Réorienter la ligne politique du Parti

Henri Emmanuelli
Intervention de Henri Emmanuelli, député des Landes, lors du Conseil national du Parti socialiste du 17 septembre 2005.


 
Chers camarades, je vais être assez rapide, et j’ai demandé à Cambadélis, qui va me rendre ce petit service, de me faire signe assez rapidement.

Je suis rassuré, mes chers camarades, je suis rassuré de notre unanimité pour condamner la politique de la droite et dire que la situation est grave. Ah, c’est déjà un point important.

Nous faisons ce constat, effectivement tous, que non seulement elle échoue, et je ne vais pas répéter ce qu’a dit François, ce qu’a dit Laurent, ce qu’ont dit les autres, c’est inutile qu’on fasse le moulin à prières là-dessus, mais simplement attirer votre attention qu’en humble avis la droite a changé de braqué dans ce pays. Ce n’est pas la première fois que la droite gouverne, dans les interstices de pouvoir que nous lui laissons, mais il est évident qu’on est passé aujourd’hui d’une droite qui était avant toujours balancée entre une certaine forme de colbertisme et de libéralisme, à une droite aujourd’hui qui joue son va-tout parce qu’elle n’a plus de légitimité politique, parce qu’elle est obligée de contester à la fois le mouvement social, mais aussi les résultats électoraux, qui joue sont va-tout en essayant d’imposer dans ce pays un modèle qui ressemble davantage au modèle néo-conservateur américain qu’à celui auquel nous étions habitués, y compris d’elle. M. Sarkozy se prend pour un concepteur, en réalité il n’est qu’un importateur et va chercher outre-Atlantique les bases d’un modèle de société que nous savons toutes et tous profondément rejeté par la population française.

Deuxième point, Et je crois qu’on veille à cela parce que vous avez toutes et tous constaté la capacité et l’habileté de mensonge et d’habillage de ce gouvernement qui est capable d’essayer de faire croire à ce pays qu’il réhabilite le travail alors que 85 % de la population active voit son pouvoir d’achat qui recule. Nous sommes dans un pays où on réhabilite le travail, mais où la spéculation est ignorée alors que le pouvoir d’achat de ceux qui travaillent recule. Nous sommes un pays où on réhabiliterait le travail mais où les conditions de travail de la plupart de l’immensité des salariés se dégradent. Mensonge ! Mais ils sont habiles dans cette façon de faire.

Deuxième point… Excusez-moi de passer d’un point à l’autre en négligeant les liaisons. François disait tout à l’heure, et il a raison : « Il faut dépasser le clivage qui nous a séparés. » C’est l’intérêt du Parti socialiste, c’est l’intérêt de la gauche. Et ce qui est l’intérêt de la gauche est quelque part l’intérêt de la France. Moi, je pense que ce n’est pas si difficile parce que, soit on fait le choix de s’enkyster là-dessus, soit on fait le choix de porter le regard plus loin.

Moi, je crédite tous les socialistes de sincérité pour leur attachement à une forme de fédéralisme européen et pour leur volonté de voir une Europe sociale.

Mais j’ai envie de dire, chers camarades, et je ne sais pas si je ferai plaisir à tout le monde, que tout de même, voyant ce que fait aujourd’hui la droite sur le plan social, j’ai du mal à penser qu’on ait pu imaginer à un moment donné que la conception de l'Europe sociale de la droite et celle de la gauche pouvait coïncider. Je ne crois pas à cette compatibilité-là et je vous demande d’y réfléchir et ne pas rester sur le souvenir d’un choix mais de constater quand même que M. Sarkozy et M. de Villepin n’ont pas du social une conception qui soit compatible avec celle des socialistes.

Oui, mais j’ai entendu qu’il y avait un oui qui était compatible avec un autre. Voilà, c’est à cela que je faisais allusion où Tu n’aurais pas compris. Non, mais il insiste, qu’est-ce que vous voulez, moi je n’insistais pas.

Troisième point, et je m’achemine vers la conclusion… Nous aurions souhaité, nous l’avons dit, en tout cas je l’ai souhaité… Le jour où on confondra Henri Emmanuelli et Le Pen n’est pas venu, tu sais. Il ne faut quand même pas exagérer. Il y a des grossièretés qui sont un peu stupides et qui n’honorent pas ceux qui les profèrent. Eh oui ! Parce que tu sais, cher camarade, j’entends répéter depuis ce matin : « A gauche, à gauche, à gauche. » Mais quand même, je ne dis rien, alors de grâce sur le sujet.

Bien. Troisième point, nous aurions souhaité, François, et je te l’ai dit à l’époque, je l’ai dit à la tribune, que ce Congrès ne soit pas précipité... Innove, vous me direz, mais on a un Congrès quand même qui capte pas mal d’énergie, un ordre de bataille pour faire face à l’offensive de cette droite qui va, comme dit M. Sarkozy, au Kärcher. Bon, au Congrès, là, on ne va pas revenir, on l’assume. Mais alors, qu’il serve à quelque chose ! Qu’il serve à quelque chose et qu’au lendemain du Congrès on ne se retrouve pas avec des problématiques intactes, si vous voyez ce que je veux dire…

Ben oui. Alors qu’est-ce qu’on peut faire d’utile dans ce Congrès pour qu’il ne soit pas celui de l’immobilisme et de l’inutile ? Eh bien, essayer de réorienter la ligne politique de ce Parti, alors moi je n’ose plus dire à gauche, mais je dirai en adéquation avec les attentes et les espérances du peuple de gauche qui s’est exprimé à plusieurs reprises. Il y a eu le 21 avril 2002, il y a le 29 mai 2005. Ignorer cela, comparer ce vote à des balles perdues de la colère, comme je l’ai entendu, ne pas comprendre qu’il y avait une demande pressante de social, premièrement. Deuxièmement, un rejet puissant du modèle libéral serait une faute, alors essayons de faire de ce Congrès un Congrès de réorientation de la ligne politique.

Et là, sur la majorité, la direction, mais c’est à vous que la question est posée : ou bien la majorité est capable de changer de ligne, ou bien, excusez-moi, on va essayer de changer de majorité. C’est logique !

Et comme je ne crois pas que ce soit dans un parti politique, dans un ministère, et que les mêmes directeurs puissent servir des politiques différentes, si la majorité change, en général vous changez la direction.

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