Pour le moment,
le débat d'idées n'existe pas



Entretien avec Julien Dray, cofondateur du Nouveau Parti socialiste.

Paru dans Le Monde daté du 22 novembre 2002
Propos recueillis par Isabelle Mandraud


 

François Hollande annonce François Hollande annonce qu'il présentera, seul, une contribution pour préparer le prochain congrès du PS. Cela vous surprend-il ?
Pas du tout. Il me l'avait dit depuis cinq mois, dès cet été. Il sent bien qu'il y a une pression de plus en plus forte pour éviter un rassemblement fourre-tout où il y aurait à boire et à manger pour tout le monde. Cela pourrait très mal tourner au congrès. François veut donc donner le sentiment que le rassemblement se fera autour de lui. Il lâche une soupape.

Selon vous, tous les leaders socialistes doivent donc déposer leur propre contribution ?
Si Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn ne le font pas, alors la démarche de François n'aura été qu'un pas de deux, un marché de dupes. La phase des contributions, c'est un peu comme l'échauffement avant le match. Mais la vraie question c'est : avec qui compte-t-il former son " axe majoritaire " ?

Vous reconnaissez-vous dans les " impatients " et les " bruyants " que décrit le premier secrétaire ?
Je reconnais que moi-même, Arnaud [Montebourg] et Vincent [Peillon], nous aimons bien le bruit. Pas le tapage. La préparation d'un congrès comme celui-ci donne forcément lieu à un échange d'idées, à des confrontations, et c'est tant mieux. Les congrès silencieux, il vaut mieux s'en méfier : cela signifie que tout se passe dans les arrière-cuisines.

Cela dit, François Hollande ne révèle rien du contenu de ses propositions, sur le fond, pour un " réformisme de gauche "...
Il y a les têtes de chapitre, sur la mondialisation, l'immigration, le social ou l'éducation, c'est tout. Le débat d'idées, pour le moment, n'existe pas beaucoup, en dehors des actes de contrition que tout le monde s'évertue à exprimer sur la défaite que nous avons vécue.

Vous-même, pour quelles raisons vous êtes-vous détourné du futur axe majoritaire ?
Je l'ai fait à partir du moment où je n'ai pas obtenu du premier secrétaire les réponses que j'attendais et que j'ai vu se dessiner le spectre d'un texte de rassemblement fourre-tout. Si cela signifie que l'on rassemble dans un même mouvement ceux qui ont défendu la hausse du smic et ceux qui ont imposé la prime pour l'emploi ou l'allègement de la fiscalité sur les stock-options, ça ne va pas. J'attendais qu'il fixe la ligne jaune. Il ne l'a pas fait.

Lors du dernier bureau national, Pierre Mauroy s'en est pris à Arnaud Montebourg sur le thème de l'unité du parti... Comment réagissez-vous ?
J'étais présent à cette réunion. Il m'a semblé qu'au-delà d'Arnaud, le message de Mauroy était plutôt destiné à Martine Aubry et à Marc Dolez [premier secrétaire de la fédération socialiste du Nord]. Il peut y avoir, ici et là, quelques excès verbaux. Mais les débats qui agitent aujourd'hui le PS se retrouvent aussi chez les socialistes italiens ou espagnols. Ce dont je ne veux surtout pas, c'est que l'on personnalise trop les débats pour aboutir à une chasse à l'homme.

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