité (certaines interdictions datant du XIXème siècle !) sans qu'aucun principe ne le justifie plus aujourd'hui : impossible donc pour un étranger ayant effectué et réussi brillamment toute sa scolarité en France de devenir expert-comptable, architecte ou dentiste !

    Il est cependant difficile à l'Etat d'exiger des employeurs privés de se montrer exemplaires alors qu'il ne montre pas lui-même l'exemple. Parmi les 5 millions d'emplois dans les entreprises publiques et les administrations encore fermés aux étrangers non-européens, combien relèvent réellement de l'exercice de la souveraineté de l'Etat ou de l'exercice des prérogatives de puissance publique ? La RATP a certes récemment montré la voie en décidant de ne plus réserver ses emplois aux seuls Français et ressortissants européens, mais les autres grandes entreprises publiques (EDF-GDF, Air France ou la SNCF par exemple) ne semblent pas pressées de lui emboîter le pas. La situation confine à l'hypocrisie lorsque l'Etat-employeur embauche dans les hôpitaux ou les collèges des étrangers comme contractuels pour leur faire effectuer le même travail que ses fonctionnaires, sans leur octroyer le même statut ! Au nom des principes de notre constitution, le Parti socialiste doit militer fermement pour la suppression de la " discrimination légale ", pour les emplois ne relevant pas de missions impliquant directement la souveraineté nationale.

    Au début de l'année 2002, le conseil d'Etat (arrêt Diop) jugeait discriminatoire et contraire à la convention européenne des droits de l'homme la "cristallisation" des pensions versées aux anciens combattants de nos anciennes colonies. Quel principe justifie encore que la pension d'un ancien combattant marocain ayant servi sous les drapeaux ne soit pas identique à celle touchée par un ancien compagnon d'armes français, ayant servi dans des conditions semblables. Cette inégalité marque la pérennité insupportable d'une conception coloniale de la contribution des peuples d'Afrique à la reconquête et la défense des territoires et intérêts français. Nous souhaitons donc une prise de position forte de notre parti pour exiger enfin une revalorisation des pensions pour les anciens combattants et anciens fonctionnaires civils ou militaires. Il convient de dénoncer vigoureusement les récentes mesures au rabais annoncées par le gouvernement Raffarin qui préconise une revalorisation en fonction du pouvoir d'achat du pays d'origine. Cette mesure ne répond toujours pas au principe d'égalité !

    L'Histoire et la Mémoire collective forment le ciment qui lie les histoires individuelles à une histoire collective. Aborder la question de l'Histoire et de la Mémoire collective, c'est entamer la discussion au sein de la société sur des événements parfois heureux mais plus souvent tragiques de l'histoire de la France et du Monde. Les évènements sont nombreux (1ère et 2ème guerres mondiales, guerres d'indépendances, répression des immigrés) sur lesquels un travail de Mémoire est nécessaire et sur lequel peut venir se greffer la construction d'une nouvelle culture commune. Les tranchées de Verdun n'ont-elles pas connues la Fraternité et la Solidarité de bourguignons, bretons, catalans, maghrébins, sénégalais et indochinois ? La France n'est-elle pas couverte de lieux où reposent chrétiens, musulmans, juifs ou athées morts pour la quête d'une cause commune : le respect de la Liberté, de l'Egalité et de la Fraternité. Hors de la condition de nationalité, voici ce qui peut faire écho dans les esprits, d'une reconnaissance à une communauté.

    Nous devons :

       Soutenir la création d'une autorité administrative indépendante dotée de moyens humains et financiers, chargée de lutter contre toutes les discriminations (sexisme, racisme, homophobie) et capable d'ester en justice.

       Demander l'arrêt de l'interdiction faite aux étrangers (en raison de critères anciens et désuets) d'exercer à leur compte des professions telles expert-comptable, dentiste ou architecte ! Faciliter la reconnaissance de diplômes étrangers.

       En finir avec la discrimination légale qui interdit aux étrangers non européens d'exercer un emploi dans les entreprises publiques ou les administrations ne relevant pas d'une prérogative de souveraineté nationale.

       Exiger la dé-cristallisation des pensions versées aux anciens combattants et anciens fonctionnaires civils ou militaires étrangers ayant servi sous les drapeaux.

       mettre en avant tous ce qui lie les différentes communautés et la France par le biais de différentes reconnaissances officielles.

       engager une réflexion sur le rôle de l'Education (scolaire et non-scolaire) dans sa mission de construction d'une culture commune.

    Encourager l'accès à la nationalité

    D'abord ouvrir très largement l'accès à la nationalité. Environ 150 000 étrangers deviennent français chaque année. Sur ce chiffre, près de 25 % sont des naturalisations d'enfants mineurs et près de 20 % des acquisitions par mariage. C'est dire la force du lien qui unit la France et l'immigration. Pourtant aujourd'hui un étranger sur trois devient français ; aux Etats Unis ou au Canada, ils sont deux sur trois. Le droit français de la nationalité théoriquement très ouvert conduit au terme de procédures administratives restrictives à octroyer cette nationalité au compte-gouttes. Il faut mettre en accord la lettre des textes et ces pratiques. Ceux qui résident en France doivent pouvoir devenir français s'ils le souhaitent. Il faut créer une Agence pour l'accès à la nationalité qui garantisse en toute indépendance le droit à devenir français. Cette acquisition de nationalité qui marque une vraie entrée dans la citoyenneté devra être rendue plus solennelle par une cérémonie républicaine marquant les droits et les devoirs que la société et l'individu se reconnaissent par cet acte.

    Il faut en finir enfin avec cette situation tragique qui conduit des sans papiers à n'être ni expulsables, ni régularisables. Une loi de régularisation, ainsi que la mise en place d'une nouvelle politique d'immigration légale et maîtrisable devrait permettre de sortir des ambiguïtés, des drames et des confusions qui perdurent. La double peine devra être abolie.

7- Pour un nouveau féminisme

    Un combat pour l'égalité

    Dans le monde, les femmes produisent 66% du travail, reçoivent 10% des richesses et en possèdent 1%. En France, 2 millions de femmes sont victimes de violences conjugales. Leurs salaires sont en moyenne inférieurs de 25% à ceux des hommes.

    Ces quelques chiffres sont une raison suffisante pour refonder l'idéal socialiste en affirmant sa dimension féministe. Il n'y a pas de pente naturelle vers l'égalité entre les sexes. Seul un volontarisme politique conscient de l'oppression spécifique des femmes peut emporter la bataille culturelle en faveur de l'égalité entre les sexes. Ce combat féministe nous concerne tous, hommes et femmes. Il est la traduction directe de l'idéal égalitaire qui porte les socialistes.

    Lionel Jospin a été le premier homme d'État à s'être défini féministe. Comme chef de gouvernement, il a consacré l'égalité dans les droits de la famille et des personnes et porté une loi fondatrice : la parité. Mais les fruits de ces révolutions se sont dilués, faute d'être relayés et portés par le Parti socialiste. La parité est devenue une politique de quotas, les circonscriptions femmes, le fonds de réserve des accords avec les partenaires, et le PS a préféré payer l'impôt femmes, comme les entreprises achètent le droit de polluer.

    Le changement majeur qu'a constitué depuis trente ans la progression du taux d'activité des femmes, qu'elles aient ou non des enfants, ne s'est pas accompagné d'une transformation de la société à la hauteur en terme de services publics, de droits de garde des enfants, de redéfinition des rôles entre les hommes et les femmes. Les femmes continuent à assurer plus de 80 % de la production domestique en plus de leur travail et de leurs autres activités. Une action publique multiforme est nécessaire pour assurer un équilibre dans les rôles remplis par les deux sexes, source d'égalité et d'épanouissement. Par une politique en faveur de l'égalité professionnelle qui se donne les moyens de réussir. Mais aussi par une politique familiale féministe et l'adaptation des services publics aux besoins nouveaux des parents. De réformes en réformes, la politique familiale n'a plus de sens collectif. Celle que nous proposons doit afficher son ambition : libérer les femmes de la double journée et de la double culpabilité qui freinent leur épanouissement et leur égal accès à l'emploi.

    Soutenir les parents

    Pour toutes, qu'elles vivent ou non seules, la prise en charge publique des modes de garde est la clef de voûte. Aujourd'hui, seulement 8 % des enfants sont gardés en crèche.

       La priorité doit aller aux modes d'accueil collectifs et obéir aux règles du service public, en particulier d'égalité d'accès des usagers et d'obligation de financement par les collectivités territoriales.

       Après la création du congé de naissance pour les pères, il faut avancer vers le congé parental et le congé d'éducation partagé. Nous optons pour l'extinction de l'APE qui n'est qu'un salaire maternel déguisé.

       L'imposition séparée est indispensable à la mise en œuvre d'une politique égalitaire d'accès au travail et aux revenus.

    Une loi anti-sexiste...

    Qu'elles soient célibataires ou en couple, au travail, au chômage ou au foyer, au minimum vieillesse ou à l'allocation de parent isolé, les femmes sont victimes de discriminations spécifiques et toujours sujettes à des humiliation inhérentes à leur sexe. La loi antisexiste tant attendue doit enfin être déposée, et faire l'objet d'une campagne de masse du Parti socialiste. Cette loi doit s'articuler avec les dispositifs prévus en matière de harcèlement moral et de discriminations au travail.

    La régression qu'expriment les jeunes filles les plus exposées au machisme, aux phénomènes de bande et à la violence est la partie émergée de la domination masculine. Sommées de choisir entre l'enfermement et l'humiliation, elles sont progressivement exclues de l'espace public, renvoyées à la préhistoire des femmes.

    ...et un combat culturel

    C'est avant tout une bataille culturelle qu'il faut mener, et dans les quartiers populaires, il faut la conduire avec des moyens et des objectifs clairs : les politiques sociales, associatives et éducatives dans les quartiers doivent être prioritairement orientées vers les filles pour les soutenir. Les politiques de prévention doivent avoir comme première perspective d'enseigner aux garçons une autre image positive d'eux mêmes que celle de la violence machiste et du mépris. L'égalité entre les hommes et les femmes est une idée laïque, contraire à l'ensemble des religions qui doivent évoluer et la vigilance par rapport à la laïcité est une dimension indissociable du féminisme.

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VI/ Inventer
un Nouveau Parti socialiste

 
Alors même que notre candidat Lionel Jospin a choisi de se retirer de l'action politique, la direction du parti entend tirer un trait sur le 21 avril en choisissant, une fois de plus, de nier ses propres responsabilités, comme si rien ne s'était passé, comme si les militants n'exprimaient pas fortement et amèrement un désir de changement profond du Parti, de son fonctionnement, de ses pratiques.

Une seule solution s'impose : un congrès constituant, des mesures précises et concrètes, applicables après ratification par un vote de tous les militants immédiatement après le Congrès.

C'est la seule voie qui permettra de traduire les paroles en actes et d'appliquer immédiatement nos décisions. Il n'y a pas de temps à perdre !

Il s'agit donc de nous donner maintenant les moyens d'un véritable sursaut. D'abord, en retrouvant notre lucidité sans nous mentir à nous-mêmes à propos des causes de la défaite. Ensuite, en renouant avec la tradition d'imagination et de débat des socialistes pour nous redoter d'un projet neuf, ancré dans la réalité et qui affiche fièrement nos valeurs. Enfin, en travaillant concrètement à la mise sur pied d'une nouvelle stratégie de rassemblement de la gauche.

Cette ambitieuse feuille de route nécessite un outil militant capable de la mettre en musique : c'est un nouveau Parti socialiste. C'est un parti populaire, c'est un parti de masse, c'est un parti fortement féminisé, rajeuni, offensif et qui évolue immergé dans la société, parce qu'il lui ressemble. C'est un parti de militants en campagne permanente, c'est un parti démocratique, au fonctionnement complètement réformé.

Pour transformer la société, il nous faut d'abord être capables de nous transformer nous-mêmes.

1- Le Parti de tous ses militants

    C'est par des mesures concrètes permettant de placer le militant au cœur du parti, de l'élaboration de sa ligne politique, de son action, de sa politique volontariste, de sélection des cadres et des élus, que l'on répondra réellement à l'aspiration des militants qui ne se sentent plus assez représentés par les dirigeants.

    Une base sociale qui s'effondre, des militants pas écoutés

    Le 21 avril a été l'expression tumultueuse de notre décrochage d'avec les couches populaires, mais les chiffres de notre sociologie militante étaient déjà là pour nous alerter : 3 % d'ouvriers, 3 % de chômeurs et d'exclus. C'est bien parce que notre parti veut toujours représenter les aspirations de tous ceux qui ont intérêt à la transformation sociale pour vivre et pour créer, qui ne se satisfont pas de l'ordre libéral existant, que nous devons être un parti populaire, anti-thèse des partis populistes qui flattent tout ce qu'il y a de plus conservateur dans les valeurs et les structures du monde ancien. Mais un parti populaire n'est pas seulement un parti qui agit pour les couches populaires. C'est un parti qui agit avec elles. Notre parti est aussi vieillissant. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 70 % de plus de 50 ans, 5 % de moins de 30 ans. Par ailleurs, l'avancée en ce qui concerne la parité femmes-hommes dans les textes législatifs ne s'est pas traduite suffisamment dans notre vie commune : moins de femmes aux législatives en 2002 qu'aux législatives 1997 ! Les camarades victimes des discriminations ou vivant dans les quartiers populaires restent trop marginalisés et trop peu visibles. Nous nous sommes éloignés progressivement du mouvement social, syndical et associatif, et nous avons fini par perdre leur confiance.

    Nous devons résolument changer cet état des faits et prendre ensemble un nouveau départ.

    Notre Parti doit réapprendre à valoriser la voie de l'ascenseur militant, en incitant à la prise de responsabilité des militants, en permettant à tous, quelque soit l'origine sociale, géographique, culturelle, d'être un jour en position de responsabilités dans notre Parti.

    Nous avons toujours besoin de la force du témoignage et du vécu. Nous avons besoin de cette proximité là pour réapprendre le poids des mots et l'urgence de l'action, et pour mettre de l'humanité dans ce que nous sommes, dans notre projet comme dans notre communication.

    Une adhésion moins chère, et plus facile

    Commençons par le commencement : l'acte d'adhésion. Il faut en finir avec le parcours du combattant qui décourage les plus décidés à nous rejoindre. Notre parti doit être ouvert et l'adhésion grandement facilitée. Elle devra faire l'objet d'un barème national de cotisation, avec un seuil minimal abaissé, cotisation de laquelle pourra être déduite celles versées aux autres organisations du secteur syndical ou associatif. Que ce soit par la voie nationale, fédérale ou locale, on doit pouvoir adhérer rapidement sans rencontrer d'obstacle.

    Permettre l'accès de tous aux responsabilités

    Le nouveau Parti socialiste donnera toute leur place aux femmes, ainsi qu'aux catégories actuellement sous-représentées, en particulier les militants issus de l'immigration ou originaires de l'outre-mer, dont l'accès aux responsabilités doit être facilitée. Nous devons favoriser en notre sein ceux que la société sait si bien écarter naturellement. En ce sens, nous devons adopter une politique de discrimination positive à l'égard de ces militants, afin de ne pas reproduire dans nos instances ce que nous dénonçons dans la société.

    Instaurer la limitation du cumul des responsabilités dans le Parti

    A l'image de nos propositions institutionnelles, nous souhaitons que la prise de responsabilités dans le parti fasse l'objet de règles internes garantissant l'accès le plus large possible de tous les militants aux postes de responsabilités dans le Parti.

    Les responsabilités dans le parti doivent cesser d'être monopolisées ad vitam aeternam par des dirigeants par ailleurs souvent titulaires de mandats électifs. Le cumul dans le temps des responsabilités dans le Parti, mais aussi le cumul, souvent simultané, avec des mandats électifs d'exécutifs, tuent le débat dans le Parti et découragent les meilleures volontés militantes. Comment, lorsqu'on est militant, prendre la parole contre des arrêtés municipaux (anti-mendicité, anti-prostitution, par exemple) lorsque le secrétaire de section est le maire qui a signé ces arrêtés ?

    En effet, les intérêts des élus et ceux du débat militant peuvent diverger. Si l'on ne parle pas, ou peu, dans le Parti de ce qui fâche dans la population, c'est que les sujets électoralement sensibles pèsent sur les élus en responsabilité, par ailleurs trop souvent responsables de l'animation du Parti. Nous proposons donc :

       De limiter à 3 mandats successifs l'exercice de responsabilités dans le Parti (secrétaire de section, premier secrétaire, membres des instances fédérales et nationales)

       De rendre incompatibles certains cumuls à l'interne : maire ou membre d'un exécutif de Conseil Général, et secrétaire de section ; président de conseil général, président de conseil régional et premier secrétaire fédéral.

    Par ailleurs, le parti devrait s'appliquer le plus rapidement possible le non-cumul qu'il préconise dans la loi :

       mandat unique de parlementaire
       non-cumul de deux exécutifs locaux,
       non-cumul dans le temps : pas plus de 3 mandats électifs identiques successifs

    Associer d'autres militantismes

    Nous devons aussi nous doter d'une multitude d'organismes associés qui permettraient à des femmes et des hommes qui ne souhaitent pas, dans un premier temps, adhérer et préfèrent un militantisme thématique ou sectoriel, de militer avec nous pour des causes qui nous sont proches et relèvent de choix et d'engagements liés à nos valeurs. Rien n'explique que des causes comme celles de la lutte contre la pauvreté, pour l'alphabétisation ou le développement de l'économie solidaire, l'action dans les quartiers ne donne pas lieu à des structurations permettant aux militants et aux sympathisants socialistes de s'engager dans la vie de la cité autrement que par le seul engagement dans les campagnes électorales.

    De plus, le PS doit se doter d'un secteur "entreprises" efficace. Il doit avoir les moyens de travailler efficacement, d'organiser des passerelles concrètes avec les syndicats et de revitaliser le militantisme dans l'entreprise. C'est un des chemins les plus courts pour réancrer notre parti dans le monde du travail. Pour impulser cette dynamique et qu'elle ne soit pas artificielle, il nous faut pas à pas reconstruire des sections d'entreprises localement. Elles pourraient notamment s'implanter sur des zones d'activités industrielles et commerciales, communales ou d'agglomération, qui regrouperaient des secteurs d'activités divers.

    Une charte éthique pour des élus exemplaires !

    Il est temps aussi de se doter d'une charte éthique qui engagerait chaque candidat ou élu investi par notre parti ! Il n'est plus admissible que certains de nos élus se sentent déchargés de toute responsabilité vis à vis de leur parti une fois qu'ils sont élus. Lors de sa candidature à la candidature, il est indispensable que chaque membre du parti s'engage à respecter un certain nombre de valeurs et de devoirs.

    Éclairer la délibération militante

    Enfin, nous devons réhabiliter la nécessité de la formation politique. Pour beaucoup par le passé le Parti socialiste fut un véritable mouvement d'éducation populaire permettant l'émergence d'élus et de cadres compétents issus de toutes les classes sociales. Chaque section, chaque fédération devrait activer des lieux de formation pour tous les adhérents. A cet effet, le nouveau Parti socialiste se dotera d'un secteur formation renforcé. Quatre fois par an, dans chaque fédération, doit être organisée une demie journée de formation sur une grande question ouverte à tous les militants. Animée par le secrétaire fédéral à la formation, cette demie journée doit se construire sur la base de documents écrits réunis dans un dossier préparé par le national et permettant l'accès aux données factuelles ainsi qu'aux différents points de vue. Ce document doit être avalisé par le Comité économique et social. Aucune consultation nationale des militants ne peut être organisée sans qu'un cahier de ce type ne soit proposé aux militants. Autant que faire se peut, les thèmes de ces demie journées doivent correspondre aux débats en cours au sein des commissions du Conseil national.

    Un Parti d'action militante

    Mais pour changer le visage du parti, il faut que le parti donne une autre image de lui. Il doit prouver son utilité concrète, au pouvoir, comme dans l'opposition. C'est par une action militante quotidienne qu'il parviendra à faire progresser nos idées et nos projets dans la société et ainsi redevenir attractif. L'envie d'adhérer au PS doit pouvoir venir à tout moment et pas simplement lorsque nous sommes au bord du gouffre. Pour cela, le nouveau Parti socialiste ne doit pas se satisfaire d'être un parti de campagne électorale. Il doit conduire des campagnes politiques en dehors des échéances électorales, seul ou avec d'autres, sur des grands thèmes présents dans le débat public. Nous proposons d'organiser concrètement cette volonté en prévoyant quatre grandes campagnes nationales par an, avec le matériel afférant bien sûr, qui ne peut plus être "le tract à découper soi-même en dernière de couverture de l'hebdo" car chaque militant sait bien que pour diffuser des tracts, il en faut plus qu'un! Nous devons discuter en CN d'un budget pour nos campagnes, dont le financement pourrait être partagé entre le national et les fédérations : élaborer un budget, c'est se contraindre à faire.

    Des outils de communication modernes

    Le nouveau Parti socialiste se dotera d'un journal à parution hebdomadaire, à vocation externe et tout entier tourné vers le travail de conviction. Il doit nous permettre d'aller au-devant de nos concitoyens, de nouer le dialogue avec eux de façon continue, de faire connaître nos positions et de faire vivre les sections autour d'actions concrètes de proximité. Il faut s'éviter d'entendre, comme à chaque fois, cette phrase terrible que nous avons tous reçue en pleine face : "on ne vous voit que pendant les élections". L'actuel hebdo, qui a une vocation interne, pourrait être avantageusement remplacé par des circulaires destinées aux militants qui manquent souvent d'informations concrètes.

    Internet doit devenir un véritable outil de transversalité, de transparence des débats, d'échanges entre les militants. Dans un délai de trois ans, chaque militant recevra en même temps que sa carte une adresse électronique lui permettant de recevoir en temps réel toutes les informations de sa section, de sa fédération et de la direction nationale, et de participer aux débats militants transversaux du parti.

2- Renforcer notre démocratie représentative, créer une vraie démocratie participative

    Ces mutations ne peuvent aboutir que si, parallèlement, notre parti se démocratise en profondeur.

    La pétition d'initiative militante

    En réalité il est démagogique d'opposer la représentation de la base à la représentation des courants.

    La démocratie jusqu'au bout ". C'est ainsi que Jean Jaurès définissait le socialisme. C'est ainsi que nous devons concevoir le fonctionnement de notre Parti. Nous devons être cohérent avec nous-mêmes. Ce pour quoi nous militons à l'extérieur du Parti, nous devons avant tout l'appliquer à nous-mêmes.

    La démocratie participative est l'un des objectifs que nous tentons de défendre et d'appliquer au sein de la société. Il est donc de notre devoir, à l'intérieur du parti, d'imaginer des réformes qui permettent à la démocratie participative de renforcer notre démocratie représentative.

    Ainsi, toute pétition signée par 5000 militants, émanant d'au moins 20 départements, devrait permettre d'inscrire à l'ordre du jour du Conseil National, le Parlement du Parti, une question à débattre et trancher.

    Toute pétition militante d'au moins 15 000 signatures et d'au moins 30 départements peut ouvrir l'inscription d'une question au vote direct des militants. Localement aussi, ce droit de pétition doit pouvoir s'exercer. Il n'existe pas de vraie démocratie si elle ne trouve pas de déclinaison de proximité.

    Nous proposons donc de favoriser la discussion, le débat et la confrontation d'idées démocratiques dans le parti. A l'image de ce qu'a fait Lionel Jospin entre 1995 et 1997, deux conventions annuelles, avec vote des militants, devront être organisées. Ces conventions rassembleront des délégués élus dans les fédérations mais nous proposons aussi que tous les secrétaires de section puissent y participer.

    Des instances nationales profondément réformées :
    Un vote transparent pour les représentants des motions


    Les militants ont le droit de connaître le nom de ceux qui les représenteront, au nom des motions, dans les instances du Parti. Il s'agit là d'un principe démocratique de base que nous devons appliquer sans attendre.

    Dans le cadre du Congrès, les motions, intégralement paritaires, doivent être soumises au vote des militants en présentant de façon ordonnée les différents représentants qui seront les leurs dans les instances nationales et fédérales. Ainsi l'ensemble de nos dirigeants serait élu au suffrage universel des militants et non plus par cooptation. De même les militants pourront s'assurer, sans mettre en place des quotas, que les différents critères de renouvellement et de diversité seront respectés.

    Un Conseil national utile et actif

    Le Conseil national doit retrouver la place centrale qui devait être la sienne comme Parlement du Parti. Actuellement, il se réunit trop rarement. Nos responsables y interviennent de 11H à 12H pour tenter d'être repris au journal de 13H, en oubliant d'être présent l'après-midi pour écouter ce qu'on à dire les membres moins illustres de cette instance. A ce titre, il est souvent l'illustration du mépris de notre Direction pour l'expression collective des militants. Nous proposons donc une série de mesure pour transformer ce théâtre de jeux de rôles factices en véritable parlement du Parti. Un parlement avec de véritables pouvoirs. Un parlement qui interpelle, interroge et propose.

    Le conseil national doit donc se réunir au moins quatre fois par an pour une journée entière et être organisé en commissions permanentes sous la responsabilité d'un secrétaire national. Tous les membres du Conseil national doivent appartenir à une Commission. Les Commissions doivent siéger en dehors des réunions du Conseil national et préparer ses débats et ses travaux.

    Le Conseil national doit trancher par des votes les questions d'orientation. Toute orientation qui n'a pas donné lieu à un vote doit être considérée comme n'étant pas tranchée. Chaque réunion du Conseil national doit inscrire à son ordre du jour au moins une question d'orientation.

    Un Conseil national fort, et ouvert sur le parti

    A la demande des deux tiers du Conseil national, les questions à trancher peuvent être renvoyées à une consultation militante.

    Un tiers de premiers secrétaires élus par les militants au CN ! Le Conseil national sera composé pour deux tiers des membres élus au Congrès à la proportionnelle des motions et pour un tiers de représentants élus directement par les militants. Ceux-ci seront élus par les militant dans les fédérations sous la forme " ticket homme / femme " composé du ou de la Premier Secrétaire Fédéral(e) accompagné d'un(e) suppléant(e) qui sera dans la liste complémentaire du CN.

    Le Conseil national doit être impérativement renouvelé d'un tiers de ses membres à chaque congrès. Ses membres ne peuvent pas effectuer plus de trois mandats successifs.

    Les Commissions nationales seront ouvertes aux parlementaires qui en font la demande ainsi qu'aux secrétaires des unions régionales et à une représentation des secrétaires de section élus par leurs pairs sur la base d'un secrétaire par département.

    Sauf problème particulier, tout membre de commission permanente ou du Conseil national cumulant plus de trois absences entre deux Congrès est automatiquement remplacé.

    Les débats du Conseil national, ainsi que ceux du Bureau national et des commissions des résolutions des Conventions et des Congrès seront intégralement retranscrits et communiqués aux adhérents, ainsi d'ailleurs que les rapports des commissions et les avis du Comité économique et social servant de base aux travaux.

    Relancer le Comité Économique et Social

    Le Parti socialiste n'est pas assez en phase avec le mouvement social et les syndicats. Un comité économique et social a été créé sous l'impulsion de Lionel Jospin. Composé pourtant de personnalités de qualité, celui-ci n'a pas vu ses travaux suffisamment pris en compte et a rarement été sollicité. Les commissions du Conseil National devront obligatoirement saisir le comité économique et social pour avis.

    Par ailleurs, ce dernier disposera d'un droit de saisine qui lui permettra d'inscrire à l'examen d'une commission une question lui semblant devoir être traitée. Composé pour un tiers de personnalités désignées par le secrétariat national, avec l'accord du Bureau National, les deux tiers restants étant nommés par les associations et les syndicats, il disposera des moyens matériels et humains permettant d'assurer ses fonctions.

    Un exécutif efficace

    Le Premier secrétaire national devra se soumettre au vote des militants avec son secrétariat national, connu et présenté par avance. Les secrétaires nationaux doivent être issus du Bureau National. Leur nombre ne peut excéder quinze. Ils doivent se réunir de façon hebdomadaire, avant le Bureau National, et en préparer les décisions et les communiqués. Il est du rôle du Bureau National de trancher les débats par des votes.

    Les échanges entre les sections et les fédérations doivent être facilités pour mutualiser les actions et les idées. A cet effet, la Fnesr doit devenir un lieu de ressources, d'échange de savoirs et de savoirs faire. La Fnesr doit aussi se mettre au service des militants. Il s'agit de constituer une véritable banque de données synthétiques des programmes et expérimentations sur le terrain des solidarités sociales, des associations, de l'urbanisme, des territoires.

    Les statuts de notre parti doivent mieux prendre en compte les réalités politiques et sociales des outre-mers. Ainsi, le débat local sur l'avenir des collectivités, sur le mode de développement tient une place particulière. Une place devra être faite dans les instances fédérales à la représentation des orientations locales.

3- Une coalition arc-en-ciel

    Nous faisons et assumons le choix de construire une alternative à la culture et au système libéral dominant. Cette alternative politique, dont nous avons dégagé les grands axes, nécessite aujourd'hui une orchestration originale et innovante, une mise en mouvement et un véritable esprit de mobilisation. Nous voulons engager le Parti socialiste dans le mouvement d'une contre culture et la conquête de nouveaux champs d'action militants.

    Ce choix ne peut être celui des accords d'appareils que nous avons trop connus lors des dernières années entre les partenaires de la gauche plurielle. Nos alliés sont affaiblis et ont besoin aussi de se redéfinir. Ce qui est attendu de nous, c'est un mouvement plus vaste et plus profond, qui excède largement le poids si faible des appareils et leurs intérêts trop particuliers, souvent déconnectés des attentes des citoyennes et des citoyens de gauche. Nous devons construire des convergences concrètes avec tous, c'est-à-dire avec nos partenaires politiques, mais aussi avec les associations, les syndicats, les citoyennes et les citoyens qui souhaitent s'impliquer dans la vie publique.

    Les états généraux de la transformation sociale

    L'union de la gauche et le dépassement de toutes les formations existantes ne peut se décréter. Ces convergences concrètes doivent se construire dans la mobilisation contre la droite, mais aussi dans les luttes et les batailles que nous devons mener pour transformer la société. Dans ce cadre, nous n'avons à craindre personne et personne ne doit être exclu. Des états généraux de la transformation sociale doivent être lancés immédiatement après notre Congrès avec tous ceux qui voudront s'y associer. Ils ne peuvent ni ne doivent être une initiative du seul Parti socialiste ou des seules formations politiques. Nous devons travailler à rendre cette initiative possible. Elle devra permettre des confrontations et des débats approfondis, déboucher sur des actions communes.

    A l'issue de ces états généraux qui pourront durer jusqu'à la fin de l'année 2003, une coalition arc en ciel devra être créée avec tous ceux qui partagent des objectifs communs. Dans cette coalition, le poids des associations et des syndicats devra être important. Dans le respect des identités de chacun et du poids des traditions, nous devons tenter ainsi de dépasser les impasses héritées de la Charte d'Amiens et du comportement malthusien de partis politiques refermés sur leurs objectifs électoraux. Le but doit être de rendre possible l'émergence d'une coalition arc en ciel dans laquelle toute la gauche, celle du mouvement syndical, des associations, des différentes sensibilités politiques puissent se reconnaître et construire ensemble une alternative à la société de marché.

    Pour un PSE plus socialiste et plus européen

    10 millions d'Européens ont manifesté ensemble contre la guerre en Irak le 15 février 2003, appuyons nous sur cette dynamique pour donner sens et projet européen. Nous sommes prêts à nous mobiliser pour que le PSE soit un vrai parti politique, un parti de débat et d'action. Pour cela, il est indispensable que son orientation soit définie par les militants sur la base de motions transnationales. Le PSE ne doit plus être le cartel des partis socialistes européens, il doit se démocratiser et se politiser. Dans cet esprit, le PSE doit être en capacité de proposer aux autres forces politiques de gauche et au mouvement social européen l'organisation d'assises de la transformation sociale. Investissons le champ politique et social européen trop longtemps abandonné aux technocrates et géré sur la base de petits consensus entre nations et entre socialistes et conservateurs. Nous voulons donner du mouvement et des couleurs à l'Europe, nous voulons préparer, avec les partis de gauche, la Confédération européenne des syndicats et les mouvements associatifs et militants, les élections de 2004.

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Conclusion

 
Le monde vacille. L'Europe est en crise. La France redécouvre le chômage. L'étreinte étouffante de la peur du lendemain saisit les français.

Alors qu'une droite hégémonique ne semble avoir d'autre projet que d'imposer à la France les triomphes d'un libéralisme sans vergogne, les derniers reculs par la remise en cause du droit du travail, l'abandon des grandes priorités à l'éducation et à la solidarité, la marchandisation de la santé et un ordre sécuritaire brutal, il est urgent que la gauche, et en son cœur le Parti socialiste, retrouve sa fierté, sa force, son unité.

Lula, élu président de la République Brésilienne rappelait " je n'ai pas été élu par une chaîne de télévision, ni par l'élite économique, ni même grâce à ma propre intelligence mais par la conscience politique du peuple brésilien ". Quel meilleur dessein pour les socialistes français que celui là. L'alternance politique à laquelle nous aspirons ne peux pas être le résultat d'un miraculeux concours de circonstances. La mission fondamentale des socialistes consiste à forger la conscience politique nouvelle des citoyens de France. Nous voulons renouer avec une perspective de changement dont le peuple soit l'allié et le moteur.

A choisir, nous préférons forcer le destin plutôt que d'attendre que celui-ci nous sourit. Cela ne pourra se faire qu'à condition de répondre aux attentes de nos concitoyens et de marquer avec vigueur que nous avons entendu le message exprimé avec violence et fureur le 21 avril. Cela ne pourra se faire que si nous assumons, en rupture avec nos orientations et nos pratiques passées, de véritables remises en cause et si nous sommes capables de nous engager dans l'avenir avec détermination, courage et lucidité.

Toute tentation de repli sur soi, toute velléité d'immobilisme, toute volonté de faire persister l'ancien ne pourraient que décourager celles et ceux qui nous ont déjà rejoint ou celles et ceux qui n'attendent qu'un signe pour s'engager à nos côtés dans l'œuvre de redressement et de reconquête qui s'impose.

Loin des querelles subalternes, affranchis des arrières pensées et des allégeances qui nous font collectivement tant de tort ; telle est la voie que nous avons choisie et l'attitude à laquelle nous entendons nous tenir.

Avec pour seul projet la renaissance de la gauche et l'alternative à la droite, avec pour seule volonté de faire vivre nos valeurs et notre idéal.

Pour cela, nous avons besoin de vous. De votre ardeur et de votre courage. De votre intransigeance et de votre générosité. Le Parti socialiste doit écrire maintenant un nouveau chapitre de sa déjà belle et longue histoire. Cela ne se fera pas en un jour. Mais cela doit commencer demain. A Dijon. Tous ensemble.

 I/ Combattre la mondialisation libérale
II/ Renouer avec l'éxigence sociale
III/ Fonder la République nouvelle
IV/ Retrouver les outils de l'égalité
V/ Inventer un Nouveau Parti socialiste

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